L'HISTOIRE
« L'enfer est dans un coeur vide. »

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Charleville Mézières : une charmante petite ville des Ardennes françaises où le soleil est rare mais sacré, la pluie accablante mais douce. C'est à l'aube d'un automne que Noah vit le jour, entouré seulement de sa mère, épuisée par toutes ses nuits blanches et ses efforts, et de son père, sans doute tout aussi heureux malgré son habituel masque d'impassibilité. Aucun autre enfant n'était à leurs côtés dans la chambre d'hôpital redevenue silencieuse : Noah était leur premier bébé. Ce n'est que sept ans plus tard que lui eut la chance de voir venir au monde un petit bout de vie presque semblable à celui qu'il avait été, qui devint par la suite la petite soeur qui l'obligea à jouer aux poupées et qui pleura tous les soirs dans ses bras pour ne pas qu'il la laisse seule dans sa chambre pleine de monstres. Ainsi, dès sa propre naissance, on lui offrit une existence des plus normales, une existence calme, presque sans aucune source d'exaltation, une existence qu'il trouva bien vite trop banale pour lui. Il avait besoin de rires, de cris, il avait besoin d'imprévus et de folies, mais ses parents ne laissaient de place qu'à leur organisation forcenée et à l'ordre dans tous les domaines. Noah ne trouvait pétillement que dans les yeux de sa soeur, toujours imprévisible et toujours pleine de vie. Bien sûr, il aimait aussi ses parents, il aimait la maison, il aimait la ville et le printemps, il aimait l'école et apprendre à écrire, et il était heureux. Enfant, on l'est toujours, ce n'est qu'après que l'on se rend compte que, peut-être, on ne nous a pas donné la vie qu'on attendait. Mais Noah ne pouvait en vouloir à personne, même en grandissant. Il manquait de beaucoup de choses mais n'y pensait pas, ou se disait que ce n'était pas si important. Il avait tout d'un enfant épanoui, il avait des amis et il allait jouer au parc tous les samedis. Il avait de bonnes notes et n'était pas particulièrement capricieux. Sa mère et son père formaient un couple parfait et leurs deux enfants étaient leur plus belle réussite, leur plus grande fierté. Tout allait bien, alors Noah n'allait pas tout gâcher simplement parce que les choses, aussi belles purent-elles être, ne lui convenaient jamais.
C'est à douze ou treize ans qu'il se mit à préférer la ville au nid familial, sans doute la faute à l'adolescence. Il aimait alors traîner sur la place de Charleville les jours de soleil pour s'en absorber, arpenter les rues étroites que bordaient de hautes maisons toujours vides de vie mais pleines d'histoires, passer par le square en début de soirée avant de rentrer dîner. Ainsi, il découvrit Rimbaud, le poète né comme lui dans cet endroit, mort depuis une centaine d'années mais présent à chaque coin de rue en toutes sortes d'hommages. Sans doute peut-on désigner cette période de sa vie comme la naissance de sa passion pour la littérature française.
Lorsqu'il n'était pas dehors, Noah passait son temps dans la chambre d'ami de la maison. C'était là que son père avait rangé le vieux piano de sa propre mère décédée, et Noah avait trouvé en cet instrument et ce, dès sa petite enfance, une sorte d'apaisement et de magie profonde. Il apprit à jouer d'anciennes partitions qui traînaient là puis choisit d'autres morceaux que sa mère ne refusait jamais de lui montrer, elle qui avait toujours adoré la musique sous toutes ses formes et qui avait pris des cours de piano enfant. C'était la seule complicité qu'il partageait avec sa mère. La seule. Il pouvait passer des heures et des heures à jouer, avec elle ou même seul, sans que le temps ne lui semble long, sans que son esprit ne chavire ailleurs. C'était un de ses plus beaux plaisirs.
Il n'y a pas beaucoup d'autres choses à raconter. Noah grandit toujours aussi paisiblement à Charleville, mais sans jamais rien trouver d'assez épatant pour rendre la routine moins lourde à supporter.

