Tenebra dentro ~ Valentina Acciari [finito!]

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L'HISTOIRE
« Frammenti di una vita, mai finita, mai esistita »

Un appartement luxueux à Rome. Un téléphone dernier cri -pour l'époque. Et au bout du combiné, un homme en larmes qui vient d'apprendre que sa femme, retournée en France pour rendre visite à son père mourant, est décédée des suites d'une hémorragie. Et que sa fille, prématurée de 3 mois, devra rester en couveuse à l'hôpital central de Paris. Cette fille, cette Valentina dont il ne voulait même pas, qu'il avait accepté de faire pour que sa Rebecca chérie soit heureuse. Cette fille, cette petite salope de moins 3 mois qui venait de lui prendre tout ce qu'il avait au monde. Mario Acciari n'était pas du tout pressé que cette créature meurtrière sorte de sa boîte en plastique. Qu'elle y crève.

"Comment vous sentez-vous aujourd'hui?" Comme à son habitude, Valentina ne desserra pas les lèvres. Putain de question de merde. Comment peut-on se sentir bien quand on a commis une erreur de base, laisser une empreinte digitale. Qu'on s'est fait choper par les flics. Qu'on a été reconnue pyromane, atteinte d'une maladie mentale. Qu'on est enfermée depuis 756 putains de jours dans un putain d'asile. Un putain d'asile de merde. Valentina n'était pas malade, elle aimait juste jouer avec le feu. Elle n'était pas folle, elle aimait la puissance que lui conféraient les flammes rougeoyantes embrasant une voiture, un bâtiment ou mieux, un corps vivant. Elle aimait sentir la chaleur sur ses doigts, entendre le bruit de l'allumette que l'on craque. Certains aimaient le cinéma, certains aimaient les jeux vidéos, certains aimaient le chocolat, elle aimait le feu. Était-ce là une preuve de maladie mentale? Sûrement pas. Valentina s'assit en face de son psychiatre -ce connard en blouse blanche, avec ses lunettes de travers et sa barbiche qui lui donnait l'air d'un vieux bouc dégarni. Elle avait la même lueur de défi dans les yeux que lorsqu'on l'avait traînée ici la première fois. Le même air hautain et fier sur le visage. Cet air qui clamait "Va te faire foutre".

