CLIQUE ICI mon chaton - toutes les deux heures hein et gagnes des points !
nous sommes fières de t'accueillir sur la version 2.0 de FOQUE YOU, I'M PARISIEN nous te souhaitons la bienvenue parmi nous et nous espérons que tu t'y sentiras comme chez toi !
si tu es nouveau, nous t'invitons à aller lire le règlement et le contexte. des scénarios sont également à ta disposition, n'hésites pas à y faire un tour et peut-être faire le bonheur de l'un de nos membres ! puis direction la fiche de présentation, tu as cinq jours pour la terminer.
BAZZART - PRD soutenez le forum - on vous en sera reconnaissante
I RIEN, JE SUIS... travailleur, persévérant, calme, gentil, généreux, à l'écoute, souriant, timide, effacé, manque de caractère parfois, déprimé bien souvent, compréhensif, à l'écoute ...
J'AIME le calme, l'art, la photographie, la peinture, l'art de la déco intérieure, l'histoire de l'art, mes filles, la musique douce, mes emplois, la nature, les fruits, travailler d'arrache pied, être fier de mon travail, pouvoir oublier, ...
JE N'AIME PAS la violence, la télévision, les bruits soudains, le mensonge, l'hypocrisie, les gens étroits d'esprit, la politique, le sport, l'ennuie, les week-ends, les vacances, ...
HORS JEU ▹ GROUPE : Mr tout le monde ▹ AVATAR : Jared God Leto ▹ SCENARIO ou PERSONNAGE INVENTE : Inventé de ma tête même ▹ PSEUDO/PRENOM : Morphine. Mais appelez moi Momo (a) ▹ ÂGE : 22 ans. C'beau comme âge ▹ OU AVEZ VOUS CONNU LE FORUM? : En projet sur Baz ▹ PRESENCE : Tous les jours. Apprenez à me supporter dès maintenant (a)
Dernière édition par T. Hugo Amiel le Dim 24 Fév - 19:13, édité 4 fois
Invité
Invité
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 21:29
L'HISTOIRE « Toute histoire commence par une rencontre. »
« Hey Ben ? Ben ? Benjiiiiiiiiii !! » Sursautant légèrement, un jeune homme aux cheveux bruns et aux yeux bleus, tourna la tête pour voir celui qui était en train de l'appeler à voix basses, sur la rangée derrière la sienne, durant leur cours d'économie. Soupirant, le dénommé Benji, adressa à son ami un regard noir. « Matt je sais pas toi mais moi je suis en train d'écouter le cours là. Alors ferme-la tu veux ? » Le jeune Matt, leva les yeux au ciel avant de désigner un point, plusieurs rangées plus basses. « Mais matte un peu ce qu'on a là ! » Faisant claquer la langue contre son palet, signe d'agacement de sa part, le brun se retourna pour regarder là où son ami lui montrait. En apercevant la jeune fille blonde rousse qui se trouvait trois rangées plus bas que la sienne et légèrement en décalé par rapport à lui, il en eut le souffle coupé. Aucun doute là dessus, cette fille était la beauté incarnée ! Un front haut, un nez long et fin, une bouche légèrement pulpeuse et parfaitement dessinée, des pommettes hautes, de longs cheveux lisses. « Hey ferme la bouche un peu ... T'as pas l'air con là ... » Entendant le ricanement de son ami derrière lui, Benjamin obéit en refermant aussitôt la bouche, demeurant pourtant toujours aussi incapable de détourner le regard de cette jeune femme à la beauté hypnotisante. Celle ci sentit sans doute le regard insistant posé sur elle, puisqu'elle tourna alors son regard vert émeraude vers le jeune homme qui se trouvait plusieurs rangées derrière elle. Lorsqu'elle croisa son regard, ses joues se colorèrent d'une légère couleur rouge rosée. Lorsqu'elle se détourna de lui, semblant gênée, Ben tenta tant bien que mal de revenir à son cours pour le suivre et prendre des notes. Durant les deux heures qui suivirent, il du lutter de toutes ses forces pour ne pas la regarder de nouveau, bien que son regard fit régulièrement des allés et retour entre elle et sa feuille sur laquelle il prenait rapidement des notes. Quand la fin du cours arriva enfin, il rangea ses affaires en hâte dans son sac avant de filer rapidement sans attendre sa bande d'amis pour rattraper la jeune femme. Une fois à sa hauteur, il souffla doucement avant de lâcher un bref ... « Hey... » Surprise par une telle arrivée, la jeune femme tourna le regard vers lui, en souriant en coin.« Hey... » Répondit-elle sur le même ton en regardant à nouveau face à elle.« Hum... tu es nouvelle n'est-ce pas ? Je ne t'avais jamais vu jusqu'à présent ... Moi c'est Benjamin. » « Oh oui je suis arrivée ce matin seulement. Et je dois bien avouer que je me sens un peu perdue. Je suivais des cours par correspondance alors forcément, ça m'effraie un peu de me retrouver dans une université avec autant de gens. Et je m'appelle Claire. » De toute évidence émerveillé et subjugué, le jeune homme regarda la blonde avec des yeux brillants de ravissement.« Oh si tu veux je pourrais te faire visiter et tout. Tu as terminé les cours là ou tu veux que je t'accompagne quelque part ? Ca ne me pose pas de problème, j'ai terminé moi. » « J'ai terminé les cours moi aussi ... » « Ah ... Hm sinon on peut aller boire un café ? Histoire de ... Ben d'apprendre à se connaitre. Je suppose que tu ne connais encore personne ici ... » Alors qu'il s'attendait à un refus pur et dur de la part de Claire, Ben eut la surprise de la voir se tourner à nouveau vers lui en souriant. « C'est très gentil Benjamin ... J'accepte ! » Ils étaient en train de continuer leur discussion à propos d'eux, tout en quittant tranquillement la fac la fac en riant et parlant, lorsque Matt débarqua pour enrouler un bras autour des épaules de Ben en explosant de rire et donnant un tape sur le torse de son ami. « Alors Benji on essaie déjà d'sauter la petite nouvelle ? » Surprise et dégoûtée, Claire, s'éloigna rapidement des deux garçons sans se retourner malgré les appels de Benjamin. « Merde Matt ... T'es vraiment con ! Et arrête de toujours penser à ça ... » Malgré cette rencontre qui aurait put mal se terminer ainsi, ces deux personnes se revirent à plusieurs reprises, jusqu'à se mettre en couple. Deux ans plus tard, ils se mariaient et quelques mois après ce mariage, eurent leur fils. Le premier et le dernier enfant. Ils l'appelèrent Thibault Hugo ... Tout était absolument parfait et divin pour eux. Claire avait eut droit à un véritable mariage de princesse, escortée auprès de son époux au bras de son père qui l'avait mené droit vers un avenir plus que rose et prometteur. Une robe blanche, du tulle, de la dentelle, de la soie et le tout suivit d'une lune de miel sans nom, aux Maldives. Un bonheur sans le moindre nuage avec de bien rares disputes qui ne concernaient que la jalousie des deux amants. On pourrait aisément comprendre cela, en sachant qu'ils s'aimaient bien trop pour ne pas éprouver de jalousie lorsque lui devenait ami avec unetelle ou qu'elle, se liait d'amitié avec untel. Oui, tout cela était parfaitement normal et ça ne les dérangeait pas le moins du monde. De toute façon, ils s'aimaient à en crever, ne jurait que par leur amour et savaient qu'ils feraient leur vie ensemble. Ce qu'ils avaient commencés à faire, en se mariant puis en ayant leur premier enfant. La naissance d'Hugo, ce fut l'apothéose, la cerise sur le gâteau, l'accomplissement final d'un rêve sans limites. Un accouchement qui eut lieu, certes dans la douleur, mais qui fut rapidement remplacée et chassée par les larmes de bonheur et les pleurs du bébé lui même. Leur enfant, le premier, qui porterait en prénom, le second prénom de Benjamin lui même, qui n'était autre que Hugo. Quant à son prénom Thibault, ce n'était autre que celui du père de Claire, duquel elle avait toujours été terriblement proche à en avoir une relation des plus fusionnelles. Dommage qu'il soit mort deux ans après la naissance de son enfant, ayant eut ainsi à peine le temps de le connaitre. Elle était des plus déçues de cette perte tragique mais tout autant par le fait que son fils ne connaîtrait jamais la joie et le bonheur de connaitre un tel homme ...
« Les soucis arrivent rarement seuls. »
« Maman l'est où papa ? » La petite voix douce et à peine audible de son fils, s'éleva derrière Claire dans la voiture familiale. Elle lui lança un rapide regard dans le rétroviseur, souriant légèrement en voyant sa petite moue boudeuse. Le garçonnet qui venait de fêter ses trois ans, ressemblait déjà énormément à son père. Ses yeux étaient d'un bleu intense, lui donnant un regard perçant et intelligent. Son nez était fin et petit, son menton déjà volontaire et ses cheveux bruns. Il savait plutôt bien parler, même s'il n'articulait pas forcément bien, comme tout enfant de son âge. Il était à l'école depuis deux petits mois seulement et il ne rencontrait aucun problème. En bref, il était à l'image de leur relation et de leur vie depuis qu'ils se connaissaient. A savoir, à la fois normal, parfait et merveilleux. Il était le fruit de leur amour, leur dose de bonheur et de joie supplémentaire. Ils vivaient toujours dans leur petite maison de location et tout allait toujours pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ils ne rencontraient pas le moindre problème dans leur vie. C'en était même presque trop beau pour être vrai. « Je te l'ai dis tout à l'heure mon chéri. Papa est resté à la maison, il avait mal à la tête aujourd'hui. » Sans rien répondre, le garçonnet détourna la tête pour regarder dehors en hochant lentement le menton.« Maman aujoud'hui Tim a tapé Billie » Riant doucement devant le changement de sujet radical de son fils, la jeune femme le regarda de manière attendrie, par le biais du rétroviseur. « Ah oui ? Et les maîtresses l'ont punis ? » Quand elle croisa le regard de son fils, elle eut un léger sourire en voyant sa mine déterminée. « Oui ! J'ai dis aux maîtesses qu'est-ce qu'il avait fait. Et avant, je l'ai gondé pace que on tape pas su les filles. » Riant de nouveau, elle se gara tranquillement dans la rue de leur maison avant de détacher sa ceinture pour se tourner vers lui. « C'est bien mon fils, je suis fière de toi ! Tu ressembles de plus en plus à ton père ! » Sans rien ajouter d'autre, elle quitta la voiture pour en faire le tour et détacher son fils, avant de regagner tranquillement la maison familiale, en le tenant par la main. Lorsqu'elle entra à l'intérieure de la maison, elle souffla doucement à son fils de ne pas faire de bruit et de filer dans sa chambre pour s'amuser, ajoutant qu'elle le rejoindrait après. Lorsqu'elle eut mit sa veste sur le porte manteau et retiré ses chaussures, elle se dirigea sans attendre vers la chambre conjugale. Lorsqu'elle y entra, elle retrouva la pièce plongée dans une obscurité totale, comme depuis le matin. Sur la pointe des pieds, elle entra pour aller s'asseoir sur le bord du lit, passant sa main sur le front de son mari qui était toujours à température normale, à première vu. En l'entendant gémir doucement, elle retira sa main. « Hey ... » Souriant légèrement, elle se pencha pour déposer un bref baiser sur les lèvres de celui qui partageait sa vie depuis cinq ans. « Hey ... Tu vas mieux ? » « Sur une échelle de un à dix ... La douleur est à neuf et demi ... Ce qui est un certain progrès puisque ce matin elle était à douze sur dix ... » Soupirant doucement, la jeune femme embrassa une nouvelle son mari avant de se lever. « Je vais te préparer un bouillon et je ferais en sorte qu'Hugo ne fasse pas trop de bruit. » Un instant plus tard, elle revenait dans la chambre pour apporter un bouillon ainsi qu'un médicament à son époux. Elle l'embrassa une nouvelle fois avant de filer pour rejoindre son fils dans sa chambre où il jouait tranquillement aux petites voitures. Souriant légèrement, elle s'essaya sur le lit de son fils, recouvert d'une couette à l'effigie des "Minipouss". « Y dort mon papa ? » « Oui mon chéri. » « Et mon bisou du soir ? » « Pas ce soir désolée. Mais demain il ira mieux et vous rattraperez cette journée de perdue. » Mais malheureusement, ce ne fut pas le cas. Le lendemain ainsi que le sur lendemain, Benjamin resta enfermé dans sa chambre, dans le noir complet. Les comprimés qu'il prenait, ne suffisaient pas à faire passer son mal de tête et pourtant, ni lui ni son épouse ne s'inquiétèrent réellement. Et ils pensèrent avoir eut raison lorsqu'au quatrième matin, il se réveilla d'excellente humeur, son mal de tête ayant totalement disparu. Il passa même son samedi à s'amuser avec son fils et sa femme, à jouer dans le jardin. Il était justement en train de jouer avec son fils, qui s'amusait à lui envoyer un ballon, lorsqu'il sembla perdre tout réflexe. En effet, au troisième lancé de ballon, il leva les bras pour le rattraper, mais le regarda tomber à ses pieds sans même l'avoir touché de ses mains. Moqueur, son fils avait rit un bon moment, sous le regard bienveillant de sa mère qui pensait alors que ce n'était qu'une petite maladresse de son tendre époux. Sans attendre une seconde, Hugo s'était replacé en face de son père, ballon en main. « Attape papa attape ! » Cria-t-il avant de lancer le ballon en direction de son père qui, une nouvelle fois, leva les bras en vain.« Je crois que ... Je crois que je vais aller me ... Coucher. » Fini par dire le père de famille en fronçant les sourcils, avant de s'éloigner en titubant quelque peu, pour rentrer dans la maison. « Chéri ? Chéri ça ne va pas ? » Lui demanda son épouse qui l'avait rejoint et enroulé un bras autour de sa taille pour le soutenir. « Je crois ... que je ... vais être malade. » Avant d'avoir eut le temps de terminer sa phrase, il rentra dans la maison en courant, manquant tomber à trois reprises, et s'enferma dans les toilettes pour vomir. Inconscient de ce qui était en train d'arriver, Hugo resta dans le jardin, pour s'amuser seul avec son ballon. Alors que d'un côté Claire était en train d'émettre l'idée que son mari devrait se rendre à l'hôpital car ce qui lui arrivait n'était pas normal, de l'autre, leur fils était en train de s'approcher dangereusement du bord de la piscine.
« La maladie c'est comme l'amour. Ca arrive lorsque l'on s'y attend le moins. »
Toujours inquiets pour l'état de santé de Ben qui n'en finissait plus de vomir dans les toilettes, aucun des deux parents n'entendis le bruit de chute dans l'eau, d'Hugo, qui s'était penché au dessus de la piscine pour récupérer son ballon qu'il y avait fait tomber. Cela faisait exactement deux minutes qu'il se trouvait dans l'eau, lorsque sa mère vint s'inquiéter de savoir si tout allait bien pour lui. Elle venait de prendre la décision de conduire son mari à l'hôpital. Mais lorsqu'elle vit son fils dans l'eau, elle oublia tout cela et ne pensa plus qu'à lui. Sans prendre le temps de réfléchir plus d'une seconde, elle retira ses chaussures et fila dans l'eau toute habillée, pour repêcher son fils qui était inconscient. Hurlant et pleurant, elle le ramena sur le bord de la piscine pour lui faire un massage cardiaque et du bouche à bouche. Juste le temps pour son époux de se ressaisir et de les rejoindre, se laissant tomber à genoux devant eux en pleurant, commençant sérieusement à croire que par sa faute leur fils s'était noyé. Mais après de trop longues minutes de massage cardiaque et de bouche à bouche, Hugo revint à lui, pour le plus grand soulagement de ses parents. Pleurant et toussant de l'eau, il se réfugia dans les bras de sa mère qui, une nouvelle fois, prit la décision de se rendre aux urgences. Mais cette fois, c'était pour son fils. Et de son côté, Ben déclara qu'elle n'avait qu'à y aller seule avec lui, et que lui même resterait là pour se reposer, ajoutant qu'elle n'avait pas à s'inquiéter pour lui. Et c'est ce qu'elle fit, sans se faire prier, trop inquiète pour son fils pour penser à quoi que ce soit d'autre. A son retour au domicile familiale quelques heures plus tard, son fils allait pour le mieux et son époux semblait aller bien aussi. Autant dire que, pour eux, il n'y avait plus la moindre raison de s'inquiéter. Ils laissèrent donc les jours, les semaines puis les mois s'écouler sans trop se faire de souci, que ce soit pour l'époux ou le fils. Jusqu'au jour où Benjamin passa trois nouvelles journées, enfermé dans la chambre, dans le noir, à faire de fréquentes allés retour entre la chambre et les toilettes, pour vomir. Cela faisait exactement dix mois qu'ils avaient vécut cet accident au bord de la piscine. Lorsqu'enfin ils se décidèrent à se rendre à l'hôpital, ce fut pour s'entendre dire qu'il fallait faire des examens de toute urgence. Et rapidement, le verdict tomba. Ben était atteint d'une tumeur au cerveau, à un stade assez avancé. Autant dire qu'il était trop tard pour une opération et qu'il lui faudrait avoir recourt à la radiothérapie puis à la chimiothérapie. Ce fut le tout premier coup dur pour cette petite famille qui, jusque là, avait toujours connu le bonheur parfait et sans nuage. Et ce ne fut pas seulement un petit coup dur. Durant plusieurs années, le couple dû lutter contre la maladie qui semblait tuer à petit feu, Benjamain. Les traitements de chocs effectués à la chaîne, semblait le guérir pour mieux l'achever par la suite, lorsqu'il replongeait. L'atmosphère à la maison se faisait de plus en plus pesante, les visages étaient tirés, la joie avait quitté la petite famille et les sourires avaient disparus. Même Hugo, malgré son jeune âge, sentait qu'il se devait d'être calme, silencieux et obéissant. Jamais il ne parla fort, jamais il ne désobéit aux ordres de sa mère, jamais il n'entra dans la chambre conjugale pour voir son père. Bref, il était le fils parfait. Même s'il était un brin trop calme pour un enfant de son âge. Ses parents avaient bien conscience de la pression qu'ils posaient sur leur fils. Et c'est bien pour cette raison là d'ailleurs, que bien souvent, ils cherchaient à l'éloigner de la lourde atmosphère de la maison. Régulièrement, il passait des week-end chez ses grands parents, que ce soit maternels ou paternels. Et c'est un jour où il rentrait de chez sa tante, qu'il trouva sa mère totalement effondrée, devant la porte de la maison familiale, regardant un brancard recouvert d'un drap blanc s'éloigner en direction d'une ambulance. A peine Hugo était-il descendu de la voiture de sa tante, qu'il filait en courant en direction de sa mère. Il avait huit ans et savait parfaitement ce qui était en train d'arriver. Cela faisait cinq longues années qu'il voyait son père aller de plus en plus mal. Il n'avait même que ces souvenirs de lui. Un homme malade et mourant qu'il pouvait rarement voir sous son vrai visage d'époux et père parfait, à la joie de vivre. « Maman ... Papa il est parti pour le paradis ? » Demanda-t-il doucement en enroulant ses bras autour de la taille de sa mère et posant sa tête contre son ventre. « Oui mon ange ... Il est parti ... » Répondit-elle après un instant de silence, essuyant rapidement ses larmes avant d'enrouler ses bras autour de ses épaules en le serrant fortement contre elle.
