L'HISTOIRE
« Let me be, who I am. »

---

▹ La naissance. C'est un jour bizarre ça, la naissance. On s'y attend pas, on est un simple fœtus qui évolue dans l'eau, et puis d'un seul coup, après, le plus souvent, des heures de travail pour notre mère, on atterri dans le monde réel, et on ouvre les yeux sur des visages, sur de la lumière, sans savoir vraiment ce qu'on fait là. C'est vrai, après quand tu grandis, les gens prennent la peine de t'expliquer les choses avant qu'elles ne t'arrivent, mais là non. Alors que c'est quand même, l'un des trucs les plus dingues qui va t'arriver dans ta vie, personne ne vient te donner un guide, ou une espèce d'explication sur ce dans quoi tu vas être forcé de t'engager. C'est dommage, je pense que je fais parte de ce qui n'aurait pas dit non si on leur avait proposé. Y'a des gens qui sont naturellement disposés à vivre une vie facile, et à comprendre chaque truc qui leur arrive. Moi ça n'a jamais été mon cas, et je pense que même ce premier jour de vie, il a pas vraiment été à moi. Après tout, on avait été deux fœtus dans le ventre de notre mère, et Amelia était née en même temps que moi ou presque. Peut-être que dans le fond, ça serait elle mon guide pour comprendre un peu le fonctionnement de la vie. Peut-être que c'est pour ça, que comme on nous l'a raconté souvent, elle a attrapé ma main et l'a serré quand on nous a mis dans le même berceau. J'allais sûrement avoir besoin d'elle davantage qu'elle n'aurait besoin de moi, mais je me dis que dans le fond, je serais quand même là quand elle en aurait besoin, et c'était peut-être bien ça le plus important dans cette histoire. C'était peut-être ça dans le fond, l'histoire des jumeaux.
▹ " Papa jveux pas y aller! Jveux rester avec Lia! " Oui, j'aurais vraiment voulu rester avec ma sœur ce jour là, mais c'était le jour de mon premier entraînement de foot, et dans l'esprit de mon père, il était inconcevable que son fils n'ait envie, ce jour là, d'assister à un premier entraînement de gymnastique plutôt que de football. Son fils serait un homme, un vrai. Son fils, c'était simplement moi. Finalement, je retrouverais ma sœur une heure après, elle était ravie, moi un peu plus amoché mais mon père semblait trop fière de moi pour que je ne regrette quoi que ce soit. Elle m'expliqua qu'il n'y avait qu'un seul garçon dans son cours, et mon père lâcha ses mots, avec toute la délicatesse dont il savait faire preuve et que son éducation finirait par me transmettre:" Encore un ptit pédé! J'avais 6 ans, je ne comprenais pas le sens de ce mot. Mais mon père ne tarderait pas à me l'expliquer à me dire que JAMAIS je ne devrais devenir comme ça. Que JAMAIS je ne devais ressentir une attirance pour un autre Homme, parce que c'était malsain, parce que c'était contre nature, parce que j'étais un Homme et que les Hommes donnent du plaisir aux femmes, mais n'en prennent pas avec d'autres Hommes. J'étais sans doute jeune, mais ce discours resterait pour toujours dans ma mémoire, comme une ligne de vie.
▹ " Vous savez ce que ça représente M. Bourgeais ? Bien sûr qu'il savait, c'était même sa faute à lui si, dans le fond, je lui avais taper dessus à cette tapette. On peut pas vivre tranquillement sans qu'ils viennent nous causer des ennuis cela. Bien sûr que je l'avais envoyé à l'hôpital, je voulais juste corriger ce que ses parents avaient ratés avec lui. Mais mon père me l'avais bien souvent dit ça aussi, ces hommes là, si on peut encore appeler ça des Hommes, ils ont peurs de rien, pas même de vous coller un procès aux fesses. C'était précisément ce qui venait de m'arriver. Mon père était pourtant trop fier de son chef d'œuvre, de moi, pour regretter quoi que ce soit. Le jour de jugement approcha, et il fit un gros chèque pour m'éviter le centre de détention pour mineur. La semaine d'après, je découvrais le sens de son discours dans les bras d'une femme de 18 ans. Du haut de mes 15 ans, ma virginité venait de s'envoler alors que je veillais à sauvegarder de tout ces abrutis celle de ma sœur adorée. Il était hors de question qu'elle ne la perde vulgairement avec un abruti de mon âge. Elle méritait plus, elle méritait tellement plus que ce que notre famille pouvait lui offrir...
▹ J'avais eu 18 ans la veille, et pourtant, les souvenirs de la soirée était comme absent de mon esprit. Je me souvenais vaguement d'avoir pris la voiture, après avoir passé mon permis et d'être aller en boîte avec les autres. Le problème c'est que je ne m'étais pas réveiller chez moi, et que dans mon lit, il y avait une autre fille, ET un homme par la même occasion. A croire que j'avais perdu toute once de la fierté la veille. Je quittais précipitamment la chambre et pris la voiture, fou de rage contre moi. Je ne savais pas si j'avais touché cet Homme ou si nous avions partager cette femme, mais le fait est que c'était arrivé. J'avais faillis devenir ce que je détestais le plus. La colère me fit perdre la raison, et la voiture de mon père termina sa course, et moi avec, dans une autre voiture. Je fus hospitalisé, personne ne connaitrait jamais la raison qui avait causé autant de colère chez moi. C'était bien trop honteux pour que je puisse prendre le risque que ce ne soit un jour révélé. Je deviendrais la risée de mes amis, et mon père ne me le pardonnerait pas, alors il était hors de question de toucher à un homme, et plus que jamais, je detestais ces Hommes qui en aimaient d'autres, et qui profitaient parfois de leur état d'ivresse pour s'offrir une nuit dans leurs bras. Ils n'avaient aucune morales. Ils étaient contre nature. C'était définitif.