Valentina savait que cette "séance" serait comme toutes les autres. Le psy relirait son dossier à haute voix, guettant ses réactions, mais elle ne réagirait pas, elle retournerait dans sa cellule qu'ils osaient appeler chambre, et tout recommencerait le lendemain. De toute façon elle n'avait aucun espoir de remettre les pieds hors d'ici avant sa mort. "Vous avez vécu avec votre père jusqu'à vos 6 ans, c'est bien ça?" Valentina frémit. Le trouble passa dans des yeux l'espace d'une seconde. Oui, c'était bien ça, à l'exception près que le terme exact aurait dû être "survécu". Comment savait-il ça? Ça n'était pas dans son dossier, il n'y avait que les actes criminels qu'elle avait commis et qu'elle ré-entendait chaque jour, un rictus entre dégout et fascination sur les lèvres. Le psy continuait à lui raconter sa vie. Bordel comment savait-il ça? "Qui a alerté les services sociaux?" Valentina ferma les yeux. "C'est un voisin qui a remarqué que votre père vous battait et vous violait presque quotidiennement?" Elle tressaillit. Des cris d'enfant retentissaient dans sa mémoire, les siens. Les grognements de Mario, s'affairant entre ses cuisses de fillette qui n'aurait même pas dû savoir que le viol existait. Que ça faisait mal à ce point. Une unique larme roula sur sa joue, emportant avec elle un sillon de mascara couleur corbeau. Et merde. Pourtant elle s'était blindée, entraînée à ne plus rien ressentir. A devenir la psychopathe incapable de sentiments qu'on prétendait qu'elle était. "Est-ce que vous saviez que ce que faisait votre père était mal? Vous vous sentiez coupable peut-être? C'est pour ça que vous êtes devenue une gouine maintenant?" La provocation, pour la faire réagir. Valentina serra les dents et prit une grande inspiration. "La ferme! Ce sale porc n'est pas mon père!" Un coin de la bouche du Dr. Rossi se souleva. Son plan fonctionnait à merveille. Il ne faudrait pas la pousser beaucoup plus pour la sortir définitivement de son mutisme qui durait depuis plus de deux ans. Et la faire enfin guérir, sortir, débarrasser la place, accueillir un nouveau patient. "C'est moi qui ai appelé les services sociaux. Ça devait s'arrêter. Et je suis née homo, je le suis pas devenue. Je sais que j'aime les filles depuis que j'ai 3 ans. Si, c'est possible. Il a commencé à... Faire ses saloperies quand j'avais 4 ans et demi. -Vous avez vraiment une mémoire étonnante, mademoiselle Acciari. Qu'est-ce qu'il s'est passé avec votre famille d'accueil déjà? Ils ne vous aimaient vraiment pas, mmh?" D'autres souvenirs remontèrent à la surface. Lorsque sa mère d'accueil avait déchiré toutes ses fringues gothiques et punk alors qu'elle avait 11 ans. Les coups qu'elle avait pris lorsqu'elle avait été retrouvée dans la salle de bains en train de baiser la meilleure amie de leur fille. Ç'avait été le final. Après ça ils l'avaient foutue à la rue. A 14 ans, toute seule, sans argent, sans toit, sans rien. Elle n'était qu'une gosse, merde. Pas une gosse innocente chaste et pure, tout le contraire même. Une gosse qui buvait, qui fumait, qui se droguait occasionnellement, qui baisait toutes les filles qui lui passaient devant le nez. Mais une gosse quand même. Et on fait pas ça à une gosse. "Ouais. Ils m'aimaient pas." se contenta-t-elle de répondre. "Pourquoi vous n'avez pas rappelé les services sociaux? -C'est des incapables. Ils m'ont jamais aidée. J'me suis débrouillée avec rien. -Rien, c'est vite dit... Ça vous faisait quoi de vous vendre à des inconnus? De les sentir en vous? Alors que votre truc à vous c'est pas le service trois pièces masculin?" Valentina serrait les poings sur ses accoudoirs. Elle avait refermé les yeux et sa mâchoire tremblait sous la tension. Son sang se répandait dans sa bouche en effluves douces-amères, s'échappant de sa langue mordue trop fort. Un mélange de colère, de dégout, de tristesse, de haine et de douleur s'était peint à son insu sur son visage. Elle se rappelait tous ceux qui la lui avait fourrée dans tous les trous qu'ils pouvaient trouver, et elle avait envie de vomir. Rossi sourit franchement cette fois. Il savait bien qu'elle n'était pas folle cette petite. Qu'elle avait juste eu trop de douleur dans sa vie. Qu'elle n'avait rien à foutre dans cet asile de déments. "Vous voulez vraiment savoir ce que ça fait de s'étouffer avec le foutre d'un connard de plus qui va se barrer sans payer et qui fait 100 kilos de trop pour qu'on puisse même penser à protester? Vous avez une idée de la difficulté à trouver un client quand on a le visage gonflé à force de pleurer et qu'on boîte parce qu'on a dû se faire défoncer le cul juste pour pouvoir bouffer au McDo? Même à vous je le souhaite pas. Et je hais les hommes, bordel..." Rossi n'était pas un monstre. Il était évidemment apitoyé par l'histoire de cette pauvre Valentina, alors il lui laissa quelques minutes de répit. Il lui plaça un verra d'eau devant le nez, elle l'avala en se rinçant la bouche pour faire partir le goût du sperme que ces souvenirs dégueulasses avaient fait rejaillir de sa mémoire. "Une mémoire étonnante.."Si pesante. D'une voix plus douce, le psy continua. "Je ne sais pas comment vous vous en êtes sortie. Comment vous avez commencé à... Cette fascination que vous avez pour le feu." Valentina aspira une grande goulée d'air. "C'est elle qui m'a sortie de là. Luisa. -Votre première victime? -Ouaip, elle-même. Elle a dit qu'elle m'aimait, voyez-vous ça... Alors je l'ai crue et je l'ai aimée aussi. Elle m'a offert un toit, une guitare, une moto. Toutes les fringues, tous les tatouages, tout ce que j'ai voulu. Elle m'a offert son corps. C'était la première et la seule fois que quelqu'un m'a dit qu'il m'aimait. J'avais 16 ans, elle 22. J'avais de la chance qu'elle aie jeté son dévolu sur moi. Mais... Je n'étais qu'un jouet, un médiocre jouet. Elle m'a jetée quand elle en a eu assez. Après quatre ans. En fait elle me trompait depuis toujours, mais au bout de quatre putains d'années elle m'a larguée du jour au lendemain. J'ai jamais autant souffert qu'à ce moment là. -Alors vous l'avez tuée. -Non... Je l'ai brûlée. C'était le seul moyen que la souffrance s'arrête: qu'il ne reste plus rien de reconnaissable en elle. J'ai lancé dans le feu le briquet qu'elle m'avait offert et j'ai laissé une allumette en évidence lorsqu'elle a eu fini de flamber. Je n'utilise plus que des allumettes maintenant, pour tout." Un silence s'installa, un léger malaise avec lui. "C'est à cause d'elle, cette pyromanie? C'est comme ça que c'est né? Pourquoi le feu? Pourquoi ces endroits, ces gens? Pourquoi cette allumette? -C'est par elle que ça a commencé. Une fois qu'on a goûté à la puissance, c'est une addiction. Le feu parce qu'il est aussi bien beauté que destruction. Qu'il s'élève avec majesté, qu'on ne peut pas le combattre sans risquer d'y rester, qu'il détruit tout et ne laisse rien. J'ai brûlé ceux qui m'ont pas payée à l'époque où... Ceux qui m'ont frappée. Ceux qui ont fait des trucs pour lesquels j'avais dit non. J'ai brulé leurs maisons, leurs bureaux, leurs voitures. J'ai réduit en cendres toute la souffrance de ma vie. Mon connard de géniteur... J'ai attendu qu'il meure et je l'ai fait incinérer. J'ai foutu ses cendres dans les chiottes et j'ai tiré la chasse. Pourquoi je laisse une allumette... Parce que c'est mon signe. Parce que j'aime les allumettes. Mais pas assez pour en être une, c'est comme ça que la presse m'a appelée, "L'allumette"... Si j'avais pas laissé cette merde d'empreinte, si j'avais pas été déjà été fichée pour de petits vols... Leurs locaux auraient cramé eux aussi. -Quand est-ce que vous êtes devenue une telle asociale?" La faire parler elle-même de ce qu'elle avait vécu était le meilleur moyen de savoir si elle était vraiment folle ou non. Le Dr. Rossi était fier d'avoir trouvé ce moyen-là, et il était presque sûr qu'elle était saine d'esprit. Pleinement consciente de ses actes. Elle les assumait, était en mesure de les expliquer. Elle ne les regrettait pas. La question qu'il restait était de savoir si elle recommencerait ou non. Valentina laissa échapper un son que Rossi interpréta comme un rire amusé. "Depuis toujours. J'avais commencé à m'en sortir grâce à Luisa. J'avais des connaissances, des relations, un ou deux amis même. Maintenant c'est fini. Je refuse d'aimer encore. D'offrir encore mon affection."