« Et si on disait ... Que j'ai juste pas de chance ? »
Ce début d'histoire n'est pas tiré d'un roman quelconque ou de quoi que ce soit d'autre de ce genre. Même si, honnêtement, j'aurais largement préféré cela. Mais au lieu de ça, cette histoire est la mienne, tout simplement. C'est bien moi qui suis né de deux parents complètement fous amoureux l'un de l'autre. C'est bien moi qui ais faillis me noyer dans la piscine de notre maison familiale alors que mon père s'apprêtait à se rendre aux urgences pour ses problèmes de santé. C'est de ma faute, selon moi, qu'il est mort ... Mort un jour où je n'étais même pas là pour couronner le tout. Enfin bon, il y a pire me direz vous. Oui ... Il y a toujours pire que soit. C'est ce qu'il faut se dire et c'est bien ce que je me dis depuis toujours. C'est ainsi que m'a élevé ma mère depuis mon enfance, mais plus encore depuis le décès de son cher et tendre. C'est un mois à peine, après le décès de mon père, que ma mère a prit la décision de déménager. Non seulement avec un salaire en moins nous ne pouvions plus vivre dans la maison familiale. Mais en plus, il y avait là bien trop de souvenirs à son goût. Au début elle cumula plusieurs emplois pour pouvoir subvenir à nos besoins. Elle n'avait alors que son dimanche de libre. Je passais mes mercredis et mes samedis chez ma tante, qui venait me chercher le matin pour me ramener le soir, lorsque ma mère ne pouvait pas faire elle même les allés et retour. J'étais encore jeune mais j'étais déjà débrouillard. A plusieurs reprises, il est arrivé que le matin, ma tante ne puisse pas venir me chercher et que ma mère ne puisse pas attendre que je commence l'école. Ces jours là, elle me réveillait juste avant de partir, me souhaitait une bonne journée et me laissait me préparer seul et déjeuner pour ensuite me rendre à l'école à pieds. C'était la même chose le soir lorsque personne ne pouvait venir me chercher. Je vécut donc à la fois très entouré et à la fois, très seul. Paradoxal certes ... C'était ma vie, tout simplement. J'étais habitué. Je pense ... Qu'une vie qui commence mal et qui est semée d'embûches, ne peut que mal se continuer et se terminer. Pour moi, c'est comme une mauvaise journée. Le genre où on ne fait que des conneries jusqu'au moment où on en vient à la conclusion que l'on aurait mieux fait de ne pas se lever. Eh bien la conclusion de ma vie ... C'est que je n'aurais pas du naître. Comme l'enfant que ma mère a perdu, deux semaines après la mort de mon père. Ah je n'ai pas mentionné ce bébé ? Sans doute parce que c'est encore une chose que je préférerais ne pas avoir connu dans ma vie. Le fait d'avoir faillis avoir un petit frère ... J'ignorerais toujours pourquoi mes parents avaient prit la décision, un an auparavant, de tenter d'avoir un autre enfant. Ils avaient pourtant parfaitement conscience du fait que mon père allait mourir tôt ou tard et que ce n'était plus qu'une question de temps. Mais de toute évidence, ils pensaient plus au fait que mon père laisserait une autre part de lui en partant ... Quoi qu'il en soit ... Ma mère était enceinte de sept mois et demi lorsqu'elle perdit l'enfant qu'elle portait. C'était un soir de semaine, alors qu'elle était en train de préparer le repas pour nous deux. Nous vivions toujours dans la maison familiale et elle avait prit le temps de changer de chambre le jour même, pour ne plus avoir à supporter l'atmosphère pesante de celle qu'elle partageait avec l'homme de sa vie lorsqu'il était encore en vie. Désormais, c'était dans ma chambre qu'elle dormait, avec moi. Bref, pour en revenir au repas, elle se trouvait devant la gazinière, en train de remuer une sauce lorsqu'elle lâcha ce qu'elle tenait en main, gémissant de douleur en portant une main sur son ventre et en se cambrant en avant. A cet instant là, j'étais en train de faire mes devoirs sur la table de la cuisine. A son hurlement, j'avais levé un regard inquiet vers elle, me levant rapidement pour m'approcher d'elle en voyant ses traits figés par la douleur et sa peau blêmir violemment.« Maman ? Maman ça va pas ? » « Hugo ? Chéri, tu te souviens du numéro des d'urgences ? » Demanda-t-elle alors d'une voix faible, rapidement suivit d'un nouveau hurlement de douleur. Sans répondre, je quittai la pièce en courant pour me rendre dans le salon où se trouvait le téléphone sans fil. Je composai rapidement le 911 pour expliquer la situation. Lorsque je revins dans la cuisine un bref instant plus tard, ma mère était assise sur une chaise devant la table, une flaque de sang s'étant formée sur le sol. Sans réfléchir, j'avais couru droit vers elle, glissant et manquant tomber, pour la regarder presser fortement ses mains sous son ventre arrondi. « Maman tu saignes ! » « Ce n'est rien Hugo ... Tu verras, ce n'est rien ... » Bien entendu ... Ce n'était là qu'un mensonge destiné à éviter que je m'inquiète de trop pour elle et le petit frère que je devrais avoir dans les semaines à venir. En réalité, son fils semblait vouloir sortir plus tôt que prévu. Car le temps d'arriver à l'hôpital, elle accoucha d'un enfant mort né ...
« Allô maman, bobo ... »
« Hugo, chéri, tu peux aller faire les courses s’il te plait ? » « Oui maman j’y vais tout de suite ! » Le temps de sauter de ma chaise et de refermer mes cahiers et classeurs de cours, je me hâtais de m’approcher de ma mère pour récupérer la liste de courses qu’elle me tendait avant de sourire à son rapide baiser sur mon front. Une fois ma paire de basket enfilée, je quittai la petite maison qu’elle parvenait à louer tant bien que mal à l’aide de son unique salaire de comptable. Nous ne roulions certes pas sur l’or mais nous n’étions pas non plus les plus à plaindre. Nous avions une petite maison avec deux chambres et une salle de bain, une cuisine à l’américaine qui donnait sur un petit salon et le tout était parfaitement meublé à l’aide des brocantes et bonnes affaires qu’avait su dénicher ma mère. En clair, nous n’avions vraiment pas de quoi nous plaindre. Certes je n’étais pas habillé de marques mais ma mère faisait toujours en sorte de me payer de quoi faire mes sorties scolaires comme tous les autres, histoire que je ne sois pas totalement mis à l’écart. Bien sûr ce qu’elle ignorait totalement, c’était le fait que j’étais un grand solitaire qui était même trop timide pour s’approcher des autres enfants sans une proposition ou autre de ce genre. « Regardez un peu qui va là … Amiel qui s’en va encore faire les courses pour sa môman ! Hey tête d’ampoule t’as pas peur que ça grille la haut ? » Sans même relever la tête pour savoir qui parlait ainsi de moi, je baissai plus encore le regard sur mes chaussures, continuant d’avancer, totalement imperturbable. Il fallait que je prenne sur moi pour penser à autre chose car je savais parfaitement que cette bande de garçons de mon collège, allait encore chercher à m’atteindre en parlant de ma mère. Sujet très sensible pour moi et ils ne le savaient que trop bien. Bref, penser à quelque chose … Premier président des Etats-Unis ? Trop facile ! Une autre question, une autre … Vingt sixième président Theodore Roosevelt. Harry Truman fut le trente troisième, Richard Nixon le trente septième et notre président actuel n’était autre que Ronald Reagan du partie républicain. Il était à la tête du gouvernement depuis sept ans à présent. Il venait de lancer la révolution conservatrice et une politique de relance comme jamais le pays n’en n’avait vu. Depuis un bon moment il était la personnalité publique préférée des américains. « Hey Amiel, où tu cours comme ça ? Hey on te parle ! Hey tu savais avec qui j’ai vu ta mamaaaan la dernière fois ? Avec le père de Stephan ! Ils avaient l’air en très bons termes tu sais ! » La suite de Fibonacci quelle était-elle déjà ? Zéro, un, un, deux, trois, cinq, huit, treize, vingt et un … « Tu sais que ta mère la p**e a fini aussi dans le lit de … » Avant même qu’il n’ait eut le temps de terminer sa phrase, j’avais foncé droit sur lui, lui sautant littéralement dessus pour le faire tomber sur le sol et marteler son visage de mes petits poings. De toute évidence choqué que je sois sorti de ma torpeur depuis deux ans qu’il me harcelait de la sorte, il se laissa faire avant de finir totalement sonné. J’avais treize ans et depuis mes onze ans je supportais cette bande qui n’avait de cesse d’en rajouter une couche à chaque fois que nous nous croisions. Mais cette fois c’était beaucoup trop ! Qu’ils m’insultent moi, passait encore. Mais lorsqu’ils s’en prenaient à ma mère, il m'était bien difficile de cacher la rage que je ressentais. Ce jour, c’était la goutte de trop, je ne pouvais plus supporter tout cela et je le lui fis bien comprendre. Oui j’étais le genre timide, discret, qui se laisse marcher sur les pieds et qui passe des nuits blanches perdu dans ses bouquins à étudier plutôt que de faire la fête sans arrêt. Oui mon père était mort et je vivais seul avec ma mère qui ne roulait pas sur l’or. Mais ce n’état pas une raison pour l’insulter. Je ne supportais plus que l’on s’en prenne à elle de la sorte. Tout et n’importe quoi mais surtout pas ma mère ! Malheureusement, comme j’aurais du m’en douter, ses amis ne me laissèrent pas faire bien longtemps. Le temps de réaliser que j’étais en train de frapper leur ami, et ils me tombèrent à trois dessus pour me plaquer au sol et me rouer de coups. Lorsque celui que j’avais moi-même frappé se releva, ses amis m’attrapèrent, me relevèrent et m’immobilisèrent pour que le jeune puisse se venger, me frappant alors comme jamais. Avant de disparaître une fois que je fus bien incapable de me relever du sol, ils empochèrent les quelques billets que m’avais confié ma mère pour aller faire les courses et filèrent avant d’être prit. Le visage en sang et le corps contusionné, je mis un moment à me relever, allant m’asseoir sur le bord du trottoir le temps de me remettre des coups et d’essuyer mon visage couvert de sang. Lorsque je rentrai chez moi, je ne pris pas la peine d’aller trouver ma mère qui travaillait dans le salon, préférant aller m’enfermer dans ma chambre. En me regardant passer, elle comprit sans trop de mal que quelque chose était arrivé et se hâta de filer à ma suite, ne pouvant malheureusement entrer dans ma chambre puisque je l’avais verrouillé. « Chéri qu’est-ce qu’il y a ? Hugo ? Hugo parle moi ! Quelqu’un t’a fais du mal ? Il faut que tu me dises chéri ! Stp Hugo … Ouvre moi … Chéri ? » Après de longues minutes à tambouriner à ma porte et à chercher à me faire sortir, elle fini par abandonner la partie comme je pu le comprendre au silence soudain qui retomba sur la petite maison. A quoi bon lui expliquer ? Elle ignorait totalement que depuis deux ans je devais supporter les moqueries des autres collégiens par rapport au fait que mère était seule, désespérément seule et sans argent. Tout le monde sait qu’à cet âge là, les moqueries et méchancetés vont bon train …
« Des filles ? J'en connais plein ! A la tv et dans les livres ... »
Par la suite, jamais je n’ai raconté ce qu’il s’était vraiment passé ce jour là, ni même tous ceux d’avant d’ailleurs, à ma mère. Je préférais rester totalement silencieux sur ce point, la laissant alors divaguer et imaginer tout un tas de scénarios tout plus invraisemblables les uns que les autres. Elle avait eut le temps de penser à toutes les situations possibles. Raquette, agression sexuelle, tentative d’enlèvement … Bref elle était bien loin de s’imaginer une seule seconde que tout cela n’était arrivé qu’en raison du fait qu’elle était mère célibataire et qu’elle peinait pour soutenir notre train de vie pourtant si simple et sans prétention. Jamais ô grand jamais je n’aurais voulu faire de la peine à ma mère en lui avouant tout cela. Je trouvais qu’elle se saignait déjà bien assez comme cela, sans en ajouter une couche en lui apprenant que ce n’était pas suffisant. A mes yeux, tout ce qu’elle faisait était bien assez. Je ne voulais pas de vêtements de marque, d’un beau père tout ce qu’il y a de plus idiot et prétentieux, tout ça pour faire taire les personnes de mon âge. Tout ce que je désirais, je l’avais déjà, si ce n’est un père qui me manquait plus que tout au monde. Mais pour le reste je n’avais pas de quoi me plaindre. J’avais une mère terriblement à l’écoute et présente pour moi, bien que souvent hors de la maison pour raisons professionnelles. Mais lorsque nous pouvions nous retrouver le soir tous les deux au sein de notre nouveau domicile familial, tout semblait aller pour le mieux. Durant le repas, elle me racontait ses journées de travail et moi … Je lui parlais des cours. Non pas de mes amis –qui étaient alors inexistants--, des récréations et encore moins des filles, mais bel et bien des cours. A savoir que je lui faisais un compte rendu détaillé de ce qu’avaient bien pu nous raconter les professeurs, tout ce que j’avais appris et tout ce qui était faux selon moi. Mais tout cela n’étonnait plus du tout ma mère puisqu’à mes dix ans, nous avions appris que j’avais un QI nettement supérieur à la moyenne. Cela n’avait pas vraiment surprit ma mère, puisque j’avais toujours été quelque peu plus intelligent et ouvert à tout ce qui m’entourait. Le fait de perdre mon père jeune m’avait, en plus de cela, presque coupé du monde, tant j’avais décidé de me replier sur moi-même. Je préférais m’enfermer des heures, voir des jours durant, dans ma chambre à étudier et lire plutôt qu’autre chose. Lorsque nous avions apprit mon QI, les spécialistes nous avait proposé divers instituts pour étudier cela de plus près. Mais ma mère avait définitivement refusé que je ne devienne une bête de foire comme elle avait aimé à le dire encore et encore. Les spécialistes lui avait alors dit de faire en sorte que je ne m’abrutisse pas -encore selon leurs dires- en me contentant d’étudier ce que j’avais à étudier à l’école. Alors plutôt que de me faire sauter plusieurs classes, par peur que je ne m’intègre pas –quelle bonne blague--, elle avait préféré me laisser suivre un cursus scolaire tout en m’achetant alors toute une série de bouquins d’études supérieures à la mienne, que j’avais suivis et dévoré avec grand intérêt. J’étais aussi doué dans les matières scientifiques que dans les matières littéraires et même en langues, sans parler des arts divers et de l’histoire ainsi que de la géographie, ce qui avait le don de surprendre absolument tout le monde. Ma mère ne comprenait pas comment je faisais pour me jeter ainsi dans les études sans jamais chercher à voir du monde ou à vivre comme un gamin de mon âge tout simplement. Elle ne pouvait comprendre que me noyer dans toutes ces matières intellectuelles, était ma façon à moi de m’évader. Ainsi, je ne pensais plus au fait que mon père me manquait toujours autant, ni au fait que nous vivions dans une semi pauvreté et que cela semblait être la pire des horreurs dans mon collège. Bref, je préférais étudier et développer mon intelligence comme le conseillaient si bien les spécialistes. Et ma mère s’y était fait sans trop de mal de toute évidence. « Et les filles alors ? » Haussant les sourcils et sortant de ma torpeur, je relevais la tête pour regarder ma mère sans trop saisir le sens de sa question. Les files ? Quoi les filles ? Je n’étais pas en train de parler de fille mais de mon cours d’espagnol ! « Quoi ? » « Les filles Hugo … Tu dois bien avoir une petite amie non ? » Une petite amie ? Comme si j’avais du temps pour cela ! Je préférais de loin étudier. Et puis ce n’était pas comme si j’étais le genre de type à attirer les filles. Certes j’avais un physique plus que correct du haut de mes seize ans. Un brun aux yeux bleus ce n’était pas vraiment monnaie courante. Mais ça ne m’empêchais pas d’être toujours bien trop reclus dans mon coin pour attirer ou intéresser qui que ce soit. Je n’étais qu’un simple adolescent et à vrai dire je commençais à peine à regarder les filles comme autre chose que de simples êtres vivants qu’il serait intéressant d'étudier de façon scientifique. Je commençais tout juste à réaliser que certaines étaient assez jolies, que d’autres étaient carrément pas mal et ainsi de suite. Mais ça ne m’empêchais pas de préférer rester dans mon coin en silence, à lire et étudier sans jamais me lasser. Pourtant, les quelques mots de ma mère à ce sujet, eurent le don de me faire retomber sur terre. Qu’est-ce qui clochait chez moi ?
Dernière édition par T. Hugo Amiel le Sam 23 Fév - 16:38, édité 6 fois
Invité
Invité
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 21:29
L'HISTOIRE
« Définition du mot vacances ? Se détendre ... »
« Morgan fais tes valises, on part pour deux semaines de vacances ! » Surpris, je fronçai les sourcils et tournai un regard circulaire tout autour de moi avant de regarder à nouveau ma mère. Quelque chose clochait et pas qu’un peu. Vacances ? C’était quoi ce mot totalement inédit ? Comme si nous avions les moyens de nous payer des vacances ! Si tel avait été le cas, je l’aurais su tout de même ! « Hum … Vacances … Ok maman dis moi où sont les caméras ! Ou tu préfères que je les cherche et les trouve moi-même ? » A son regard quelque peu perdu et stupéfait –à croire qu’elle venait de se retrouver face à un extraterrestre sorti d’on ne sait quelle planète inconnue—je n’eus aucun mal à deviner qu’elle n’avait absolument pas comprit ma plaisanterie. Certes cela ne volait pas bien haut. Il fallait dire que si j’étais démesurément cultivé et intelligent, je n’étais pas non plus le roi de la sociabilité et de la plaisanterie. Bien loin de là même ! Les seuls petites plaisanteries que j’osais étaient toujours destinées à ma mère … Qui avait un sens de l’humour à peu près aussi développé que le mien. Mais comme j’aimais à le penser, on ne peut pas tout avoir ! J’étais, selon moi, physiquement assez potable et intellectuellement j’étais nettement supérieur à la moyenne. Et à côté de cela, je m’étais même découvert un certain penchant pour l’art, mais plus précisément pour l’art et la musique. Autant dire que j’avais déjà pas mal de choses pour moi, sans pour autant ajouter un brin de folie plaisant et un humour décapant. Je n’avais pas non plus vraiment de quoi tenir une conversation un tant soit peu intéressante –pour l’autre personne— avec quelqu’un. A part des conversations hautement intellectuelles, je ne savais pas faire. J’étais bien incapable de parler du dernier film en vogue s’il n’était pas une œuvre du septième art hautement sollicité par la critique. Et à côté de cela, je n’étais pas un adepte des séries télévisées. Sans parler du fait que question musique, je m’étais arrêté aux années seventies. Bref … J’avais une sacré culture général mais du tout celle d’un garçon de mon âge. « Maman … C’était une plaisanterie ! Tu sais … Comme dans l’émission de caméras cachées que tu regardais la dernière fois … Bref, depuis quand on est assez riches pour partir en vacances ? » Finis-je par préciser en voyant qu’elle ne comprenait toujours pas, et lui demander pour comprendre enfin et lever le voile sur un tel mystère. « Chéri la prochaine fois que tu fais une plaisanterie, évite de rester aussi sérieux ! Et pour répondre à ta question, j’ai gagné un voyage grâce à la radio, pour … Tu ne devinerais jamais ! Pour la Guyane ! Chéri on part deux semaines en Guyane ! Dis-moi que tu es content ! Allez dis le moi ! » Presque gêné de ne pas parvenir à y croire et donc à sauter littéralement de joie, devant sa propre explosion de bonheur, je finis par sourire quelque peu en coin. « Ouais … Youhou extra … Maman t’es sûre ? C’est pas notre genre d’avoir une chance pareille … » Levant les yeux au ciel, elle s’approcha de moi pour poser ses mains à plat sur mes joues et plonger son regard dans le mien. « Hugo arrête un peu d’être rabat joie ! Souris et fais tes valises ! Ce sera ta récompense pour ton bac avec mention très bien ! » Mon bac … Bac dont ma mère m’avais déjà récompensé en m’offrant une guitare ! Cela faisait deux semaines que j’étais officiellement bachelier et quelques jours de moins, que je savais que j’avais eus droit aux bourses d’études qui allaient me permettre d’étudier dans la fac de mon choix. En même temps avec un vingt de moyenne au bac, c’était on ne peut plus logique qu’elles me soient accordées. En plus de cela, toutes les facs auxquelles j’avais postulé m’avaient accepté. Autant les générales que celles d’art ou autre. Bref, tout semblait aller merveilleusement bien même si ma mère et moi savions parfaitement que malgré mes bourses d’études, j’allais devoir travailler pour les payer. Restait à espérer que j’y parviendrais sans trop de mal en sachant que je risquais bien d’avoir des études très prenantes, au vu de tout ce que j’envisageais de voir et d’étudier. Un peu d’art appliqués et d’histoire de l’art, beaucoup de marketing, les sciences économiques un peu de psychologie, de statistiques, un tas impressionnant de maths, quelques langues étrangères et même du droit. Bref … Je voulais tout apprendre, tout savoir, tout connaître et ce, même si je savais que ça ne serait jamais possible. Mais dans l’immédiat, plutôt que de choisir parmi toutes les facs et toutes les possibilités qui m’étaient proposées, j’allais prendre des vacances bien méritées ! Deux semaines en Guyane avec la seule personne qui comptait pour moi, à savoir ma mère. Mes premières véritables vacances, loin de chez nous, loin de Nice, ville dans laquelle nous vivions depuis la mort de mon père. Que demander de plus ? Rien du tout dans l’immédiat … Nous n’avions plus qu’à profiter pleinement de ces deux semaines de rêve à venir. Et c’est bien ce que nous fîmes ! Entre bronzettes, siestes au soleil, baignades, cocktails, soirées sur la plage, barbecues et autres, nous ne nous arrêtions plus et ne voulions à vrai dire plus rentrer. C’était la première fois de ma vie que je lâchais mes bouquins et tout ce qui s’ensuit et étrangement, ça me faisait un bien fou. J’étais tellement détendu et oublieux de tout ce qui n’était pas ces vacances, que j’en vins même à m’ouvrir aux autres. Ce fut donc ainsi que j’eus ma première relation amoureuse. Bien que le terme ‘relation amoureuse’ me semble être tout de même un bien grand mot pour décrire une relation qui ne dura qu’une semaine, ne fut ponctuée que de baisers et de doux câlins au clair de lune ainsi que de promesses de se revoir par la suite. Promesses qui ne furent jamais tenues, puisque je ne revins jamais en Guyane et qu’elle-même ne vint jamais en France. Bref, petite amourette de vacances. Chose assez tardive pour un jeune homme de dix huit ans, je vous l’accorde ! Tout ce dont je me rappelle au sujet de cette fille, c’est le fait qu’elle était matte de peau, un poil plus grande que moi et des cheveux bouclés, noirs.