Il n'avait pas encore dix-huit ans lorsque Noah s'inscrit en première année à l'université de Charleville, en Lettres évidemment. Ses parents, bien que très cultivés, auraient préféré des études plus scientifiques mais n'insistèrent pas : l'essentiel était qu'il fasse des études, quelles qu'elles soient.
Noah s'intégra parfaitement bien et fut ravi de tout ce qu'il découvrit. Il rencontra de nouvelles personnes, apprit des choses qui l'intéressaient enfin vraiment, mis les pieds dans des clubs de soirées qu'il n'avait jamais vus. Et avec les filles, bien sûr, c'était de plus en plus facile. Avec les garçons aussi, car c'est à cette période également qu'il se découvrit une véritable attirance envers les personnes du même sexe que lui. Avant l'université, il n'eut que des relations sans grand lendemain avec des filles du lycée. Et à l'université, tout avait commencé comme ça aussi. Il avait très vite fini en couple avec une poupée qui partageait certains de ses cours, mais se surprenait à plutôt regarder l'assistant de leur professeur de littérature par-dessus l'épaule de sa chérie, dont il se sépara une semaine plus tard pour d'ailleurs vivre ses premières expériences homosexuelles.
Mais tout cela est vide de sens pour Noah aujourd'hui. La seule chose qu'il retient de cette année-là, c'est Chloé. Chloé, la fille qui lisait Les Hauts de Hurlevent dans le parc derrière le campus, qui portait un tee-shirt à l'effigie de Nirvana et qui souriait tout le temps. Il avait beau avoir découvert les plaisirs charnels avec les garçons depuis peu, cette fille-là lui reprit toute son attention. Elle était si belle, déjà il ne voulait plus qu'elle. Et il l'eut, mais pas comme un trophée, plutôt comme un trésor. Il était vraiment amoureux d'elle et n'avait pas honte de le montrer ou de le dire. Elle avait tout pour elle et il l'admirait presque. Ils ne restèrent ensemble que sept malheureux mois, mais pas parce qu'ils finirent par se lasser l'un de l'autre comme la plupart des couples de leur âge, non. Se lasser, comment auraient-ils pu. Ils partagaient tout et encore aujourd'hui, Noah n'a d'elle que de magnifiques souvenirs.
Elle mourut d'une rupture d'anévrisme, un jeudi matin de juin. Rien n'avait laissé penser qu'elle était mourante, bien sûr. C'est bien cela qui est horrible avec les ruptures d'anévrisme : on ne peut même pas se préparer à perdre celle qu'on aime. Au fond, Noah ne s'en est jamais réellement remis. Cette année-là, il arrêta les cours, le piano, la littérature, tout. Il avait perdu patience aussi, et dénonçait l'entêtement stupide de ses parents à présent à chaque fois qu'il en avait l'occasion. Il devint aigri, et commença à fumer alors que ça ne l'avait jamais tenté auparavant. Bizarrement, la cigarette lui apportait à ce moment une infime consolation qu'il ne trouvait plus nulle part. Il avait l'impression de seulement errer dans des lieux qu'il n'aimait plus. Il se sentait oppressé, à l'étroit : tout avait son odeur ou ses couleurs, ou son rire, ne fut-ce que son souvenir était trop douloureux.
Alors, dans le courant du mois d'août, il annonça à sa petite famille qui ne le comprenait plus qu'il allait partir. Ils étaient brisés : ses parents de le voir tout gâcher, ses études et son avenir, sa soeur de le voir malheureux et de ne pas pouvoir lui apporter de l'aide. Mais ils ne firent rien pour le retenir. Au final, c'était peut-être mieux pour tout le monde. Aujourd'hui en tout cas, c'est que chacun se dit dans son coin.

Evidemment. Où vont les âmes perdues, les décharnés, les révoltés, les enragés, les paumés ? A Paris. Tout le monde va à Paris. Là-bas, tout semble toujours possible. Ce qui n'empêche pas que Noah ait trimé en y arrivant. Pas d'appartement, aucune connaissance, pas de diplôme.. Il ne comprend toujours pas aujourd'hui d'où lui est venu cette force qui lui permit, alors qu'il n'avait pas même encore dix-neuf ans, qu'il venait de quitter sa ville natale mais surtout de perdre celle qui était tout pour lui, de se battre et de se débrouiller au maximum pour se reconstruire une vie ici. Il ne le comprend pas, mais il l'a fait. Et ça fait maintenant six ans qu'il vit à Paris, et même si on ne peut pas dire qu'il soit heureux et qu'il ait tout à fait retrouvé un mode de vie stable, il s'y sent bien au quotidien. Quotidien d'ailleurs qui n'en est pas vraiment un étant donné sa façon de vivre, ce qui enfin comble le malaise qu'il ressentait chez lui, à Charleville. Mais pas le manque d'elle, qui continue chaque jour de l'envelopper d'une amertume triste et douloureuse...

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 HORS JEU ▹ GROUPE : Gainsbourg ▹ AVATAR : Louis Garrel ▹ SCENARIO ou PERSONNAGE INVENTE : Je suis le fruit du petit scénario so perfect d'Alex ▹ PSEUDO/PRENOM : Snow/Amandine (mais ne m'appelez pas par mon prénom, je le hais...) ▹ ÂGE : Seventeen ▹ OU AVEZ VOUS CONNU LE FORUM? : Par Cécile, alias Candice O. Maugan-Chemin ▹ PRESENCE : Avec moi, tout dépend de ma motivation... Je dirai quatre jours sur sept, parfois un peu plus, parfois (aussi rarement que possible, je l'espère) un peu moins.