"Comment avez vous vécu votre arrestation et votre procès?" interrogea Rossi. "Bien." En vérité, avec sérénité et soulagement. Cela ne lui faisait pas plaisir de se venger. Cela lui semblait une nécessité. Elle éprouvait un besoin vital de voir les flammes s'élever, danser, consumer une à une les sources de toute sa douleur. Et cette allumette intacte qu'elle laissait à proximité, fétiche d'elle-même guérie d'une blessure, enfin réparée, neuve. Sa vengeance était accomplie -hormis peut être les locaux de ce magazine de merde qui avait osé la surnommer "L'allumette"- et pourtant elle savait que si la police ne l'avait pas trouvée, elle n'aurait pas pu s'arrêter de tout brûler sur son passage.

Ces presque trois ans loin de toute flamme l'avaient guérie de son addiction, bien qu'elle gardât la fascination. Le Dr. Rossi, l'ayant compris, décida qu'elle sortirait un mois plus tard le temps de confirmer, jour après jour, son diagnostic. Un mois plus tard il la reçut donc dans son bureau et lui remit les vêtements qu'elle portait a son arrivée ainsi que la clef du garde meuble où avaient été stockés tous ses biens en attendant sa sortie, et c'est comme elle y était rentrée, la folie meurtrière en moins, que Valentina quitta l'hôpital psychiatrique pour une nouvelle vie loin de tous ses souvenirs, loin de son Italie qu'elle aimait pourtant. Une fois arrivée à Paris, elle trouva un job en tant que tatoueuse, pas trop mal payé. En mettant ses talents de hackeuse à l'oeuvre, elle transféra tous les fonds du journal qui l'avait surnommée "L'allumette" sur un compte offshore, sans risque d'être repérée. Et ces fonds étaient très, très conséquents, mais elle ne voulait pas les utiliser à tort et à travers. Elle commença par se payer un appartement dans le quartier gay de Paris, le Marais, puis quelques petites choses par-ci, par-là. Il lui arrive également de réaliser des ESP (Enquêtes Sur la Personne) pour le compte de tel ou tel entrepreneur, de tel ou tel particulier.

HORS JEU ▹ GROUPE : Gainsbourg ▹ AVATAR : Noomi Rapace ** ▹ SCENARIO ou PERSONNAGE INVENTE : PI▹ PSEUDO/PRENOM : scarlet-ivy, lily scarlet ▹ ÂGE : 15 ▹ OU AVEZ VOUS CONNU LE FORUM? : prd ▹ PRESENCE : normalement toutes les nuits :').