« Bienvenue dans un univers impitoyable »
« Chéri tu es sûr de ne pas vouloir aller à l’université de Lyon, pour être plus près de moi ? » Levant les yeux au ciel, je continuais de ranger mes affaires dans les quelques cartons que j’avais décidé d’emporter pour l’université, histoire de bien m’installer dans ma chambre universitaire. « Maman ! Paris n’est pas si loin que ça non plus ! Tu verras je reviendrai … Régulièrement te voir. » « Mais ce n’est pas pareil que si tu étais sur Lyon ! Je … Bon très bien chéri. Quelle mère serais-je si je ne te laisse pas partir pour Paris, alors que tu as été accepté dans l’une des universités les plus prestigieuses du pays ? Même si celle de Lyon en fait aussi parti ! » Soupirant doucement, je posai un regard moqueur sur ma mère. Lorsque j’avais porté mon choix sur la fac parisienne, qui m’ouvrait ses portes avec grand plaisir, elle n’avait nullement bronché si ce n’est pour sauter de joie en me disant que j’avais un avenir tout ce qu’il y avait de plus prometteur. Mais ce n’était que depuis quelques jours que j’avais commencé à préparer mes affaires, qu’elle semblait vraiment réaliser que je partais pour de bon, que j’allais vivre ailleurs, la laisser seule à Nice, et commencer ma vie. Mais je ne m’étais pas laissé avoir et j’avais bel et bien décidé de partir pour Paris, n’emportant que quelques photos, souvenirs, vêtements et autres objets qui me seraient plus ou moins utiles pour ma nouvelle vie, n’oubliant évidemment pas mes sacro-saints livres ! Quelques jours plus tard, et très peu de temps avant le début des cours officiel, ma mère me conduisait jusque dans le nord de la France, la voiture remplie de mes sacs et cartons. Une fois arrivés dans ma chambre universitaire, je la laissais m’aider à ranger correctement mes affaires, me fichant bien de savoir si tous les parents faisaient ainsi avec leurs chers enfants ou non. Je me foutais royalement de ce que l’on pouvait penser de moi. Tant que ma mère n’était pas mise sous les feux de la rampe et visée comme jamais, ça me convenais bien et je restais calme et discret. Je ne voulais évidemment pas d’histoire, ce n’était nullement mon genre. Finissant de ranger mes affaires correctement, je me tournais vers ma mère qui continuait d’épousseter, de déplacer des objets même de quelques petits millimètres mais surtout, de regarder autour d’elle comme si elle cherchait à s’occuper. Difficile de ne pas voir qu’elle cherchait simplement à trouver une excuse pour ne pas partir. Levant les yeux au ciel, je posai une main sur la sienne lorsqu’elle entreprit de refaire un tas correcte de feuilles sur mon bureau. « Maman ! Je crois que c’est bon là non ? » Réalisant qu’elle n’avait plus rien à faire ici, elle lâcha un bref rire nerveux avant de s’emparer de son sac et quitter ma chambre pour rejoindre sa voiture. Sans broncher, je la suivis pour lui dire au revoir, sursautant lorsqu’elle me sauta dessus en enroulant ses bras autour de mon cou apparemment en train de lutter contre les larmes. « Hugo, je t’en supplie ne devient pas comme tous ces étudiants qui foutent en l’air leurs études parce qu’ils goûtent enfin à la liberté en faisant la fête et buvant plus que de raison. » « Maman je t’en pries tu me connais ! Tu sais très bien que je vais encore une fois me plonger dans mes études à corps perdu ! Et puis arrête de parler de la sorte on dirait qu’on ne va plus se revoir alors que je ne suis qu’à quelques petites heures de route de toi. » Après voir parlé de longues minutes pour la rassurer tant bien que mal, je la regardais s’engouffrer dans sa voiture en dissimulant ses larmes derrière une imposante paire de lunettes. Soupirant doucement et souffrant de la voir de la sorte, j’enfouis mes mains dans les poches de mon pantalon en regardant sa voiture disparaître petit à petit. « Ah les parents ! Si on ne les pousse pas un peu ils ne partent jamais ! » De surprise, j'arquai les sourcils sous ce ton des plus narquois, puis je tournai un bref regard vers le jeune homme blond dont les cheveux étaient plaqués sur le côté tel un premier de classe. Certes j’avais moi-même l’allure d’un jeune homme tout ce qu’il y a de plus intello, mais je gardais tout de même un look assez … Cool, dirons-nous. Sans répondre, je le regardais s’approcher de moi pour me tendre une main, la serrant avec lenteur sans broncher. « Sebastien ! Je viens d’un lycée très privé de Paris. Et toi ? » « Hugo … Je viens d’un lycée publique de Nice ! » Répondis-je en insistant bien sur le mot ‘publique’ comme lui-même l’avait fait sur celui ‘privé’. Je ne supportais pas tous ces gosses de riches qui s’imaginaient que j’étais nettement inférieur à eux simplement parce que je venais d’un milieu moins favorisé que le leur. « Oh … Je vois hm … Eh bien bonne journée à toi ! » Sur le coup, je ris doucement et nerveusement en le voyant se détourner de moi et s’éloigner en toute hâte. Je me tournai ensuite vers le bâtiment imposant dans lequel se trouvait ma chambre. Regardant autour de moi, j’avais la sensation d’avoir sauté à pieds joints dans l’univers des personnes riches qui, pour ne pas changer, risquaient bien de me snober. Mais c’était sans importance. Non … Pas la moindre importance ! Est-ce que j’étais venu là pour me faire des amis ? Pas le moins du monde ! Tout ce que je voulais c’était ressortir bardé de diplômes de cette université pour, comme le disait ma mère, parvenir à cet avenir prometteur qui me souriait. Ce fut sur ces pensées positives, que je pris la direction de ma chambre universitaire.
« La sortie de secours c'est par où ? »
« C’est avec plaisir que je vous rends aujourd’hui vos interro qui visaient à tester vos connaissances en matière de sciences économiques. Je suis navré de vous apprendre que pour une grande majorité d’entre vous, nous avons beaucoup de travail en perspective pour cette année ! Hormis un A+, un A- et quelques B, vous êtes largement plus nombreux à vous en sortir avec un C. J’ignorais que les étudiants de cette fac se contentaient d’apprendre ce que le lycée voulait bien leur faire étudier ! Monsieur Amiel, votre A+ m’oblige à vous demander de continuer de la sorte ! Votre correction de l’erreur dans le résumé m’a beaucoup plu en sachant que vous êtes la seule personne à me l’avoir fait remarquer sur une centaine d’étudiants. » Je rougis franchement en sentant une centaine de paires d’yeux se tourner vers moi. Je me raclai quelque peu la gorge en me contentant d’un bref hochement de tête à l’adresse du professeur qui me regardait fixement en souriant d'un air satisfait. Et voilà … Comment être classé au rang des pires intellos qui soit, dès la seconde semaine de cours. Je faisais tout pour passer pleinement inaperçu parmi la foule impressionnante d’étudiants de la fac mais en moins de quelques secondes, un professeur était parvenu à foutre tout ça en l’air. Qu’à cela ne tienne … C’était très certainement reparti pour des années à devoir supporter moqueries et jalousie. Génial … D’un côté l’on pouvait dire que j’étais habitué alors je n’étais plus à ça près. Lorsque la fin du cours arriva enfin, je me hâtai de récupérer mon sac dont je passai la bandoulière sur mon épaule, avant de quitter l’amphithéâtre. « Excuse moi ! Hey ? Amiel c’est bien toi ? » Surpris que l’on m’adresse la parole mais à la fois inquiet de savoir si ce n’était pas pour se foutre de moi une nouvelle fois, je me tournais pour me retrouver face à une fille. Une fille tout à fait commune. Pas spécialement belle mais pas laide non plus. Deux queues de cheval de couleur châtain, ramenées sur ses épaules. Une paire de lunette aux montures rondes qui englobait une trop grande partie de son visage mais ne cachait pas pour autant des yeux marron des plus communs mais pétillant d’intelligence, un nez long et fin sur lequel se trouvait quelques petites tâches de rousseur, des lèvres fines et des vêtements pour le moins … Laids. Oui c’était le mot qui convenait le mieux ! Un petit pull sans manches orange pétant, une chemise blanche à manches longues dessous et une jupe verte. Le tout sans parler de sa paire de chaussures à brides qui me rappelait étrangement les chaussures des fillettes. « Oui c’est moi. » Me contentai-je de lui répondre, attendant simplement qu’elle me dise ce qu’elle me voulait. « Je suis Cindy ! Je suis dans le même cours que toi en économies et c’est moi qui ais eus le A-. » La regardant sans répondre, je restai un très long moment sans broncher, m’attendant simplement à ce qu’elle ajoute quelque chose. La voyant rougir je compris que j’étais vraiment nul en matière de sociabilité ! « Ok. » Oui bravo la conversation ! « Hum je … En fait j’aurais aimé savoir si tu serais d’accord pour qu’on se penche tous les deux sur le sujet parce que j’ai fais quelques erreurs et j’aimerais les comprendre. Enfin … Si tu as le temps et si tu es d’accord bien sûr. On pourrait aller à la bibliothèque ? Si … Tu n’as rien d’autre à faire bien entendu… Euh … Je ne connais toujours pas ton prénom. » Elle avait un A- et elle voulait encore se perfectionner ? Cette fille était cinglée ou je ne m’y connaissais pas ! A moins que … Se pourrait-il qu’elle cherche simplement une raison de m’accoster et me parler ? Non c’était impossible je ne devais pas me mettre de telles idées en tête. « On peut aller à la bibliothèque bien sûr. Pas plus d’une heure, j’ai à faire ensuite. Et je m’appelle Hugo ! » Elle sourit en voyant que j’étais d’accord et sembla des plus enjouée. Elle prit alors la direction de la bibliothèque sans attendre. Sans un mot, je la suivis en respectant une certaine distance physique entre elle et moi, enfouissant comme toujours, mes mains dans mes poches. « Super ! T’es trop génial ! Trop cool ! Ton A+ m’a totalement bluffé ! Oh et puis alors je ne te parle pas de la faute que tu as su trouver dans les énoncés. Je ne sais vraiment pas comment tu as fais ! Est-ce que tu viens d’une école spécialisée ? Quelque chose de nettement supérieur à la moyenne question intellect ? Tu sais moi je n’ai peut-être pas un QI au dessus de la moyenne mais tu peux me croire, je suis très intelligente ! Non pas que j’affirme être la plus douée. Oh ça non tout de même pas ! Mais contrairement à trop de personnes ayant des facilités dans à peu près toutes les matières, je travail dur pour en arriver là ! Tous les soirs après les cours et jusqu’à vingt deux heures, je travaille sans relâche ! Je lis de tout aussi tu sais ? Autant de romans d’amour que de policier et de livres qui portent à réfléchir.[…]Et puis bon je trouve que sa façon de jouer n’est vraiment pas naturelle. Comme dirait ma mère, on dirait qu’il a un balai où je pense ! Non mais tu le crois ça ? Et puis ce n’est pas comme s’il était beau à couper le souffle non plus. Oh ça non loin de là même ! » Au secours, sortez moi de là … Pourquoi la bibliothèque était-elle aussi loin ? Pourquoi j’avais commis la connerie d’accepter la demande de cette fille ? A l’aide !
« Finalement je préférais lorsque je ne m'étais pas encore confronté aux filles. »
« Excusez-moi de vous déranger… Hum je peux m’asseoir ? Hugo je voulais savoir si tu accepterais de m’aider en maths. J’ai quelques … Difficultés et je pense que j’arriverais mieux à comprendre si tu m’expliquais. Logan m’a dit que tu lui avais expliqué un truc la dernière fois et, selon ses propres dires, tu as assuré un max. Autant dire que pour lui qui ne comprend jamais rien, c’est un sacré progrès ! » Je posai le regard sur la jeune femme blonde qui s’était assise en face de moi. Cette étudiante qui partageait plusieurs mêmes matières que moi. J’ignorais comment elle connaissait mon nom. Sans doute par l’intermédiaire du dit Logan qui, en plein cours de statistiques, avait littéralement craqué en lâchant que –cette foutue matière de merde n’était pas faite pour lui--. En le voyant faire, je n’avais pu m’empêcher de lui porter secours en lui donnant deux trois explications. En constatant que je n’étais pas le genre intello supérieur et renfermé sur lui-même qui préfère mourir que d’aider autrui, il m’avait demandé plus d’explications. Ce que, au final, j’avais fais sans broncher le moins du monde. Plusieurs jours plus tard, en me croisant à la sortie d’un cours, il me donna un forte frappe sur l’épaule en riant tel … Un abruti. Oui un véritable abruti fini ! « Mec ! Grâce à toi j’ai eus B- ! C’est genre ma meilleure note de l’année ! Franchement je sais pas comment te remercier. Si j’avais été gay moi aussi, je t’aurais sauté dans les bras ! » Le fil de mes pensées se coupèrent instantanément. Non … Je devais avoir mal compris. Il ne pouvait pas franchement croire que … « Comment ça … Toi aussi ? » « Ben … Tout le monde sait que tu préfères les hommes. Mais t’inquiète pas ! Personne ne juge mec ! Allez bonne soirée à toi ! » Gay … Les gens me pensaient gay ! D’où sortait une telle rumeur ? Déjà qu’en temps normal je n’étais pas le genre de type à intéresser les filles mais alors … Là ! Rougissant quelque peu, je baissais le regard sur ma propre tenue. Rien qui ne fasse efféminé pourtant. Je revins à l’instant présent et laissai un sourire étirer mes lèvres. Sourires qui se trouvaient être rares mais qui faisaient encore un tant soit peu vrai. Du moins je le pensais sincèrement et l’espérais ! Chelsea, l’une des filles les plus belles, les plus désirables, les plus populaires et les plus courtisées de la fac, voulait que moi, jeune homme banal que tout le monde pensait gay, l’aide dans ses exercices de maths ! Allais-je refuser ? Plutôt mourir ! « Oh je … » « Non il ne peut pas ! » Lâcha sèchement Cindy qui se trouvait être assise juste à mes côtés sur le banc dans le parc de l’université. Surpris, je tournai le regard vers elle, ne comprenant pas pourquoi je ne pouvais pas. Croisant son regard condescendant, je haussai les sourcils, toujours sans comprendre. « Hugo ! Franchement tu n’as pas le temps non ? Entre ton nouveau boulot qui t’oblige à faire du porte à porte tous les week-ends et les révisions en pagaille pour les premières partiels de début d’année, je ne vois vraiment pas comment tu pourrais trouver le temps pour donner des cours à des personnes plus stupides que toi. Sincèrement et quand comptes-tu te reposer après tout ça hein ? N’oublie pas que nous devons aussi revoir la partie du programme dans laquelle j’ai encore quelques lacunes. Sans parler de ta mère qui comptes venir te voir dimanche ! Et … » « Ok ok j’ai compris ! Peut-être une autre fois Hugo ! » Totalement désemparé et incapable de savoir comment faire pour la retenir, je la regardais filer sans attendre. Mon regard descendit bien malgré moi sur ses fesses moulées dans un jean très serré. Je sursautai quelque peu en entendant le bruit d’un livre qui se referme sèchement. Surpris, je tournai le regard vers Cindy dont les yeux lançaient des éclairs à l’adresse de Chelsea qui disparaissait au loin pour rejoindre sa bande d’ami, tous plus populaires les uns que les autres. « Mais pourquoi tu as fais ça ? Depuis quand tu décides pour moi ? » Demandai-je alors d’une voix qui trahissait mon choc. Je n’arrivais toujours pas à revenir de ma stupeur. Depuis plus d’un mois que nous étions amis, je ne pouvais m’empêcher de la trouver franchement insupportable, agaçante comme pas deux, un brin vantarde sur ses capacités intellectuels. Bref … Vous vous demanderez sans doute pourquoi je la supportais encore malgré tout. La raison étant bien simple : Elle ne me lâchait pas ! Dans les cours que nous avions en commun elle s’installait à mes côtés. Lorsque nous n’avions pas cours ensemble, elle faisait en sorte de sortir plus tôt du sien pour m’attendre devant la salle que je quittais et même le soir et les week-ends elle me rendait toujours visite dans ma chambre universitaire avec des tonnes de cours à réviser. Bref … Elle était toujours collée à mes basques et je n’avais pas le cœur à lui dire que je ne la supportais vraiment pas. « Si tu ne comprends pas par toi-même, je ne vois vraiment pas ce que je peux faire pour toi. Pauvre type ! » Ouvrant grand les yeux, totalement sous le choc, je la regardai prendre ses livres et s’éloigner de moi à pas longs et rageurs. Toujours aussi cloué sur place, la seule chose que je parvins à penser, c’était que j’étais vraiment nul en relation humaine. Mais plus encore … Que son pantalon rose n’allait vraiment pas avec sa chemise orange.
« C'était pas écrit sur ton front que tu me voulais. »
« […] Alors que si tu pars de l’hypothèse que monsieur X se trouvait devant sa télévision à … » « Cindy, tu penses que j’ai l’air gay ? » La coupai-je d’une voix un brin trop forte tant j’étais agacé par sa voix que je trouvais de plus en plus insupportable, comme tout le reste de sa personne. C’était sans doute étrange de lui poser une telle question ainsi, alors que nous étions en train de réviser. Mais ce fut bien plus fort que moi. Cela faisait deux jours que le petit épisode avec Chelsea s’était déroulé et elle n’était pas revenue vers moi. Avec la folle qui me collait aux basques, pas étonnant. Ladite folle était revenue vers moi dès le cours suivant, de l’après-midi même. Comme quoi je n’étais peut-être finalement pas ‘un pauvre type’ comme elle me l’avait pourtant si bien dit. « Bien sûr que non ! Pourquoi dis-tu une chose pareille ? Je te fréquente assez pour savoir que tu ne l’es pas. » « Pourquoi tout le monde pense que je le suis alors ? » Levant les yeux au ciel, elle eut un léger rire –tout ce qu’il y a de plus agaçant pour ne pas changer--. « Hug' depuis quand tu te soucie de ce que pensent les gens hein ? » Hug’ … Le seul surnom qu’elle avait trouvé le moyen de me donner. Franchement il n’y avait pas deux personnes dérangées comme elle pour m’appeler de la sorte. Hug… Comme Hugs ! Cette fille avait un grain ! « Non sérieusement Hug’ tu t’en fous de ce que pensent les gens ! Si tu veux moi je peux te le prouver que tu n’es pas gay ! » Haussant les sourcils, je lui lançai un regard qui voulait clairement dire qu’il valait mieux qu’elle la ferme. « Tu n’as pas besoin de me prouver quoi que ce soit puisque je sais que je ne le suis pas ! » « Oh mais … La ferme abruti ! » Totalement choqué par le ton de sa voix et sa voix elle-même qui était tout bonnement méconnaissable, je relevais la tête vers elle, stupéfait. Sans attendre une quelconque réaction de ma part, elle se leva, balança ses lunettes sur le bureau avant de détacher ses cheveux qui retombèrent en cascade sur ses épaules. Elle avait l’air plus jolie ainsi. Non … Mais non, je ne pouvais pas penser de la sorte au sujet de … Mais qu’est-ce qu’elle était en train de faire ? Où était passée sa chemise ? Et son soutien gorge ? Que faisaient ses mains sur son pantalon des plus laids ? Au secours ! Yeux écarquillés, je me relevai bien vite en faisant tomber ma chaise, presque totalement paniqué. « Cindy, je ne sais pas ce que tu comptes faire … Enfin … Si je sais ce que tu comptes faire ! Mais … Je ne sais pas si tu penses réellement que moi j’en ai envie mais ce n’est pas le cas ok ? Je n’ai pas envie, je n’éprouve absolument pas de désir pour toi et je … » « Mais tu vas la fermer oui !? Est-ce que tu sais depuis combien de temps j’attends que tu me sautes ? » Sans même me laisser le temps de répondre, elle posa ses mains sur mon torse pour me faire lourdement tomber sur le lit qui se trouvait juste derrière moi. Ecarquillant plus encore les yeux, je découvris seulement à cet instant là, qu’elle était totalement nue … Et finalement pas si mal que ça. Se penchant vers moi, elle n’eut pas tôt fait d’empoigner fermement mon entre jambe en riant doucement d’un air moqueur. « Je n’éprouve pas de désir pour toi ! » Lâcha-t-elle franchement moqueuse en imitant ma voix de façon médiocre. Relevant la tête, je pu constater sans mal que mon corps me jouait des tours. Le temps de reposer ma tête sur les couvertures, je finis par ne plus réagir et la laisser faire, elle avait ouvert mon jean et baissé mes vêtements pour s’asseoir à califourchon sur moi en unissant nos corps, après avoir mit un préservatif qui sortait de je ne savais où ... Après un trop court moment à son goût mais bien trop long selon moi tant j’aurais préféré que ma première fois se passe avec n’importe qui d’autre qu’elle, je restais totalement immobile à regarder le plafond. « J’aurais jamais pu imaginer que ma première fois se passerait avec … » Une fille aussi dénuée de charme ? Une fille aussi chiante, insupportable et agaçante ? Une fille collante, stupide et tout ce qui s’ensuit ? Tout ça réunis ! Mais allais-je le lui avouer ? Bien sûr que non je n’étais pas aussi horrible … « …Une amie ! » Terminai-je alors que jamais ô grand jamais je ne l’avais considéré comme telle. Surpris par son nouveau rire, je tournai la tête vers elle pour la regarder en fronçant les sourcils. « Première fois ? Oh bon sang t’es encore pire que je ne l’imaginais ! » « Attend … C’était pas ta première fois toi ? » « Ce que tu peux être naïf comme garçon ! Bien sûr que non ! Alors l’été de mes seize ans il y a eux Josh, à la rentrée c’était Mark et Larry […] Mais le pire, le pire, c’était cet été ! Alors il y a eut Jonathan, Laurent, Miky, Ben et Andrew. Pas tous en même temps bien sûr ! Quoi que si peut-être une fois ou deux …[…] » Comme à chaque fois qu’elle se mettait à parler, je fixais mon regard sur elle pour avoir l’air de l’écouter, alors que mon esprit était déjà à mille lieux de là. Quand aurait lieu mon prochain cours de peinture déjà ? Et celui de psycho ? J’aimais tout cela. Oui, j’aimais terriblement les études, apprendre, étudier, me perfectionner et tout ce qui s’ensuit. Et les professeurs m’aimaient bien me semblait-il. Je ne décrochais jamais moins que des B+, j’étais toujours présent en cours et jamais le moins du monde en retard. Bref, tout allait pour le mieux pour moi. Sauf le fait que tout le monde me pensait gay et que la seule personne qui ressemblait, de loin, à une amie pour moi, venait littéralement de me sauter dessus. Oui à par ça, ça allait …
« Je crois avoir trouvé la porte qui mène au paradis ... »
« Hugo ! Hugo où vas-tu ? Mais attend moi ! Hugo qu’est-ce que tu fais ? Pourquoi tu pars aussi vite ? » Au secours … Je devais disparaître de là et vite ! J’étais sortie avec cinq minutes d’avance sur mon cours, à la plus grande stupeur de mon professeur, et pourtant cette barge était déjà là à m’atteindre et son visage s’était illuminé d’un sourire à ma vu. Sauf que je n’avais pas demandé mon reste, filant tant bien que mal en slalomant parmi la masse d’étudiants qui se pressaient pour aller d’un cours à l’autre ou qui, plus simplement, flânaient dans les couloirs. Ces abrutis ralentissaient ma progression mais tant pis je devais faire avec. Quittant le bâtiment principal, je m’éloignais en soupirant longuement de bien être. Je lançai un regard alentour et n’eus aucun mal à la reconnaître. Le tee-shirt rose fuchsia, c’était elle. Au secours elle venait droit vers moi ! Cette folle était réellement en train de me poursuivre. Mais qu’est-ce que j’avais bien pu faire pour mériter ça ? Certes depuis deux jours qu’elle m’était sauté dessus dans ma chambre, je l’évitais comme la peste et ne lui ouvrais plus la porte lorsqu’elle venait pour me voir. Mais c’était de sa faute, complètement ! C’était elle qui me poursuivait plus qu’il ne le faut alors que … Nom de Dieu je ne voulais pas d’elle ! Me retrouvant face à une porte, je mis un moment à réaliser que j’étais entré dans un bâtiment que je ne connaissais absolument pas. Sans hésiter une seconde, j’actionnai la poignée, ouvris à toute volée et refermai derrière moi en me collant dos à la porte. Je posai ma tête contre celle-ci et fermai les yeux en soupirant doucement avant de faire un bond en entendant de francs hurlements aigus. En ouvrant les yeux, je me figeai sur place en réalisant où j’étais et écarquillai les yeux. Oh bon sang … Oh … Merde ! « Mais calmez vous les filles ! Ce n’est que Hugo ! Vous savez bien ! L’intello gay. Il ne vous fera rien bande d’idiotes ! » Choqué, je tournai la tête vers Chelsea qui se trouvait là … En sous vêtements. Oh merde … Ne pas regarder ! Ne pas … Baissant un bref regard sur son corps, je me hâtai de plonger à nouveau mon regard dans le sien. « Je ne … » suis pas gay ! Allais-je vraiment dire cela alors que je me trouvais dans le vestiaire des pom pom girls et qu’une vingtaine de filles en sous vêtements ou enroulées dans des serviettes, me fixaient du regard ? Bordel, je n’étais pas suicidaire ! « … Vous ferais rien bien entendu ! » Terminai-je en riant nerveusement. Souriant de toutes ses dents, Chelsea s’approcha de moi pour m’attraper par le bras et m’attirer au centre du vestiaire. Quelque peu gêné et presque terrifié, je tournai un bref regard vers la porte, cherchant à m’enfuir le plus vite et le plus loin possible. « Chelsea je ne peux pas rester, j’ai des … Trucs à faire ! » « Comme toujours oui ! Mais aujourd’hui qu’on te tient, on va en profiter. On a besoin d’un avis ! Tout le monde sait que les hommes homosexuels ont très bon goût sur le look des filles. Mais au fait qu’est-ce que tu faisais là ? » « Je cherchais à échapper à une folle. » Lâchai-je d’un naturel déconcertant. Quelques filles rirent en pensant que je plaisantais, avant de réaliser que ce n’était nullement le cas. Chelsea s’arrêta et se tourna vers moi sans prévenir, je me reculai aussitôt pour ne pas la percuter et lui lançai un regard hésitant. « Une folle ? Est-ce que tu parles de la fille avec qui tu traînes toujours ? » « En fait … Je ne traîne pas avec elle … Elle me suit. C’est assez … Horrible. Vraiment ! » « Et je suppose que tu es trop gentil pour lui dire de dégager ? » Plissant le nez et rougissant franchement, je me contentai de hocher lentement la tête de façon affirmative, pour confirmer ses dires. J'entendis alors un flot de ‘ooooh’ émerveillés. Ce qui me fis écarquiller les yeux en regardant quelques filles. Qu’avaient-elles toutes à me regarder comme si j’étais la huitième merveille du monde ? « Hugo t’es vraiment trop choux ! Dommage que tu sois gay ! Pas vrai les filles ? » Voyant une grande majorité des filles acquiescer en me regardant d’un air presque déçu, j’eus la sensation d’avoir un essaim d’abeilles qui me brouillait le cerveau. Bon sang … J’ignorais pourquoi tout le monde pensait que j’étais gay … Mais il allait clairement falloir que je mette fin à ces foutues rumeurs si je voulais commencer à vivre enfin. Souriant faiblement sous les sourires, je comptais presque déjà le nombre de filles qui seraient intéressées, un tant soit peu, par moi. Wow … Stop ! Je divaguais complètement là ! « Hugo ? A ton avis … le noir ou le blanc ? J’essaie les deux ! » Regardant à nouveau Chelsea, je me figeai une nouvelle fois, en la voyant retirer son soutien gorge pour en essayer un autre, me laissant regarder avant d’en changer. Bon Dieu de … « Le noir ! Il … Tranche bien avec ta peau question couleurs. » Dis-je après un instant de silence, souriant nerveusement. Est-ce que j’étais mort et au paradis ? Où allais-je me réveiller dans la minute et réaliser que tout cela n’était qu’un rêve ? « T’es trop gentil Hugo ! Tu sais quoi ? En échange je vais t’aider à te débarrasser du laideron qui ne te lâche plus ! Tu verras … Chelsea ne rate jamais son coup ! »
« Les rumeurs sont souvent synonymes de mensonge. »
Chelsea ne rate jamais son coup … Elle n’avait pas vraiment dit faux … Mais ce n’était pas vraiment vrai non plus. Dans l’immédiat, j’étais un peu perdu. Seul avec elle dans sa chambre universitaire qu’elle partageait avec une amie qui était absente pour la soirée et la nuit, je songeais à mille et une façon de m’échapper discrètement de là tant je ne me sentais pas à ma place. Certes la raison pour laquelle j’étais venu était parfaitement normale et honorable. Comme quelques temps dans le passé, elle m’avait demandé de lui expliquer certains points des cours qu’elle n’avait pas compris. Et comme cette fois-ci Cindy n’avait pas été là pour me couper la parole, j’avais simplement accepté. Et le soir même je me retrouvais en sa présence, dans sa chambre, me forçant à lui expliquer tel ou tel exercice en tentant de ne pas penser au fait qu’elle était bien trop collée à moi et bien trop peu vêtue à mon goût. Etait-elle vraiment obligée de porter un débardeur aussi court et moulant avec un … Un … Comment appelait-on ça ? Un short ? Oh non bien trop court pour être un short, c’était certain ! J’avais presque envie de dire que c’était une culotte tant ça ne cachait rien de son corps ! « Bon sang il fait vraiment trop chaud dans cette chambre ! » La voyant poser ses mains sur son débardeur pour le retirer, je ne pu m’empêcher de reculer franchement ma chaise en lui lançant un regard presque paniqué. Impossible qu’elle me fasse le même coup que Cindy ou je partais en courant sans demander mon reste cette fois. Une nymphomane à supporter, c’était déjà bien assez ! « Ow ow ow une minute ! Qu’est-ce que tu fais là ? C’est pas le moment de se taper un petit strip-tease ! » Lâchai-je d’une voix bien trop sérieuse, cherchant pourtant à lancer un peu d’humour. Mais cela tomba sans doute à plat devant mon manque totale de sourire ou de preuve manifeste que j’étais en train de plaisanter. « Mais … je ne comprends pas … Tu es gêné ? Pourtant tu nous as toutes vu dans les vestiaire. » Certes … Que répondre à cela ? Je devais trouver une échappatoire et vite. Et pourquoi ne pas juste lui avouer que je n’étais pas gay ? J’avais certainement ruiné toutes mes chances avec chaque fille de cette fac et les pom pom girls allaient me haïr comme jamais on ne m’avait haïs. Mais au moins j’aurais la conscience plus tranquille et puis, ce n’était pas comme si je supportais le fait d’être pris pour ce que je n’étais pas. « Hum … Comment dire … Je … Bon … Je ne suis pas gay ok ? Je ne sais pas d’où sortent ces rumeurs mais … » Coupé par le rire franc qui s’échappa de ses lèvres, j’haussai les sourcils en la regardant sans comprendre. « Je le savais ! Bon sang je le savais ! Un type homosexuel n’aurait jamais regardé les filles comme tu l’as fais l’autre jour dans les vestiaires ! Bon sang Hugo, pourquoi avoir continué de mentir sur un truc pareil ? T’as peur des filles ou quoi ? Tu sais elles ne sont pas toutes aussi chiantes et laides que l’autre emmerdeuse de première catégorie ? » « Ce n’est pas moi qui ai sorti cette rumeur ok ? Je ne sais même pas d’où ça vient ! Et franchement tu imaginais que j’allais pouvoir l’avouer alors que j’étais entourée d’une vingtaine de filles qui m’auraient sans doute tué avant de me foutre dehors ? Je ne suis pas suicidaire merci bien. Bref, on retourne aux cours ? » Demandais-je en lui lançant un regard peu amène et ignorant sa mine réfléchie. « Cindy ! » Lâcha-t-elle brusquement et fortement comme quelqu’un qui aurait lâché un Eureka bien senti après avoir trouvé quelque chose. « Je suis sûre que c’est elle ! Depuis le début j’étais intimement convaincue qu’elle en pinçait pour toi et j’en suis de plus en plus sûre même ! Il suffit de la voir te coller à longueur de journée. Au début je croyais qu’elle se faisait de l’espoir pour rien puisque je pensais que tu étais gay. Mais maintenant tout s’explique ! Je suis certaine que, laide comme elle est, elle n’a pas trouvé d’autre moyen que d’éliminer la concurrence pour t’avoir à elle seule ! » « La concurrence ? Mais quelle concurrence ? » Demandai-je alors sans comprendre. Je doutais que, tout de même, des filles puissent se battre pour moi. J’étais certes l’un des éléments les plus doués de la fac mais ça s’arrêtait là. Je n’étais pas le plus beau ni le plus sportif. J’étais juste un mec solitaire, renfermé sur lui-même, qui ne prenait du plaisir qu’à lire et étudier. En somme, j’étais un mec sacrément ennuyeux ! « Oh mon choux … Il faut vraiment que tu ouvres les yeux tu sais ? Ton nom a été sur toutes les lèvres féminines pendant un temps. Le beau brun ténébreux et atrocement intelligent ! Au fait rassure moi … Cindy … Elle est pas parvenue à ses fins hein ? » Rougissant franchement au souvenir de cette nuit là, je me détournai d’elle en me raclant quelque peu la gorge. « Oh non Hugo ! Ne me dis pas que … Oh bon sang c’est trop fort ! » La voyant rire sans la moindre gêne, je lui lançai un bref regard noir, agacé par son comportement. « Elle s’est jetée sur moi ok ? Cette fille est … C’est … Une nympho ! Elle m’a fait une liste détaillée de ses conquêtes et crois moi c’est vraiment très effrayant ! » « Oh lala j’imagine la scène. Elle qui se jette sur toi et … » Sans lui laisser le temps de terminer sa phrase, je plaquai franchement mes lèvres sur les siennes pour la faire taire. Je la sentis se figer avant de me répondre, à ma plus grande surprise. La minute d’après, nous roulions sur son lit, nos corps étroitement enlacés l’un contre l’autre.
« C'est possible de s'ennuyer à ce point ? »
« Oh mais … Ca ne serait pas … Chelsea et … Hugo !? » « Si c’est bien eux. Ca te surprend hein ? A ce qu’il parait les rumeurs disant qu'Hugo était gay, étaient absolument fausses. Il paraîtrait même que ce soit … Ah comment elle s’appelle déjà ? Tu sais la fille bizarre qui le suivait tout le temps ? Cindy ! Oui c’est ça, Cindy ! A ce qu’il parait c’est elle qui aurait lancé les rumeurs pour se l’accaparer. Cette pauvre folle ! Crois-moi, toutes les filles la déteste à présent. Beaucoup sont passées à côté de lui en espérant qu’il ne soit pas réellement gay mais au final … Toujours le même genre de fille qui arrive à avoir les meilleurs. Franchement ces pom pom girl ! » Sortir avec une fille de l’équipe de pom pom girls de la fac, ça avait le don de beaucoup faire parler autour de nous. J’avais même l’impression que tout le monde nous regardait et que tout le monde se demandait comment un couple tel que le notre avait bien pu voir le jour. Mais le plus important pour moi dans tout ça, c’était qu’il était à présent impossible de ne pas savoir, que je n’étais absolument pas gay. Certes la première fois qu’on nous avait vu main dans la main à marcher dans les bâtiments principaux de la fac, certains avaient encore eu des doutes. Doutes qui s’étaient tout de même bien estompés après deux semaines passées à voyager ainsi main dans la main et à s’embrasser en publique. Cindy n’avait étrangement pas fait sa réapparition et en toute honnêteté , je vivais très bien cette rupture de notre soit disant amitié. Coucher avec Chelsea était nettement plus gratifiant et plaisant. Mais pour le reste, je devais bien reconnaître que ce n’était pas si merveilleux que l’on pourrait l’imaginer. Oui elle était belle et populaire … Mais Dieu qu’elle pouvait se montrer cruche et tout bonnement idiote. Même lorsque je lui expliquais certains cours, je voyais qu’elle ne saisissait pas et préférait largement se vernir les ongles, se recoiffer ou encore minauder à propos de tel film que je ne connaissais nullement, telle musique qui avait le don de me foutre la nausée, et tel acteur qui était beau comme un Dieu –mais n’avait évidemment pas mon charme selon ses propres dires--. A chaque fois que je m’évertuais à lui expliquer des points de nos cours en commun, je finissais toujours par m’arrêter pour la regarder faire alors qu’elle s’amusait à remonter sa poitrine pour en tester le volume, qu’elle se recoiffait de ses doigts et tant d’autres choses de ce genre. Et à chaque fois je perdais patience, préférant alors l’occuper d’une toute autre manière, bien plus plaisante que de lui expliquer des choses qu’elle ne cherchait plus à écouter et comprendre. A savoir, que je l’entraînais dans le lit sans hésiter. « Et ensuite, Marie m’a raconté que […] » « Alors que si tu pars de l’hypothèse que … » M’évertuai-je à parler en même temps qu’elle et plus fort qu’elle pour m’entendre. Après de trop longues minutes passées à me battre de la sorte, je finis par soupirer longuement en balançant mon stylo sur le bureau et laissant tomber ma tête sur celui-ci. Ce qui fit un bref bruit de choc. « J’en peux plus … » Finis-je par lâcher d’une voix basse et des plus désespérée. « Hugo, ça ne va ? Tu travailles trop mon chou ! Tu devrais penser à t'arrêter un peu, histoire de te poser et prendre le temps de décompresser. » Je sentis sa main s’engouffrer dans mes cheveux, ce qui me fis soupirer longuement. Et je perdis patience pour de bon. Non mais franchement était-elle obligée de toujours se montrer si … Je ne sais quoi avec moi ? A toujours s’occuper de moi, me dire que je salais trop mes plats, qu’une paire de tennis blanches irait mieux que les noirs au vu de mes vêtements, que mes cheveux seraient mieux si je faisais un léger dégradé et les lissais, que je serais encore plus divin si je faisais un peu de sport pour muscler mon corps qui était déjà bien parfait à ses yeux. Tout ça … Tout ça je m’en foutais, je ne voulais pas le savoir. Mais … Qu’elle me laisse tranquille à la fin ! Trois mois de relation et je n’en pouvais déjà plus d’elle. Je finis par me relever brusquement, ce qui fis retomber sa main. J’entrepris de récupérer mes affaires. « J’y vais ok ? Je rentre. Et inutile de venir me voir. C’est fini ok ? » « Qu’est-ce qui est fini mon chou ? Les révisions ? » Mais ce qu’elle pouvait être stupide ! « Non ! Nous ! Notre relation ! C’est fini, terminé, mort, terminado, ciao ! J’en ai par-dessus la tête de te voir te remaquiller quand je me tue à t’expliquer quelque chose. J’en ai marre que tu me compares à telle ou telle célébrité tellement à la vogue, que je ne connais pourtant pas. Ras le bol des potins au sujet de gens dont j’ignorais l’existence jusqu’à présent. Sans parler du fait que tu te regardes constamment dans le miroir comme si tu étais la huitième merveille du monde. Redescend un peu sur terre Chelsea. Tu n’es Pas la fille la plus belle qui soit et sortir avec toi n’a rien d’un honneur ! Et quel dommage … Non vraiment, quel dommage que ton tour de poitrine pourtant si peu développée, soit pourtant plus grand que ton QI ! Maintenant pardonne moi mais je vais aller me noyer dans mes livres et tenter d’oublier que je suis sorti avec l’une des filles les plus stupides qui soient ! » Sans attendre de réponse de sa part et me fichant bien de sa pâleur des plus inquiétante pourtant, je quittai la pièce, les bras chargés de mes livres. Pour la première fois depuis bien longtemps, j’eus un léger sourire et lâchai un soupir de bien être. Dieu que ça faisait un bien fou !
« Parce que la vie continue. »
Tic … Tac … Tic … Tac … Tic … « La moitié du temps est écoulé. Ceux qui ont terminé peuvent y aller. Bonnes vacances à ceux qui partent ! » Je me levai sans attendre et passai la bandoulière de mon sac sur mon épaule. Je récupérai ensuite ma copie recouverte de ma longue et fine écriture et descendis rapidement les marches pour m’approcher du bureau du professeur qui eut un franc sourire en voyant que j’étais encore et toujours le premier à rendre et que ma feuille semblait bien remplie. Lui souriant faiblement, je m’empressai ensuite de quitter la salle sous quelques regards de personnes sans doute agacées de toujours me voir partir si vite, contrairement à eux. Cela faisait deux ans que j’étudiais à Paris. Deux ans que je ne décrochais jamais moins que des B+. Deux ans que je faisais autant la fierté de ma mère que de mes professeurs. Deux ans que tout le monde me traitait de surdoué. Pour la seconde année consécutive je passais des examens de fin d’année. J’avais déjà décroché une maîtrise en arts, ce qui m’avais fais cesser cette matière pour la seconde année. Pour tout le reste, je continuais d’étudier d’arrache pied pour foncer me préparer à ne devoir sortir que bien des années plus tard, archi diplômé. Une fois la difficulté de la séparation passée, ma mère n’avait eut de cesse de me pousser à continuer encore et encore à faire cela, m’affirmant qu’avec une intelligence comme la mienne, j’avais plutôt intérêt à ne rien lâcher. Au niveau sociabilité je n’avais pas franchement évolué. Certes je m’étais tout de même fais quelques amis mais pas grande chose d’énorme. Les personnes aussi douées que moi avaient le don d’être ennuyeuses à souhait –ce que j’étais moi-même aussi, sans doute—quant aux autres elles ne comprenaient pas mon intelligence et préféraient rester à l’écart. Les quelques rares personnes qui s’étaient aventurées à m’approcher, avaient pourtant bien compris que j’étais loin d’être le genre intello qui ne supporte pas de parler aux personnes qui ne décrochent pas d’aussi bonnes notes que lui. De plus, j’avais tenté tant bien que mal de m’ouvrir culturellement pour découvrir les choses de mon temps. Entre deux révisions, j’allais au cinéma, je regardais la télévision, les séries débiles mais dont tout le monde parlait, j’écoutais la radio, je lisais des livres qui m’avaient l’air culcul mais qui soulevaient les foules. Bref, je commençais à avoir tout de même une certaine conversation. A quelques rares occasions, j’avais même participé à des soirées organisées par les étudiants de la fac. Si alcool, sexe et drogue étaient au rendez-vous, j’étais encore bien trop sérieux pour toucher à tout ça. Quant à mes relations amoureuses … Depuis Chelsea, c’était le néant. Je refusais catégoriquement d’aller chez des filles pour leur expliquer quoi que ce soit tant je craignais qu’elles ne me fassent le même coup que Cindy ou qu’elles se mettent en petite tenue comme Chelsea. Du coup, pour aider quelques personnes qui me le demandaient encore, j’allais plutôt à la bibliothèque ou sur une table dans les parcs de l’université. Bref, je maintenais une certaine distance avec les filles et je ne comptais pas en changer le moins du monde. Tout était bien ainsi. Célibataire, intelligent, calme, discret et gentil avec un boulot et un avenir des plus prometteurs. Que demander de plus ? J’étais très bien ainsi ! Bouclant mes sacs, je quittais ma chambre universitaire pour filer rapidement dehors, rejoindre ma voiture que j’étais parvenu à m’offrir grâce à mon salaire grandissant de vendeur porte à porte. Le temps de mettre mes sacs dans le coffre et de monter côté conducteur et je démarrais pour rejoindre Nice. J’étais parvenu à prendre un mois de vacances du côté de mon travail, j’allais donc pouvoir aller voir ma mère et passer du temps avec elle. Je ne l’avais pas prévenu de mon arrivée pour lui faire la surprise, sachant que mon dernier week-end passé chez elle remontait à deux mois plus tôt. Certes nous nous étions souvent parlé au téléphone, presque toutes les semaines, mais ce n’était pas pareil du tout. Avec ma mère, nous avions toujours été très proches l’un de l’autre et je doutais que cela puisse un jour changer. Toutes les fois où je l’avais eu au téléphone, elle m’avait demandé quand je passerais la voir et m’avait affirmé que je pouvais venir quand je voulais, à l’heure que je voulais. Après près de trois heures de route, j’arrivais enfin chez ma mère qui se trouvait très certainement encore au bureau. Entrant à l’aide des clés que j’avais toujours, je m’installais dans ma chambre toujours intacte de jeune adolescent, faisant un brin de rangement pour pouvoir la rendre plus personnel, accrochant alors quelques tableaux que j’avais pu peindre ces derniers temps. Une fois tout cela fait, je rangeais et lavais la petite maison pour soulager un peu ma mère. Lorsqu’elle arriva deux heures plus tard, ce fut pour me sauter au cou et m’engueuler de ne pas l’avoir prévenu. Sans quoi elle aurait tout rangé elle-même. « J’aime bien te surprendre et te voir aussi heureuse ! » Lui répondis-je alors, en la serrant plus fortement contre moi. Le soir même, durant le repas que nous partageâmes, je décidais d’aborder un sujet que je n’avais jusqu’alors jamais abordé. A savoir, la vie sentimentale de ma mère. « Maman ? Pourquoi tu ne t’es jamais remariée ? Je veux dire … Tu étais quand même jeune à la mort de papa. Et tu l’es toujours d’ailleurs. Mais tu n’as jamais eu envie de refaire ta vie ? » De toute évidence surprise que j’aborde un tel sujet de moi-même, elle garda un long moment le silence, semblant peser ses mots avant de me répondre, sans doute par peur de commettre une erreur. C’était la première fois de ma vie que je parlais de mon père, la première fois que j’exprimais sa mort. Autant dire que l’enjeu était de taille. « Pour deux raisons … La première c’est que j’aimais démesurément ton père. J’aurais sans doute pu aimer quelqu’un d’autre mais jamais comme je l’ai aimé lui. C’était bien trop fort, passionnel et fusionnel pour cela. Je ne l’ai jamais oublié tu sais … Il ne se passe pas un jour sans que je ne pense à lui … Et la seconde raison c’est simplement que j’ai préféré me vouer corps et âme pour toi. Non seulement je n’aurais jamais fais confiance à quelqu’un d’autre pour s’occuper de toi et t’élever à mes côtés. Mais en plus … je n’étais pas certaine que toi-même tu serais prêt et accepterais que je refasse ma vie avec un homme qui n’aurait pas été ton père. Alors j'ai décidé de mettre mon rôle de femme au placard et de ne rester qu’une mère pour toi. » Surpris par ses paroles, je laissais le silence s’installer durant plusieurs secondes avant de sourire faiblement et poser ma main sur la sienne, sur la table, sans la quitter du regard. « Je ne te remercierais jamais assez pour tout ce que tu as fais pour moi. Mais je veux que tu saches que … Si tu venais à refaire ta vie maintenant, je ne t’en voudrais vraiment pas. Tu es encore jeune. A peine quarante quatre ans. Autant dire que tu as encore le temps devant toi et seule ça ne doit pas être marrant. Surtout depuis que je suis parti. » Sentant que si je continuais de parler sur ce sujet là, elle finirait par s’intéresser à son tour à ma vie sentimentale, je détournai bien vite le sujet en mentionnant alors les examens que je venais de passer et, selon moi, de réussir.
Dernière édition par T. Hugo Amiel le Sam 23 Fév - 23:43, édité 6 fois
Invité
Invité
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 21:29
L'HISTOIRE
« Einstein ? Je connais oui. »
« Excuse moi … Excuse moi ! Hey … S’il te plait ? Putain mais t’es sourd ou quoi ? » Difficilement, je sortis de ma torpeur et finis par relever la tête du tas de documents que je feuilletais sur le capot de ma voiture. Enfin, je tournai le regard vers la fille qui m’interpellait. Assez grande, blonde, des yeux noisettes, légèrement ronde sans pour autant être dans l’excès, une tenue bien trop provocante et un maquillage excessif, sans doute le même âge que moi à un an près. Regardant alentour, je n’eus aucun mal à voir que c’était bien moi qu’elle fixait du regard et donc, à qui elle parlait. « C'est à moi que tu parles ? » « Non à l’abruti qui se planque derrière ta voiture ! » Malgré son ton narquois, je crus qu’elle ne plaisantait pas. Tel un abruti, je me tournai donc vers ma voiture … Pour voir que personne ne se trouvait derrière. En entendant son rire, je lui lançai un regard peu amène et songeai que c’était une sacré façon d’aborder quelqu’un. « Oh bon sang t’es trop drôle toi ! » Vexé et agacé qu’elle se foute de moi, je refermai mes dossiers pour entrer dans ma voiture. Sans attendre, j'attachai ma ceinture et posai mon tas de dossiers sur le siège passager. « Hey ! Attend s’il te plait. » Serrant les dents en la voyant s’approcher et poser ses mains sur le carreau à moitié ouvert, je tournai un regard irrité vers elle. « Tu pourrais me rendre un service ? » J'arquai un sourcil de surprise et la regardais comme si elle venait tout droit d’une autre planète. Dans quel monde vivait-elle elle ? Depuis quand demandait-on des services à des personnes totalement inconnues ? « Pardon ? On ne se connaît pas il me semble ... » Sans attendre, elle glissa sa main par l’ouverture de la fenêtre et m’adressa un franc sourire. Pour toute réaction, je me reculai en lui lançant un regard presque effrayé. « Julie Martin, enchantée ! Et toi ? Je peux te demander un service maintenant qu’on est plus intimes ? » Choqué, j’écarquillai les yeux et finis par lui serrer la main presque machinalement. Pourquoi je tombais toujours sur des filles complètement barges ? « Hugo Amiel… Et je n'ai pas le temps, je bosse. Bonne journée ! » Sans attendre de réponse de sa part, je mis le contact et tournai un regard peu amène vers elle pour qu’elle se recule et enlève ses bras de mon carreau. « Allez … S’il te plait ! J’aurais juste besoin que tu m’emmènes quelque part. » « C’est marqué taxi sur ma voiture ? » « Oh s’il te plait s’il te plait ! T’as jamais pris d’auto stoppeur ? Allez … J’ai pas de quoi payer un taxi mais si tu veux je te donnerai quelques dollars pour l’essence. » « Bon … Monte … » Soupirai-je doucement, avant de me pencher pour retirer les dossiers présents sur le siège passager, que je posai sur le tableau de bord avant d'enfin me reculer pour la laisser monter. « Franchement merci ! J’ai tout de suite su que t’étais un mec formidable et je ne me suis pas trompée ! » Sans répondre quoi que ce soit, je lui demandai où je devais l’emmener, et appris ainsi qu’elle se rendait dans un quartier d’immeubles d’habitation. Sans un mot, je conduisis prudemment sur la route, ne tournant pas un seul regard vers ma passagère et ne la regardant que lorsqu’elle s’empara de mes dossiers pour les feuilleter rapidement. Serrant les dents, je me penchai pour les lui reprendre des mains, profitant d’un feu rouge pour les poser sur la banquette arrière sans mot dire. « Putain c’était quoi tous ces chiffres ? Rien qu’à les survoler j’en ais eus mal à la tête. Des plans pour envahir l’Amérique ? » Ne réalisant pas qu’il s’agissait là d’une plaisanterie, je posai un regard surpris sur elle. Elle était givrée … « Je plaisantais ! » Soupira-t-elle en levant les yeux au ciel. « Non plus sérieusement … T’es quoi ? Un génie ? Le descendant d’Einstein ? » « Bien sûr, je suis son petit fils ! » Lâchai-je le plus sérieusement du monde, voulant plaisanter mais manquant mon coup pour ne pas changer. Voyant qu’elle me regardait totalement choquée, je détournai le regard d’elle.[color=tomato] « J’aurais plutôt dis son fils ! »[/colorl] Lâcha-t-elle après un long moment de silence en comprenant enfin que je venais de plaisanter. « En sachant qu’il est mort en cinquante cinq, je ne vois pas trop comment je pourrais l’être. » Un nouveau silence s’abattit dans l’habitacle de la voiture. C’était clair … J’étais ennuyeux à souhait. « Oh tu sais moi pour ce que j’en sais des choses sur lui … La seule chose que je sais, c’est son QI. Cent soixante dix c’est ça ? » « Cent soixante en fait. » Répondis-je simplement, sur un ton parfaitement égale. « Il y a beaucoup d’autres trucs que tu sais ? Je veux dire … T’es vraiment un génie toi non ? Genre … Si je te demande tout ce qu’a découvert Einstein questions sciences et tout ça, tu saurais me répondre ? » Fronçant quelque peu les sourcils sans répondre à sa question quant à savoir si j’étais ou non un génie, j’entrepris de lui citer toutes les découvertes d’Einstein, sans avoir à réfléchir une seule fois. Après de longues minutes, lorsque je la déposais devant chez elle, elle se pencha pour déposer un baiser sur ma joue avant de s’éclipser en laissant plusieurs billets derrière elle. Songeant qu’ils étaient bien inutiles, je voulus la rappeler mais le temps de lever la tête, elle avait déjà disparue.
« S'occuper d'un bébé c'est pas si simple ... »
« Allô Morgan ? C’est Julie. Je sais pas si tu te souviens de moi … Mais j’ai … Vraiment besoin d’aide. S’il te plait est-ce que tu peux venir ? S’il te plait … » Je fus surpris de recevoir un tel appel alors que je n’avais rencontré Julie qu’une seule fois trois semaines plus tôt et que je ne lui avais pas même donné mon numéro. Raison pour laquelle je restais un moment silencieux, m’apprêtant à refuser de l’aider, lorsque je l’entendis pleurer à l’autre bout du fil. Serais-je un monstre si je la laissais ainsi ? Oui … Mais je ne la connaissais pas moi. Elle devait bien avoir des amis ou de la famille tout de même ! « Je suis désolé Julie mais je ne vais pas pouvoir venir, j’ai des tas de trucs à faire, je reprends la fac demain, je préfère donc réviser … Tu dois bien avoir quelqu’un d’autre pour t’aider non ? Et comment tu as eus mon numéro ? » « Dans la voiture l’autre jour, j’ai pris une de tes cartes de visite. Oh … S’il te plait … J’ai besoin de quelqu’un et je n’ai personne ici. Ma famille est dans le Sud de la France et je n’ai pas d’ami de confiance … S’il te plait. J’ai vraiment besoin d’aide. J’ai fais une grosse connerie … » Je soupirai longuement, puis reposai mon stylo sur mon livre ouvert en me laissant aller dans le fond de mon siège. Lentement, je portai une main à mes yeux pour les frotter doucement de mes doigts. Je n’étais pas non plus le dernier des pigeons. Je n’allais pas me déplacer en fin d’après-midi pour cette fille que je ne connaissais même pas, tout ça parce qu’elle avait besoin d’aide et ne voyait personne d’autre que moi. M’apprêtant à refuser, j’entendis alors des pleurs de bébé, ce qui me cloua sur place avant de me ressaisir. Sans doute était-elle dans un endroit où se trouvait un bébé tout simplement. « Hugo s’il te plait … J’ai … Avalé une boite de cachets et je le regrette. Et j’ai fais ça alors que j’ai ma fille de deux ans à la maison. S’il te plait … Je n’ai pas de voiture, personne pour m’aider … J’ai besoin d’aller … A l’hôpital … Je ne suis vraiment pas bien. » Choqué par autant d’irresponsabilité et une connerie aussi grosse, je me figeai en me retenant pour ne pas l’engueuler ouvertement, songeant que je n’étais pas vraiment en droit de faire cela.[color=teal] « Mais … C’est … Appelle les urgences le temps que j’arrive, je m’occuperai de ta fille ! » Ordonnai-je d’une voix claquante, avant de raccrocher le téléphone sans lui laisser le temps de répondre, totalement sidéré par un tel comportement. Et c’était sans compter sur le fait qu’elle avait déjà une enfant de deux ans à son âge ! Irrité plus qu’autre chose, je quittai rapidement la fac pour filer à bord de ma voiture, en direction de chez elle. Lorsque j’arrivais, tout ce fit très rapidement. Une ambulance était déjà en train de la porter à bord du véhicule et l’un des ambulanciers me confia l’enfant sans se faire prier, comme si j’en étais le père, m’annonçant que si tout allait bien la petite pourrait retrouver sa mère dans la soirée. Yeux écarquillés et l’enfant dans les bras, je regardais l’ambulance disparaître sans broncher. Pourquoi attirais-je toujours les histoires bizarres ? Baissant enfin le regard sur l’enfant que je tenais bien maladroitement, je ne pu m’empêcher de penser qu’elle avait bien la pire mère qui soit. Cette petite blonde aux yeux noisettes qui me regardait, semblait avoir mal commencé dans la vie. Je soupirai doucement et regardai le trousseau de clés que l’on m’avait donné à mon arrivée. Le numéro de l’appartement figurait dessus. Sans attendre, j’entrai dans l’immeuble, trouvai rapidement l’appartement et y pénétrai après une brève hésitation. Peu de meubles mais un bazar monstrueux. Des fringues qui traînaient de ci et de là, des paires de chaussures abandonnées, des jouets de bébé et tout un tas d’autres choses plus ou moins utiles. « Eh ben … On peut dire que ta mère a de drôles de méthodes de rangement. » Lâchai-je doucement en continuant de regarder autour de moi avant de trouver le cosy pour mettre la petite. Je finis par m'installer sur le canapé, avant de perdre patience et le quitter rapidement. J'étais agacé de ne pas avoir pensé à amener de quoi bosser et réviser. Un soupir franchit la barrière de mes lèvres, alors que j'entreprenais alors de ranger et laver son appartement. Je ne supportais pas de rester sans rien faire. Tout allait pour le mieux alors que j'étais occupé… Jusqu’à ce que la petite se mette à pleurer. Sans tarder, je la pris dans mes bras et entrepris de la bercer pour la calmer. Je faisais les cent pas dans l’appartement en ce faisant et finis par paniquer pour de bon lorsqu’elle devint rouge écarlate sous la puissance de ses pleurs. Après une brève hésitation, je me rendis dans la cuisine, à la recherche de quoi que ce soit susceptible de ressembler de près ou de loin à de la nourriture pour bébé. J'y trouvai une boite de lait en poudre et il me fallut une minute de plus le temps de lire les instructions et les comprendre. Tout en maintenant le bébé dans un bras et en la berçant toujours doucement, j’entrepris de lui faire son biberon d’une seule main. Après de longues minutes de dure labeur, j’eus la bonne idée de m’assurer que le lait n’était pas trop chaud avant de porter le biberon à ses lèvres. La voyant se calmer instantanément et téter avec force, je soupirai longuement de soulagement, allant alors m’asseoir sur le canapé en soufflant sur mon propre visage pour faire voleter mes cheveux collés sur mon front, par la sueur. Une fois la petite -dont j’ignorais totalement le prénom- calmée, je la posais dans son lit où elle s’endormit sans attendre. Enfin, je finis de ranger l’appartement avant de récupérer la petite et filer à l’hôpital pour retrouver sa mère. La trouvant sans trop de mal, je fus ravi d’apprendre qu’elle allait assez bien pour s’occuper de sa fille, tant qu’elle restait à l’hôpital. Une fois le bébé rendu à sa mère, je n’attendis pas la fin de ses remerciements pour filer sans demander mon reste.
« Finalement les enfants, j'ai ça dans le sang (c'était pour la rime ...) »
« Un mec intelligent, beau à couper le souffle, généreux, de confiance, qui sait s’occuper d’un bébé et qui sait ranger et faire le ménage... Pourquoi aucune fille ne t’a encore mit le grappin sur toi ? » Ce sms reçu deux jours après l’épisode de Julie, de sa part d’ailleurs, était toujours dans mon portable et restait sans réponse. Je ne voulais rien avoir à faire avec elle moi … Non seulement elle me semblait être le genre de fille à attirer les ennuis comme la peste … Mais en plus elle était mère. Certes je n’avais absolument rien contre les enfants, je les adorais même … Mais je ne voulais pas m’attacher à sa fille pour ne plus la revoir par la suite ou je ne sais trop quoi. Et puis de toute façon qu’avais-je à voir avec ce genre de fille ? Elle était bien loin de mon monde. Je l’avais aperçu dans un petit bar restaurant, jouant la serveuse avec jupe courte et chemise moulante et décolletée. Autant dire qu’elle était loin d’être faite pour moi d’une quelconque façon que ce soit. Non pas que je sous estimais les serveuses ou quoi que ce soit de ce genre. Mais le fait qu’elle ait mon âge, ait arrêté ses études et soit déjà mère célibataire, ne me disais rien qui vaille en vérité. Je préférais donc rester loin d’elle. « Tu fais quelque chose ce soir ? J’aimerais bien que tu viennes boire un verre à la maison … Juste un moment … J’aimerais te remercier … » Pourquoi ne me lâchait-elle pas ? Je n’étais donc pas assez clair en n’ayant pas répondu dès son premier message ? Au secours … Pourquoi avais-je le chic pour tomber sur les filles les plus collantes et chiantes qui soient ? « Juste un petit instant … Je m’ennuie, je suis seule … Et je tiens vraiment à te remercier, tu ne m’en as pas laissé le temps dimanche … » « C’est bon j’arrive ! » « Toi t’es un mec parfait ! » Ce qui m’avait pris ? Pas la moindre idée … De toute évidence j’étais bel et bien incapable de dire non. Sans doute que je n’étais vraiment pas plus doué qu’avant dans les relations humaines et ça se ressentait de plus en plus. J’étais vraiment complètement idiot dans le fond. Et je n’avais pas une once de caractère surtout … Une fois chez elle, j’eus presque l’envie de repartir sur le champ. Mais le fait qu’elle se soit vêtue de façon normale –à savoir un jean et un débardeur qui couvrait convenablement son ventre et même sa poitrine--, me rassura quelque peu. Au moins elle ne comptait pas me sauter dessus. Ou alors elle cachait très bien son jeu. Et puis le fait que sa fille soit dans la pièce, me rassurait pas mal aussi. Entrant lentement chez elle lorsqu’elle m’invita à le faire, je lançai un regard circulaire, pour constater que le bordel avait de toute évidence reprit ses droits. Regardant où je marchais pour ne pas glisser sur un quelconque objet malin qui s’amuserait à se glisser sous l’un de mes pieds alors que je m'aventurais là dedans, je rejoignis le canapé comme me le proposa Julie. Une fois assit, je pressais mes mains à plat l’une contre l’autre, les plaçant entre mes genoux en regardant autour de moi et l’attendant sans mot dire. En entendant le gazouillement de sa fille, je finis par la regarder et voir qu’elle même me contemplait en souriant de toutes ses dents. Enfin… De son unique dent pour être plus exact. « Au fait … Comment s’appelle ta … Fille ? » « Olivia ! Comme l’actrice qui joue Sandy dans Grease. Ce film a bercé mon adolescence ! J’aurais aimé l’appeler Sandy mais c’est le prénom de ma grande sœur. » Je finis par me lever en voyant la fillette tendre une main vers moi, et m'approchai d’elle pour me pencher et passer mes doigts sur son visage. Je la caressai doucement en souriant quelque peu lorsqu’elle chercha ma main de la sienne pour refermer ses doigts sur mon index. « Tu peux la porter si tu veux. Elle t’aime bien elle aussi on dirait. » Elle aussi ? Je préférais ne pas relever. Presque gêné par la situation, je récupérai mon doigt et commençai à me reculer. Pour mieux me figer lorsque la petite se mit à pleurer à en hurler véritablement. Comme la fois précédente, son visage devint rapidement rouge et les larmes brillèrent dans ses yeux noisettes. « Je crois qu’elle a faim … » Lâchai-je stupidement, d’une voix timide, en me tournant vers Julie. Je la vis alors s’approcher pour la sortir de sa chaise haute. Elle la souleva dans ses bras sans attendre et ris doucement lorsque la petite tourna la tête vers moi. « Impossible elle a mangé il y a une demie heure ! Moi je crois surtout qu’elle a envie que tu t’occupes d’elle ! » Lâcha-t-elle en souriant quelque peu et me tendant sa fille sans me demander mon avis. « Mais je ne sais pas m’occuper des gosses moi ! C’est limite si c’est pas la première que je vois de ma vie ! » En la voyant rire, je fronçai quelque peu les sourcils, me demandant ce que j’avais bien pu dire de si drôle pour qu’elle rit de la sorte. J’avais bien plus la sensation qu’elle se foutait ouvertement de moi, qu’autre chose. « Ne dis pas de sottise ! J’ai presque envie de dire que tu t’en sors mieux que moi ! Tu as réussi à t’en occuper sans l’aide de personne et maintenant elle te demande ! Crois moi tu l’as séduite ! Tu lui as déballé la biographie d’Einstein pour qu’elle t’apprécie autant ? » J’étais peut-être un génie nul en relations humaines, mais ses avances étaient plus que claires. Si je n’étais pas trop idiot, je comprenais par là qu’elle-même m’appréciais depuis que je lui avais parlé d’Einstein, lors de notre première rencontre. Etrange … Cette fille était vraiment bizarre. Sans relever, je tendis les bras pour prendre sa fille, la regardant longuement et fronçai les sourcils lorsqu’elle se calma et chercha à me toucher le visage de ses petites mains.
« C'était pas prévu que ma vie de famille commence à seulement vingt ans ! »
« Hugo, tu peux t’occuper d’Olivia s’il te plait ? Je ne me sens pas très bien je pense que je vais aller dormir un petit moment. » A la voix de Julie, je relevai la tête de mes bouquins dans lesquels j’étais plongé depuis une bonne heure et lançai un bref regard vers la jeune femme. Je me contentai de faire un signe affirmatif de la tête, la laissant ensuite déposer un simple baiser sur mes lèvres avant de filer dans sa chambre. Je tournai un bref regard vers Olivia qui jouait tranquillement dans son parc, puis repris mes révisions sans trop m’inquiéter pour elle, tant qu’elle restait aussi calme. Depuis trois mois que je sortais avec Julie, je venais passer la majeure partie de mes week-ends chez elle, pour rester avec elle et sa fille de laquelle je m’étais déjà beaucoup attaché. En voyant l’heure tourner alors que j’étais toujours plongé dans mes révisions et qu’Olivia s’était endormie dans son parc, je sursautai quand j'entendis Julie arriver en trombe dans la pièce, en pleurs et en panique. « Où elle est ? Où elle est ? Hugo aide moi ! Ils ont prit Olivia ! Ils l’ont prise ! » Totalement choqué par le comportement fou de la blonde, je lançai un bref regard au parc où Olivia venait de se réveiller en hurlant et pleurant. Les cris de sa mère semblait la terrifier. Aussitôt, je me levai pour m’approcher de Julie qui s’était recroquevillée sur le sol, et m’accroupis devant elle pour me mettre à sa hauteur. En douceur, je pris ses mains pour les repousser de devant son visage, cherchant à comprendre ce qui lui arrivait. « Hugo il faut que tu m’aides … Je t’en prie .. Aide moi … » Lâcha-t-elle alors d’une voix étranglée par les pleurs et les sanglots. Commençant à me sentir mal à la voir de la sorte, je la pris lentement dans mes bras et posai mon menton sur sa tête. « Julie c’était juste un mauvais rêve … Juste un mauvais rêve … » « Non … Non Hugo, ils veulent me la prendre. Il y a … Il y a quelques semaines j’ai été contactée par les services sociaux à cause de ma tentative de suicide … Ils vont … Faire une enquête sur moi pour savoir si je suis vraiment apte à m’occuper d’un enfant. Je veux pas la perdre … Je veux pas la perdre … » Surpris qu’elle me confie cela seulement maintenant, je fronçai les sourcils en la serrant fortement contre moi et levai le regard vers Olivia qui semblait s’être calmée dans son parc. « Pourquoi tu ne me le dis que maintenant Julie ? Ne t’inquiète pas … Ne t’inquiète pas tout ira bien, ils ne te la prendront pas. Ils ne peuvent pas. Après tout tu vas mieux depuis ta tentative de suicide non ? Ca va aller Julie … »
« Trois mois plus tard. »
« Je vous déclare mari et femme, par les liens sacrés du mariage. Vous pouvez embrasser la mariée. » Lentement, je me tournai vers Julie, repoussai doucement son voile blanc en le plaçant par-dessus ses cheveux, pour ensuite déposer en douceur mes lèvres sur les siennes. Je l'embrassai avec la plus grande douceur, avant de lui adresser un franc sourire et de m’emparer de sa main pour filer vers l’extérieur, recevant au passage des masses de pétales blanches et de grains de riz. Mouais la fertilité accrue ils pouvaient se la mettre où je pense. Je n’avais que vingt ans ! Vingt petites années au compteur et déjà officiellement marié. Avais-je fais la plus belle connerie de ma vie ? A cet instant là je n’y pensais pas trop. Dans l’immédiat je n’étais pas si mécontent que cela de me marier. Je devenais une personne sérieuse, respectable, responsable et tout ce qui s’ensuit. Non vraiment, pas de quoi être mécontent. Les raisons de ce mariage précipité étaient bien simples. En effet, deux mois plus tôt, les services sociaux avaient contactés Julie et décidés qu’elle était trop jeune, trop faible d’esprit et ne gagnait pas assez bien sa vie pour s’occuper de sa fille d’à peine deux ans. L’idée d’un mariage pour remettre sur pieds sa situation dans sa globalité, avait germé dans l’esprit de l’un, comme de l’autre. Jusqu’à ce qu’elle aborde elle-même le sujet, un soir alors que nous étions tous les deux devant la télévision, en mentionnant le fait qu’être officiellement célibataire n’arrangeait pas sa situation. Ce fut donc le plus naturellement du monde que je lui proposai de l’épouser pour tenter d’arranger tout ça. Un immense sourire avait alors fait son apparition sur son visage, avant ne me souffle le premier je t'aime de notre relation. N’allait-elle pas un peu vite ? Sans doute que si … Mais dans le fond nous étions deux dans cette histoire puisque j’étais sur le point de l’épouser. Plutôt que de lui répondre, encore bien trop peu sûr de mes sentiments, j'avais tendu un bras pour l’enrouler autour d’elle et la serrer doucement contre moi en posant ma joue sur son crâne blond. Revenant peu à peu à l’instant présent en sentant un grain de riz me tomber sur l’œil, je plissai les paupières et baissai la tête en entraînant résolument Julie jusqu’à la voiture de luxe, gracieusement prêté par un ‘ami’ de la fac, dans laquelle nous nous engouffrâmes sans attendre pour filer en direction de la salle des fêtes que nous louions pour la soirée, et la nuit. Nous avions du faire un emprunt faramineux pour payer le tout et cela avait le don de m’effrayer plus que de raison et de me donner des sueurs froides à l’idée de ce que j’allais devoir rembourser dès ma sortie de la fac. Mais … C’était un mal pour un bien non ? Oui, je voulais le croire. Je voulais vraiment le croire …
« C'est toujours en se prenant une claque dans la gueule qu'on ouvre les yeux. »
Souriant quelque peu, je m’amusais à faire des chatouilles sur le ventre d’Olivia, ce qui la faisait rire à gorge déployée dès que mes doigts couraient sur son ventre et que je lâchais des ‘guili guili’ pour entendre encore son rire que j’aimais tant. Jusqu'à ce qu'un bruit aussitôt suivit d’un flash qui m’aveugla quelque peu, se fasse entendre. De surprise, je redressai la tête pour voir Julie, un appareil photos dans les mains, qui venait de prendre une photo. « Ju’ … Tu sais que j’aime pas les photos … » « Mais moi j’adore ça alors il va falloir t’y faire ! Je veux que chaque instant de bonheur soit immortalisé comme il se doit ! » Lâcha-t-elle en me rejoignant et en se plaçant accroupie à mes côtés pour nous prendre en photos à plusieurs reprises, tantôt joue contre joue, tantôt en train de s’embrasser, tantôt ses lèvres sur ma joue. Je me prêtais au jeu sans trop broncher, tout simplement parce que lorsqu’elle était aussi joyeuse, je me sentais bien. Sans doute que je m’étais attaché à elle pour de vrai au final. Sans doute même que je l’aimais à ma façon. Quoi qu’il en soit, notre relation était tout simplement parfaite. Un mariage sans nuage à l’horizon et une enfant parfaite à notre charge. Malgré notre jeune âge, nous nous en sortions plutôt bien et je parvenais parfaitement à contrôler ma vie comme avant, ayant tout de même ajouté le côté famille à côté de ma vie d'étudiant et de jeune travailleur. En semaine je bossais encore et toujours à l’université, décrochant toujours de bonnes notes et me contentais de réviser uniquement les soirs de semaine. Ainsi, les week-ends, je voguais entre l’appartement de Julie où elle se trouvait avec sa fille, et les clients auxquels je devais rendre visite pour leur vendre les produits que vendait la boite qui m’employait en tant que vendeur en porte à porte. Bref, en résumé, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Certes ma mère m’en voulait un peu de lui avoir présenté ma ‘promise’ le jour même de notre mariage. Comme je le lui avais expliqué sans lui omettre le moindre détail, tout s’était fait dans la précipitation et nous n’avions pas vraiment prit le temps de penser à autre chose qu’à l’organisation du mariage et tout ce qui s’ensuit. Ma mère avait, semble-t-il, bien apprécié celle que j’avais décidé d’épouser et affirmait que même si nous n’avions pas eus un coup de foudre immédiat comme ce fut le cas pour elle et mon père, notre relation allait de toute évidence en évoluant. Je pensais comme elle. Je n’étais peut-être pas tombé éperdument amoureux de Julie dès le premier regard, mais l’attachement que j’éprouvais pour elle et pour sa fille, allait grandissant et je ne pouvais qu’en être parfaitement conscient. Je m’habituais sans aucun mal à cette vie et, dans le fond, je n’en changerais pour rien au monde. Des coups frappés à la porte de l’appartement nous firent tous les deux nous tourner vers celle-ci. Après un bref soupir, je déposai un bref baiser sur la joue de Julie. « Bouge pas j’y vais. » Soufflai-je doucement en me levant rapidement pour aller ouvrir. Je me retrouvai alors devant une femme d’une trentaine d’années, un visage froid et austère, des cheveux blonds tirés en arrière et retenus par un chignon haut, une paire de lunettes aux montures carrés et vêtue d’un tailleur jupe noir et chemise blanche. Je lançai un vague regard en direction des deux types à la carrure de rugbyman. J'haussai les sourcils en reportant mon attention sur la femme. « Nous sommes bien chez Mademoiselle Julie Martin et la petite Olivia ? » « Oui c’est ici … Et vous êtes … ? » « Services sociaux ! Nous venons récupérer l’enfant. » Choqué, j'écarquillai les yeux et tournai un bref regard vers Julie qui s’était relevée en tenant fermement sa fille dans ses bras. Lentement, elle la berçait sans nous quitter du regard. Je déglutis avec peine alors que je me tournais à nouveau vers la femme. « Je suis désolé mais … Il doit y avoir erreur … Il n’y a vraiment aucune raison pour que vous nous l’enleviez … » « Je crains bien que si malheureusement ! En raison de l’enquête qui a été lancée voilà quelques mois quant à l’éducation de cette enfant, nous avons pu apprendre par vos voisins les plus proches qu’il arrivait fréquemment qu’Olivia pleure durant des heures sans personne pour la faire cesser cela. Ce qui nous amène à penser que personne ne s’occupe d’elle comme il se devrait. Je suis navrée jeune homme mais nous sommes forcés aujourd’hui, d’avoir recours à des manières drastiques. Nous récupérons l’enfant qui sera placée en foyer le temps de remplir les papiers nécessaires pour affirmer que sa mère n’est pas apte à l’élever correctement et ainsi connaître la chance de trouver des parents plus aptes à cela. » « Quoi ? Est-ce que vous parlez d’adoption ? Non attendez ! Vous ne pouvez pas faire ça ! Laissez nous une chance, elle ne manquera de rien avec nous, on peut s’en occuper s’il vous plait ! » Dis-je d’une voix de plus en plus forte et paniquée, tentant de contourner l’homme qui me faisait reculer pour m’éloigner de Julie et Olivia, tandis que les deux autres personnes s’en approchaient résolument. « Nous ne pouvons décemment pas laisser cette enfant aux mains de jeunes personnes irresponsables. » « Mais nous sommes responsables … Je suis responsable ! Je vous en prie … Juste une chance ! Je vous promet de m’occuper d’elle … D’elles, de toutes les deux … S’il vous plait … Réfléchissez … Elle a besoin de sa mère autant que sa mère a besoin d’elle. « Il aurait fallut y penser plus tôt. A présent il est trop tard ! Récupérez l’enfant ! » Ordonna-t-elle d’une voix claquante au second homme qui ne se fit pas prier pour s’approcher de Julie et lui faire comprendre qu’il valait mieux qu’elle coopère sans broncher. Croisant son regard tout aussi paniqué que le mien, je me contrôlai pour parvenir à refouler mes larmes. Et en comprenant qu'il ne servait à rien de lutter, je lui fis un faible hochement de tête pour lui faire comprendre de donner Olivia à l’homme. La petite passa des bras de de sa mère à ceux de l'inconnu, à ceux de l’assistante sociale. Aussitôt, comprenant sans doute que quelque chose n’allait pas du tout, elle se mit à hurler et pleurer comme jamais. Je serrai vivement les dents pour ne pas craquer et pleurer à mon tour et la regardais dans les bras de la femme. Je croisai son regard noisette qui ressemblait terriblement à celui de sa mère. Ses mains se tendirent vers moi, signe qu’elle voulait que je la prenne. Tout naturellement je voulus m’approcher d’elle. Mais l’un des hommes m’en empêcha, ajoutant un regard noir à son action. Je cherchai vainement à me débattre pour qu’il me lâche, mais fus bien incapable de me libérer de son emprise. Finalement, je fus forcé d'abandonner et me contenter de regarder Olivia disparaître sans me quitter du regard et bras tendus vers moi. Je demeurai totalement figé alors que ses hurlements se faisaient de moins en moins sonores alors qu'elle disparaissait au loin. L’homme ne me relâcha que lorsque le silence fut totalement retombé. Cloué sur place, incapable de pleurer tant le choc était brutal, je le regardais disparaître à son tour, prenant même la peine de refermer la porte derrière lui. Comme si rien de tout cela ne venait d’avoir lieu. Ce fut la dernière fois que je vis Olivia …
« Une famille se forme le jour du mariage et se complète à chaque naissance qui suit. »
« Tu te souviens du jour où on a prit cette photo ? » « Oui je me souviens … » « Oh ! Et regarde cette photo ! C’est le jour où elle a fait son premier pas ! Je me souviens encore de sa bouille quand elle a fait semblant de s’avancer vers toi avant de finalement bifurquer vers moi. » « Ju’ … Je n’ai rien oublié tu sais … Je n’oublierai jamais quoi que ce soit … » « Je sais mais … elle me manque tellement … » « Je sais oui … A moi aussi elle me manque. Tous les jours un peu plus … » Soufflai-je doucement en la serrant faiblement contre moi lorsqu’elle roula sur le lit pour poser sa tête et un bras sur mon torse. D’un geste distrait et sans trop y penser, je caressais lentement ses cheveux de ma main, en regardant le plafond comme s’il allait pouvoir me donner des réponses. Ou plus encore … Me rendre un bonheur perdu, me rendre cette enfant qui nous manquait autant à l’un qu’à l’autre. Je ne l’avais peut-être connu que quelques mois mais j’avais largement eus le temps de m’attacher à elle, de l’aimer comme un père aimerait son enfant et de vouloir l’élever comme tel. Je finis par fermer les yeux et tentai de ne pas penser au jour que nous étions. Son anniversaire … Elle fêtait son cinquième anniversaire déjà. Mais comme les trois précédents, elle ne les fêtait pas avec nous mais avec la famille qui l’avais accueilli puis adopté. Après des mois de procédures incessantes, la justice avait finalement tranché. Selon eux, à cause de ses passes dépressives, Julie n’était pas apte à élever sa fille. Quant à moi, je n’étais pas son père et je n’étais encore qu’un jeune étudiant. Par conséquent, nous n’étions soit disant pas assez matures et responsables pour nous occuper d’un bébé. J’avais mis du temps à comprendre mais finalement les paroles lâchées par l’assistante sociale avaient prit un certain sens dans mes pensées. Il était arrivé que certains week-ends, Julie se dise trop fatiguée pour s’occuper d’Olivia, s’enfermant alors dans sa chambre pour dormir ou simplement s’allonger sur le lit et attendre. Attendre quoi ? Je l’ignorais … Que le temps passe sans doute. Au fil du temps le doute s’était immiscé en moi. Les voisins qui entendaient Olivia pleurer durant de longues heures sans que personne ne vienne la faire cesser … Et si dans ces moments là, Julie connaissait ses fréquents passages à vide ? Et si elle laissait la petite dans son cosy, sa chaise haute, son lit ou dans son parc, pendant qu’elle-même aller ‘se reposer’ dans sa chambre, volets et rideaux fermés et lumière éteinte ? Se pourrait-il que tout cela soit vrai finalement ? Que Julie soit bien trop irresponsable pour avoir un enfant ? Finalement tout était de sa faute … Mais pouvais-je lui en vouloir ? Bien sûr que non … C’était aussi, indirectement de ma faute. Après tout, j’aurais du voir plus tôt qu’elle n’allait pas bien et avait très certainement besoin de ma présence hebdomadaire à ses côtés. Le jour où elle me demanda si je voulais divorcer puisque la raison première de notre mariage n’avait plus lieu d’être, peu de temps après que les juges aient rendu leur verdict, je m'étais contenté de lui répondre non. Non je ne voulais pas être séparé d’elle. L’aimais-je ? En tout cas mes sentiments étaient proches de l’amour, à défaut d’en être vraiment. Et je savais que de son côté, son amour pour moi était bel et bien présent et sincère. Elle ne pouvait pas s’en sortir sans moi et je ne savais que faire d’autre que de l’aider et rester à ses côtés. Une chose était sûre, je voulais tenter de faire fonctionner notre couple, quitte à peiner les premiers temps pour la faire sortir de la dépression dans laquelle elle se trouvait plus ou moins depuis toujours. Je décidais donc rapidement de nous trouver un appartement près de la fac, pour nous y installer tous les deux. Elle trouva sans trop de mal un nouveau boulot de serveuse et pour ma part, je continuais mes ventes au porte à porte tout en excellant toujours autant dans mes études. Nous avions vendu à peu près toutes les affaires et tous les jouets de bébé d’Olivia, songeant que les voir tous les jours nous ferait bien trop de mal. Nous avions donné son doudou à l’assistante sociale pour qu’elle le lui donne, espérant sincèrement qu’elle l’avait fait car nous avions ainsi l’impression qu’elle avait toujours un bout de nous avec elle. Nous avions toujours sa petite couverture de bébé bleue que Julie refusait catégoriquement de laver et l’une de ses peluches, un ours marron qui portait un kilt orange et vert, trônait sur l’armoire face à notre lit. En clair, c’était comme si Olivia était toujours là, tout en ne l’étant malheureusement plus réellement. Elle nous manquait et cela était plus qu’évident. Je savais que ma mère s’inquiétait pour moi et avait peur que cela me coupe l’envie de fonder un jour ma propre famille. En sentant Julie se redresser en prenant appuie sur mon torse, je tournai la tête vers elle, la regardant s’asseoir à califourchon sur moi et posai mes mains sur ses cuisses sans broncher. « Hugo fais moi un enfant ! » Stupéfait par une telle requête alors que j’étais à mille lieu d’imaginer qu’elle pouvait vouloir un autre enfant et encore moins aussi rapidement, je lui lançai un regard choqué. « Quoi ? » « Tu as très bien entendu ! Je veux que tu me fasses un enfant … Ne crois pas que c’est pour remplacer Olivia ou quoi que ce soit de ce genre. Mais … Ca fait trois ans que nous sommes mariés. Il est temps que nous fondions notre famille non ? » « Ju … On a que vingt trois ans et je suis encore étudiant … On a tout notre temps pour ça … » « Mais pourquoi attendre ? Je sais que je veux faire ma vie avec toi ! Il est temps, je me sens parfaitement prête ! On a vingt trois ans mais le temps que je tombe enceinte ajouté à la durée de la grossesse, nous aurons vingt quatre ans et tu ne seras plus étudiant. Hugo … » Restant un long moment à la dévisager sans laisser apparaître quoi que ce soit, je finis par me redresser pour l’embrasser lentement, avant de la faire basculer pour l’allonger sur le lit en restant au dessus d’elle, sans lui donner de réponse plus claire. Mais je ne disais pas non … Et elle savait parfaitement ce que cela voulait dire lorsque je ne disais pas non … La réponse était invariablement positive.
« Je vous avais prévenu que j'avais pas de chance. »
« Hugo il faut que tu viennes à l’hôpital et TOUT DE SUITE. Je veux pas mettre au monde notre fille, seule. Viens ! » Je n'eus pas le temps de répondre quoi que ce soit, qu'elle avait déjà raccroché. Je restai toute une minute totalement immobile et comme un imbécile, à regarder mon téléphone. Finissant par réagir, je me redressai rapidement, récupérai ma veste sur le dossier de ma chaise, éteignis mon ordinateur, rangeai quelques documents dans ma mallette et remis de l'ordre sur mon bureau. « Alors ça y est Hugo ? C’est le grand jour ? » « Oh oui ça y est le grand jour ! Je vais être papa ! Je vais être … PAPA ! » Hurlai-je presque malgré moi, d’une voix excitée et enjouée, faisant se lever toutes les têtes de mes collègues autour de moi. Ce fut sous des hurlements d’encouragements et autres, que je m’engouffrai dans l’ascenseur. De plus en plus excité, un immense sourire niais aux lèvres et le cœur battant la chamade dans ma cage thoracique, je descendais les étages. Je soufflai longuement en secouant les jambes où des fourmis d’excitation s'étaient installées. J’allais être papa ! Comme l’avait prédit Julie, nous avions à présent tous les deux dépassés les vingt quatre ans et j’avais un boulot parfaitement stable et honorable dans une grande boîte de conception de publicités. Si dans l’immédiat je n’étais qu’un employé parmi tant d’autre, je savais qu’avec mes diplômes, mes capacités et mon acharnement au travail, j’allais pouvoir rapidement passer en tant que chef de la publicité. Autant dire, l’un des postes les plus élevés de la boite. Surtout que celui qui occupait ce poste à ce moment là, comptait prendre sa retraite d’ici à une petite année à peine. Si je parvenais à décrocher cette place, j’allais sans doute faire des jaloux en raison de mon arrivée encore toute jeune au sein de l’équipe. Mais tout savaient que je le méritais amplement au vu de tous les diplômes que j’étais parvenu à décrocher à la sortie de l’université. Et puis même au vu de ma situation familiale, je le méritais d'autant plus. Une jeune épouse enceinte et bien trop instable pour avoir un quelconque emploi. Bien sûr tout le monde ignorait l’existence d’Olivia. Je n’étais pas non plus du genre à révéler ma vie à tout va. Quoi qu’il en soit, depuis que je travaillais dans cette boîte, je gagnais bien assez ma vie pour que l’on ait changé d’appartement avec Julie, en prenant un avec deux chambres. L’appartement était décoré avec goût et quelques uns de mes tableaux venaient égayer les pièces aux murs blancs. La chambre de la petite à venir avait été peinte par nos soins, de couleur rose et violette et le mobilier pour enfant était très certainement ce dans quoi j’avais le plus dépensé. Mais ça valait amplement la peine évidemment ! Je voulais le meilleur pour ma fille et uniquement le meilleur ! Une fois hors de l’immeuble qui accueillait nos bureaux, je courus littéralement jusqu’à ma voiture garée dans le parking privé, ne tardant pas à démarrer tel un forcené pour foncer droit sur la route. Profitant d’un feu rouge, j’appelai ma mère. « Allô ? » « Maman désolé de te déranger mais c’était simplement pour te prévenir que Julie était à l’hôpital. Elle va accoucher et je suis sur la route pour la rejoindre ! » Lâchai-je d’une traite, d’une voix excitée et heureuse comme jamais ma mère ne m’avait entendu parler. Le tout, en riant franchement de bonheur. « Oh mon chéri c’est une merveilleuse nouvelle ! Va donc soutenir ton épouse oui. C’est toujours mieux de ne pas être seule dans ces moments là. Envoie lui plein d’ondes positives mais surtout, sois prudent sur la route mon chéri. Pas de précipitation et sois vigilent ! C’est quand on est tout excité que le pire peut arriver. » « Maman ne t’inquiète pas ! Bon je te laisse le feu est vert. Bisous ! Et je te rappelle quand Lily sera avec nous ! » Toujours aussi heureux et excité, je balançai mon téléphone sur le siège passager en prenant alors la direction des grandes routes de la ville, fonçant bien trop rapidement. Comment ne pas rouler vite alors que j’ignorais combien de temps mettrait Lily pour venir au monde ? Je ne pouvais décemment pas prendre le risque d’arriver trop tard, une fois la guerre terminée. Non seulement je voulais tenir la main de Julie dans cette douleur insupportable qu’elle allait connaître. Mais en plus, je tenais à voir notre fille de suite, sans attendre. Je n’étais pas très patient la concernant. Depuis neuf mois, j’étais celui qui de nous deux, se montrait le plus impatient et heureux de cette venue alors même que c’était Julie elle-même qui avait voulu la première que nous fassions un enfant. En entendant mon téléphone sonner sur le siège passager, je tournai un bref regard vers lui et tendis le bras pour le récupérer sans quitter la route du regard. J'y lançai un bref regard et grimaçai en voyant le numéro de Julie s’afficher. Décrochant, parce que j’avais bien l’impression qu’elle me tuerait si je ne le faisais pas, je portai sans attendre le téléphone à mon oreille. « Où est-ce que t’es ? DIS MOI ! Hugo je te jure que si t’es pas là dans la minute, je te quitte ! Tu entends ? Je divorce et je me barre avec Lily ! » « Ju' calme toi je suis en route mais je n’ai pas un hélicoptère ! Respire ok ? Tu te souviens ? La respiration du petit chien comme quand … » « Parce que tu crois que c’est facile ? Espèce d’abruti c’est pas toi qui est en train de te faire arracher les entrailles par un marmot ! » Sans doute aurais-je du ne jamais répondre à cet appel. Sans doute que j’aurais du la laisser se débrouiller un peu seule pour une fois, au lieu de toujours être là pour l’épauler plus qu’il ne le faudrait. Sans doute que j’aurais du davantage m’inquiéter de ma propre sécurité avant de prendre cette appel alors que j’étais au volant sur une route réputée pour être dangereuse. Sans doute … Mais il était trop tard pour y penser. Quand je relevai enfin la tête, je ne vis que bien trop tard, le carambolage sur la route. Je lâchai aussitôt mon téléphone et donnai un terrible coup de frein comme jamais. Ma voiture perdit de la vitesse, lentement mais surement. Le choc de mon auto, contre celles qui se trouvaient déjà devant moi, ne fut pas si terrible que cela. Certes un petit coup brusque et de la tôle froissée. Mais rien de bien méchant. Rien à côté de ce qui aurait pu m’arriver. Non en fait … Rien de bien méchant à côté de ce qui allait m’arriver. Je soufflai de soulagement, le visage en sueur du à la panique et relevai un bref regard vers mon rétroviseur. Ce que je vis alors, me glaça le sang. Un camion arrivait droit sur moi et semblait incapable de freiner. Sans le quitter du regard et entendant toujours la voix de Jule qui hurlait dans son téléphone, je tâtonnais ma ceinture pour la décrocher, dans l’espoir insensé de parvenir à sortir de mon véhicule avant le choc brutal qui allait arriver. Mais c’est bien connu que jamais rien n’arrive comme on le voudrait. Le choc fut terrible. Dans le fond, heureusement que j’avais toujours ma ceinture, ce qui m’évita d’être trop propulsé en avant. Toutefois, j’aurais du me racheter une voiture avec mes premières payes … Le fait que l’airbag ne se déclenche pas … Sacré merde ! Ma tête heurta brutalement mon volant, avant que la voiture qui se replie sur elle-même tel un accordéon. Et j’eus encore moins le temps de comprendre et sentir que mon corps était totalement compressé entre mon siège et le volant. Juste de la tôle froissée ? Peut-être un peu plus que ça finalement … Bien plus que cela même ! Bref, je n’eus pas le temps de savoir tout cela, car le choc de ma tête contre le volant me fit de suite sombrer dans un trou noir.
« La mort peut crever, je la veux pas moi ! »
« A trois on le soulève ! Un … Deux … Trois ! » Où étais-je ? Que se passait-il ? A qui appartenaient ces voix ? Pourquoi ces mains tâtaient-elles mon torse ? Est-ce que j’avais mal ? Est-ce que je souffrais ? Non … Aucune douleur, rien, le néant. A vrai dire je ne sentais même plus mes jambes et j’avais la sensation que ma tête était compressée dans un étau sans pour autant que cela soit douloureux. Si je n’étais pas encore mort, je ne doutais pas un seul instant que cela ne saurait tarder. Etait-ce donc cela la mort ? Un corps sans doute blessé mais qui ne souffrait plus ? Un corps que l’on se sentait bien incapable de bouger ? Je n’étais ni conscient ni inconscient … C’était comme un rêve que l’on ne maîtrise pas mais dans lequel les pensées indépendantes étaient acceptées. Je sentais mon corps faiblir à vu d’œil. Je sentais les battements de mon cœur se faire plus espacés, ma tête semblait se compresser de plus en plus violemment et ma respiration se coupait lentement mais surement, l’air ne parvenait plus à mes poumons. C'était si simple de se laisser sombrer ... « Il ne respire plus ! Intubez-le ! Intubez-le vite ! » Evidemment que je ne respirais plus ! Quel était le crétin qui venait de me poser une tonne de béton sur le torse hein ? Avec ça comment respirer ? Le souffle coupé, je sentis à peine que l’on me passait un tube dans la gorge. En fait je ne sentais toujours rien si ce n’est l’air qui entra enfin dans mes poumons. Ma tête semblant sur le point d’exploser tant elle était compressée dans son putain d’étau, je perdis une nouvelle fois connaissance. C’était pas plus mal dans le fond … « Qu’est-ce qu’on a ? » « Traumatisme crânien violent, un poumon perforé, quelques côtes cassées et nous pensons à une rupture de la rate. C’est le plus grand blessé, sa voiture était totalement ratatinée. Une chance qu’il ne soit pas mort.» « S’il survit vous voulez dire ! » C’était de moi qu’ils parlaient ? Woaw le plus grand blessé quel honneur … Ma conscience n’ayant de cesse de se faire la mal, lorsque je parvins enfin à ouvrir les yeux et reprendre totalement connaissance, je cru mourir sous la douleur insupportable. J’aurais voulu hurler, pleurer, bouger, m’échapper … Mourir ! Oui je voulais mourir ! La douleur était insoutenable. J’avais la sensation d’avoir une barre qui traversait ma tête de part et d’autre. Les tuyaux dans ma gorge me dérangeaient, bien que je ne parvenais pas à respirer de moi-même. Mon torse était comme écrasé par une tonne de béton et là encore, j’avais la sensation d’être traversé par une barre de métal qui me détruisait littéralement. Des douleurs insupportables dans le ventre me donnaient l’envie de pleurer comme jamais je n’avais pleuré. Et mes jambes … Mes jambes … Etaient-elles encore là ? Si oui, pourquoi ne les sentais-je plus ? Paupières entrouvertes, je clignai à plusieurs reprises, aveuglé par les lumières vives du plafond blanc. On ne leur avait pas appris que les lumières se répercutaient sur les murs blancs et aveuglaient littéralement ? Il faudrait le leur dire … Oui mais moi je ne le pourrais pas … J’allais mourir. Un visage flou apparut alors dans mon champ de vision. « Monsieur Amiel vous m’entendez ? Nous sommes en train de nous occuper de vous ne vous inquiétez pas tout ira bien ! Vous avez eus un grave accident mais ne vous inquiétez pas vous êtes pris en charge à présent. Votre femme va bien. Votre fille aussi ! Elles vont bien toutes les deux. Votre fille pèse trois kilos deux cent et mesure … » Je n’eus pas le temps d’entendre la suite de ses paroles que mes paupières se fermaient d’elles mêmes, une larme coulait sur mon visage sans que je ne puisse faire quoi que ce soit et toujours aussi impuissant, je sentis les battements de mon cœur s’espacer puis s’arrêter totalement. J’étais mort … Non mais … Mort de chez mort ! Genre, y’a pas plus mort ! « On le perd ! On le perd ! Défibrillateur ! On doit relancer son cœur, sans quoi il ne survivra pas aux opérations ! Vite ! » Quel charmant petit coup de jus qui s’abattit sur moi. Enfin sans doute que c’était violent puisque ça suffit à me décoller littéralement du brancard. Bof pour ce que ça me faisait. De toute façon c’était fini, je sentais que mon corps ne répondait plus. Je n’étais pas capable de respirer seul, mon cœur ne battait plus et mon cerveau me semblait vraiment imploser. A quoi bon se battre puisque rien ne pourrait changer ce qui était en train de se produire ? Ces médecins s’acharnaient sur un mort. Certes j’étais encore capable de penser … Mais c’était différent. Je ne pensais pas vraiment. Difficile à expliquer. Oh et puis merde je mourrais alors pourquoi expliquer quoi que ce soit ? La mort c’était la mort point ! « Monsieur Amiel battez-vous ! Bon sang battez-vous ! Pensez à votre femme, votre fille ! Votre fille je vous assure je l’ai vu, elle est belle comme un ange ! Les cheveux blonds de sa mère et les yeux bleus de son père. Monsieur Amiel ! » Une violente douleur au cœur me fit cambrer le dos sous sa violence. Ma fille ! Je ne pouvais pas la laisser seule avec Julie ! Plutôt mourir ! Oh non je savais très bien ce qui arriverait sinon. Elle allait l’abandonner, la laisser se débrouiller seule alors qu’elle n’était qu’un bébé. Et la garde lui serait retirée ! Ma mère … Je voulais qu’elle connaisse sa petite fille. Bon sang je devais être là pour les trois … Oui elles avaient besoin de moi. Elles comptaient sur moi. Un faible bip remplaça le long et interminable bip que j’entendais à demi non loin de ma tête. Un bip qui fut l’écho du battement de mon cœur qui venait de repartir. La mort pouvait crever, je ne la laisserais pas m’avoir ! Ne sentant pas le médecin qui injectait un produit dans le tube qui était relié et piqué dans mon poignet, j’eus à peine conscience de sombrer à nouveau.
Dernière édition par T. Hugo Amiel le Dim 24 Fév - 14:12, édité 5 fois
Invité
Invité
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 21:30
L'HISTOIRE
« Rattraper le fil de sa vie un mois plus tard c'est pas si simple. »
« Sauf qu’Allie a la maladie d’Alzheimer alors leur histoire d’amour si belle et unique, elle l’oublie petit à petit. Et […] » Maman … Maman tais toi j’ai mal à la tête. Ma … MAMAN ? Qu’est-ce qu’elle foutait là ? Et puis où étais-je d’abord ? Pourquoi est-ce que je n’arrivais pas à ouvrir les yeux ? Pourquoi mon corps ne me répondait plus ? Oh … Non … Tout mais pas ça. Pas le coma je … « Bon sang Hugo … Je t’en prie … Je t’en supplie réveille toi mon chéri tu peux pas me faire ça. Sans toi je fais quoi moi hein ? Ca ne suffit pas que ton père m’ait été arraché ? Il faut que toi aussi tu partes ? Réveille toi s’il te plait … Les médecins disent qu’ils ignorent si tu pourras te réveiller mais moi je croise les doigts, je crois en toi. Hugo s’il te plait me fais pas ça … Pense à Julie ! Et Lily. Lily si tu la voyais elle est si belle ! Blonde aux yeux bleus, un ange, une bouille à croquer ! Je trouve qu’elle te ressemble lorsque tu étais bébé. Mon chéri s’il te plait … Reviens … Je ne sais même pas si tu m’entends ni si … » J’ignore si c’est elle qui cessa de parler ou si ce sont mes oreilles qui ont cessé d’écouter. Tout ce que je sais, c’est que le son se coupa pour de bon.[…] « Noah et Allie. Je t’assure leur histoire est … »[…] « Si tu voyais ta fille, elle est tellement belle ! Hier soir quand je l’ai vu, elle souriait. Elle te ressemble de plus en plus Hugo. Bon d’accord elle n’a pas tes cheveux mais elle est belle à couper le souffle. » Ma fille … Pourquoi est-ce que je n’avais pas le droit de la voir moi ? Pourquoi ne pouvais-je constater par moi-même combien elle était belle à couper le souffle ? Pourquoi le sort s’acharnait-il de la sorte contre moi, m’empêchant d’être heureux alors que … Bordel mais je le méritais bien non ? Je voulais voir ma femme, je voulais voir ma fille, je voulais vivre. D’ailleurs … Où était-elle ? Où était Julie ?
*.*.*.*.*.*.*.*.*.*
Prenant lentement conscience du bip incessant qui se faisait entendre à intervalles réguliers à côté de ma tête, je commençais à sentir de légères douleurs dans tout mon corps. Cela allait de ma tête à … Mes cheveux. Etait-ce possible ? La preuve que oui. Mais étrangement cette douleur n’était pas insupportable. Je ne comprenais pas pourquoi, je ne savais même pas où j’étais ni pourquoi j’y étais. J’avais simplement … Une étrange sensation de flottement alors qu’à côté de cela je sentais bien le lit sous mon corps. D’ailleurs c’était vraiment bizarre. Depuis combien de temps n’avais-je pas ressenti de douleur ? Entendu quoi que ce soit de façon claire ? Senti quoi que ce soit sur ma peau ou même senti mon corps tout simplement ? Si je voulus ouvrir la bouche pour parler, j’en fus bien incapable. Je cherchai à bouger les jambes, ouvrir les yeux ou autre, mais c'était encore bien trop difficile pour moi. Certes je commençais à sentir à nouveau mon corps, de légers fourmillements se faisant ressentir sur chaque parcelle de ma peau. Mais ça ne m’empêchais pas de ne pas trouver la force de bouger quoi que ce soit. Sentant une main sous la mienne, je ne pus évidemment que rester totalement immobile à me demander à qui elle appartenait. Voulant bouger ma main pour signifier que j’étais éveillé, je du me concentrer avec force et durant un long moment. Je sentis parfaitement la larme qui s'échappait de l’une de mes paupières, tant l’effort me coûtait et tant je commençais à paniquer à l’idée de ne pouvoir bouger. L'effort me paraissait surhumain. « Hugo … ? » Ma mère ! C’était ma mère ! En sentant un doigt passer lentement sur me visage pour essuyer la larme qui coulait sur ma peau, j'eus envie de hurler. Envie de la supplier de m’aider, de me sortir de là tout simplement. Mais je n’y arrivais pas. Je me sentais totalement incapable de faire quoi que ce soit. Quelque chose de trop fort pour moi, me retenais. Ma main … Je devais à tout prix me concentrer sur ma main. Contre toute attente, je parvins à bouger mon doigt. J'aurais presque pu sauter de joie tant j’étais heureux et fier de moi. Mais l’instant d’après, je sombrais à nouveau dans le sommeil tant ce petit effort venait de me coûter en énergie.
*.*.*.*.*.*.*.*.*.*
« Mais pourquoi ne se réveille-t-il pas ? Il a bougé, je n’ai pas rêvé, j’en suis certaine ! » « Un peu de patience madame Amiel. Pensez que pour une personne dans son état, bouger un doigt lui a demandé beaucoup d’efforts. Il a simplement sombré dans l’inconscience ensuite pour se reposer. Mais croyez moi, il se réveillera pour de bon en temps et en heure ! Il respire à nouveau tout seul, son cœur bat à un rythme régulier et son cerveau répond. Madame Amiel, votre fils est tiré d’affaire croyez moi. » Tiré d’affaire ? J’étais tiré d’affaire ? Alors pourquoi je ne me réveillais pas ?
*.*.*.*.*.*.*.*.*.*
Bip … Bip … Bip … Etait-ce mon cœur qui battait de façon aussi régulière et qui avait le don de me donner l’envie de dormir à nouveau ? Un son qui avait le don de m’hypnotiser mais dont je m’accommodais sans trop de mal. Etrangement, je sentis que mon corps était plus apte à répondre aux commandes de mon cerveau. Raison pour laquelle j'entrepris d'ouvrir les paupières. Après de faibles et rapides clignements, mes yeux s'entrouvrirent. Blancheur … Tout était blanc … Logique pour un hôpital. Je pris une longue et lente inspiration, redécouvrant le plaisir de l'odorat et le bonheur de respirer vraiment. Je clignai à nouveau des paupières, pour tenter de retrouver une vu à peu près normal. Avec difficulté, je parvins à déglutir. Ce qui me fit néanmoins grimacer de douleur sous la sécheresse de ma gorge. Après un terrible effort, je parvins à tourner la tête vers ma mère et souris faiblement en la voyant plus ou moins dos à moi et totalement tournée vers la télévision dont le son était pourtant éteint. Après une nouvelle inspiration, et priant silencieusement pour que ma voix soit encore présente, je trouvai le courage de parler. « Et à la fin Allie elle devient quoi ? » Demandai-je alors, ravi d’entendre ma propre voix bien que rocailleuse et encore faible et tremblante. Allie … Je me souvenais de quelques paroles à présent. Elle m’avait parlé d’Allie et Noah. Ce couple fou amoureux qui se voit séparé avant de se retrouver et passer sa vie ensemble. Mais à la fin de sa vie, Allie souffrait de l’Alzheimer. C’était tout ce que je savais et en fait, je m’en foutais un peu. Mais j’avais juste eus envie qu’elle sache que je l’avais entendu, un tant soit peu, et que j’étais conscient qu’elle était là depuis le début. Depuis quand ? Je l’ignorais … Je ne savais pas depuis quand j’étais ainsi. Regardant ma mère se lever en larmes pour me rejoindre et se jeter sur moi, je gémis doucement de douleur. « Ouille ! dou ... cement. Moi aussi ... j'suis content ... d'te voir. Mais ... aïe. » « Oh pardon je suis tellement désolé mon chéri, vraiment. Mais comprend moi, ça fait quand même un mois que j’attendais ton réveil avec impatience, un mois que j’ignorais si tu allais ou non te réveiller. Les médecins commençaient déjà à me demander si tu étais donneur d’organes. Ces pessimistes vraiment je le savais que … » « Un … Mois ? » « Oui mon chéri ça fait un mois que tu es dans le coma et que … » « Julie et Lily où sont-elles ? Je veux voir ma fille ! » Croisant le regard hésitant de ma mère, une bouffée de panique s’empara de moi, me coupant le souffle. Les bip bip réguliers se firent soudainement plus rapide.
« Parce qu'on a tous une raison de vivre. »
Julie m’en voulait d’avoir eus un accident de la route alors que je me rendais à l’hôpital. Elle m’en voulait d’avoir été suffisamment blessé pour ne pas arriver conscient et sur mes pieds audit hôpital. Et elle m’en voulait aussi pour être resté dans le coma aussi longtemps. Bref … Elle était complètement folle ! Ce n’était pas comme si j’avais moi-même décidé d’avoir un accident de la route. Accident dont je ne gardais absolument aucun souvenir qui plus est. Quelques photos que m’avait montré ma mère, m'avaient mis plus ou moins sur la voie. Une seule photo en fait. Celle de ma voiture après l’accident. Du moins … De l’accordéon qui ne ressemblait plus en rien à une voiture. A voir l’espace minime que l’on pouvait deviner entre le siège et le volant, je me demandais encore comment j’avais fais pour ne pas être totalement compressé. A mes yeux je m’en sortais plutôt bien. J’étais vivant après tout non ? Certes la douleur des cotes cassées me lançait souvent lorsque je marchais avec difficulté dans les couloirs de l’hôpital, accompagné par ma mère. Certes je devais subir de lourds traitements pour me rétablir pour de bon. Certes ma respiration était difficile … Mais j’étais en vie et le pronostique des médecins quant à mon état de santé futur, était vraiment très encourageant. Il me fallut passer cinq semaines de plus pour avoir l’autorisation officielle des médecins pour sortir enfin de l’hôpital. Je ne gardais de cet accident que quelques petites et fines cicatrices qui, avec un peu de chance, s’estomperaient avec le temps, au niveau des côtes et sous un pectoral, en raison des opérations que j’avais subis pour mon poumon et ma rate. Si mes côtes n’étaient pas encore parfaitement soignées, au moins elles n’étaient plus douloureuses, ce qui était un sacré progrès. Lorsque je marchais un peu trop ou faisais un effort physique, je m’essoufflais vite et mes poumons se faisaient douloureux. Hormis cela rien de bien grave. De toute évidence je n’avais gardé aucun traumatisme et mon cerveau fonctionnait à merveille si ce n’est le fait que je ne gardais aucun souvenir de mon accident. Le médecin m’avait apprit que cela ne reviendrait pas forcément mais que si tel était le cas, je devrais sans doute voir un psychologue tant le choc serait brutal. Préférant ne pas trop penser à cette éventualité, je montais à bord de la voiture de ma mère qui allait me ramener chez moi, sans penser un seul instant à avoir peur de la route. Pourquoi aurais-je eus peur alors que j’avais tout oublié de l’accident ? Ma vie s’était arrêtée lorsque j’étais monté à bord de ma voiture pour rejoindre Julie à l’hôpital et ne reprenait qu’à mon réveil. Réveil ponctué de rêves dans lesquels des gens parlaient de moi et de mes blessures et cherchaient à me réveiller pour m’empêcher de sombrer pour de bon. Arrivé devant chez moi, je remerciais ma mère en lui soufflant que ça allait aller et qu’elle pouvait enfin rentrer chez elle, avant de quitter sa voiture et monter jusque dans l’appartement que je partageais avec Julie. Prenant mon courage à deux mains, j’ouvris la porte avec lenteur, posai les clés sur le guéridon de l’entrée et refermai la porte avec douceur. Je déglutis péniblement, en entendant du bruit dans la cuisine. Et enfin, je pris sa direction avec lenteur pour éviter de me tuer de douleur. Je me figeai en découvrant Julie en train de cuisiner, elle en fit de même en levant le regard vers moi. « Tiens ! Le comateux est de retour ! » Très charmant l’accueil … A croire que je ne venais pas de passer les pires mois de ma vie sans qu’elle n’en n’ajoute. « Où est Lily ? » Demandai-je simplement d’une voix qui trahissait ma solitude. « Qu’est-ce que ça peut te faire ? Depuis le temps qu’elle est née tu … » « Julie arrête ! » Lâchai-je d’une voix forte et claquante pour lui couper la parole, croisant son regard surprit et presque effrayé. Elle n'était pas habituée à de tels emportements de ma part. « Ce n’est pas moi qui, sur un coup de tête, ai décidé d’avoir un accident grave pour me retrouver par la suite dans le coma. Tu crois que ça m’a aidé de voir que tu n’en n’avais rien à foutre et que n’as pas pris la peine de me rendre visite une seule fois en sachant que tu avais tout le temps pour cela ? » Demandai-je sèchement avant de quitter la pièce pour ne pas perdre définitivement patience et m’énerver. Au vu de mon état encore faible, il valait mieux éviter cela. Je pris la direction des chambres à coucher et m’aventurai dans celle que nous avions aménagée pour notre fille. Une nouvelle fois, je déglutis avec peine alors que je m’approchais de son lit, à la lueur d’une veilleuse qui éclairait la pièce d’une couleur rose orangée. En arrivant devant le lit, je me figeai en découvrant ma fille, ma gorge se nouant aussitôt sur le coup. J'inspirai doucement pour retrouver mon calme puis eus un franc sourire. Des larmes apparurent au coin de mes yeux quand elle tourna le regard vers moi, en gigotant énergiquement les jambes et les bras. Après une seconde à la regarder, je me penchai pour passer un bras sous sa tête et un autre sous ses fesses et la soulevai dans mes bras. Bientôt, je pus la serrer tendrement contre mon cœur et la contempler avec un émerveillement non faint. « Lily … Tu sais que j’ai pas arrêté de penser à toi ces derniers temps ? On a beaucoup de choses à se raconter toi et moi. » Soufflai-je doucement en m’approchant du rocking chair que nous avions installé dans un coin de la pièce. Je pris place dessus, sans la quitter du regard. J'entrepris alors de la bercer avec douceur. Regardant longuement l’enfant que je portais, le mien, ma fille, j’entrepris de lui parler, parler, parler et encore parler. D’absolument tout et n’importe quoi. Tout ce que je savais. Tout ce que je voulais partager avec elle. Ma vie, des choses que j’avais appris, mes pensées pour elle, mes espoirs la concernant, bref tout ce qui me passait par la tête. Je voulais simplement qu’elle s’habitue à ma voix, qu’elle me reconnaisse après ces deux mois d’absence, en sachant que lorsqu’elle se trouvait encore dans le ventre de sa mère elle avait bien du entendre et reconnaître ma voix au fil du temps. Je voulais qu’elle retrouve tout cela, qu’elle sache que c’était moi, que j’étais son père. Que je ne l'avais pas abandonnée du tout.
« Le sentiment de déjà vu cache parfois des souvenirs profondément enfouis dans les méandres du cerveau. »
Ne surtout pas oublier de respirer ! Inspirer et expirer, encore et encore, déglutir, inspirer et … Pourtant, je m'arrêtai brutalement dans ma course. Aussitôt, je me mis à tousser fortement, ma gorge se raclant avec violence, mes poumons semblant être totalement en feu, quelques gouttes de sueur coulant le long de mon visage. Je toussais sans plus pouvoir m’arrêter. Et incapable de respirer, je me penchai en avant pour poser mes mains sur mes genoux, à la recherche d’un peu d’air. Et je pus enfin prendre de longues goulées d’air frais pour retrouver mon calme et mon souffle. Faites du sport qu’ils disaient ! Tu parles c’était de la connerie tout ça plutôt oui ! C’était ce foutu sport qui allait m’achever. De ma vie, jamais je n’avais été un sportif alors autant dire que maintenant, avec un poumon qui avait manqué foutre le camp, c’était l’horreur totale ! Le médecin m’avait affirmé que je guérirais plus rapidement en mettant un peu mes poumons à rude épreuve et les faisait fonctionner à plein régime. Etrange pourtant, cette impression que j’avais qu’ils allaient plus me lâcher qu’autre chose. Je finis par lancer un bref regard à ma montre, pour constater que je courais depuis une bonne heure déjà. Je soupirai longuement en passant mon avant bras sur mon front pour essuyer rapidement la sueur qui y perlait, et pris enfin le chemin du retour sans attendre. Je m'étais à présent habitué aux chemins étroits et sinueux de la forêt dans laquelle j’allais courir tous les dimanches matins depuis trois mois que j’étais plus ou moins remis de mon accident. Hormis mes poumons qui me jouaient parfois des tours, tout le reste allait à merveille. Enfin, sans compter ma mémoire qui n’avait toujours pas récupéré les souvenirs de l’accident. Mais à mes yeux, ce n’était pas plus mal. Pour le reste, tout allait plus ou moins bien. Si ma relation avec Julie avait été quelque peu tendue durant les premiers jours de mon retour, tout cela s’était bien arrangé lorsqu’elle avait eut une nouvelle vague de déprime, ne parlant plus que d’Olivia et allant jusqu’à oublier notre fille. Dans ces moments là, elle s'accrochait à moi telle une désespérée et pleurait dans mes bras sans pouvoir s’arrêter. A côté de tout ça, j’avais aussi repris le chemin du boulot, retrouvant ma place sans trop de mal. Bien que pendant un peu plus d’un mois, j'avais eus besoin d’horaires aménagés tant je m’épuisais rapidement et avais donc besoin de repos. Je craignais que cela ne joue en ma défaveur quant au poste de chef de pub. C’était d’ailleurs pour cela que je ne m’arrêtais jamais vraiment de travailler, ramenant toujours du travail à faire chez nous le week-end. A plusieurs reprises, Julie me le reprocha ouvertement en hurlant sans se ménager et s’énervant plus encore en voyant que je restais outrageusement calme devant ses crises de colères. Lors de ses reproches, elle affirmait que je ne passais pas assez de temps avec notre fille. Ce à quoi je répondais que Lily avait juste besoin de manger et dormir et que le fait de la laisser tranquille n’était pas plus mal dans un premier temps. Lors d’une dispute, elle me répliqua que c’était elle que j’abandonnais. A ces mots, le week-end d’après je rentrais à l’appartement sans le moindre travail à faire, pour passer du temps avec elle. Malheureusement, là encore, ça ne lui convins pas du tout. En effet, elle passa son samedi dans la chambre à lire et faire semblant de dormir. Et le dimanche, elle refusa de sortir avec Lily et moi lorsque je proposai une petite sortie. Quant aux soirées, elle me repoussait sans ménagement, lorsque je voulais me rapprocher d’elle. Ne serait-ce que pour la prendre dans mes bras, elle ne le semblait pouvoir le supporter. Fort heureusement pour moi, le canapé était plutôt confortable pour dormir ! Mon téléphone sonna au moment où je montais dans ma nouvelle voiture. Je réprimai un soupir, quand je vis le prénom de Julie s'afficher sur l'écran. Sans attendre, je mis le contact de la voiture et décrochai en même temps. Un premier sentiment de déjà vu me fis froncer les sourcils. « Hugo, il faut que tu viennes à l’appartement tout de suite. Lily n’arrête pas de pleurer et je ne sais plus quoi faire … VIENS ! » Ne me laissant pas le temps de répondre quoi que ce soit suite à cet ordre claquant, elle raccrocha. Je réprimai un soupir et démarrai la voiture, fonçant sans attendre sur la route. Le sentiment de déjà vu ne faisait que s'amplifier, de seconde en seconde. J'allumai la radio pour tenter de me remettre les idées en place et conduisis assez rapidement sur la route en songeant que si je n’arrivais pas rapidement, Julie allait encore avoir des reproches à me faire. Or, je préférais éviter cela. Certes, notre mariage battait un peu de l’aile. Mais pour le bien de notre enfant, je ne voulais pas que nous divorcions. En plus de ça , j’étais intimement convaincu que ses sentiments pour moi étaient toujours présents. Dans le cas contraire, elle n’aurait pas autant l’air d’avoir besoin de moi dans les gros coups de déprime. Quant à moi, ma vie tournait exclusivement autour de ma fille, de Julie et de mon boulot. Que dire de plus si ce n’est que j’avais trouvé un certain équilibre là dedans ? Mon cœur manqua un battement lorsque mon téléphone se mit à sonner une nouvelle fois. Je grommelai en voyant le prénom de Julie s’afficher mais décrochai malgré tout. « Où est-ce que t’es ? Hugo t’as intérêt de rappliquer et vite ! J’en ai marre, ras le bol ! Dans cinq minutes je quitte l’appartement et je laisse Lily seule. Tu m’entends ? » Mon cœur s'emballa férocement et se mit à battre la chamade. Une bar de fer chauffée à blanc sembla se poser sur mes poumons. Le souffle irrégulier, la sueur recouvrant mon corps, une panique sans nom me submergeant ... J'étais en train de perdre pied. Je levai alors un regard instinctif pour voir dans mon rétroviseur. Mouvement qui me fis perdre, rien qu'une toute petite seconde, le contrôle de mon véhicule. Principalement du au fait que je venais de voir un camion, juste derrière moi. Aussitôt, je laissai tomber mon téléphone sans prendre la peine de raccrocher. Et je repris mon volant à deux mains pour retrouver le contrôle de ma voiture. L’accouchement, la précipitation, les appels incendiaires de Julie qui ne voulait pas être seule pour mettre Lily au monde, le carambolage, le choc, le camion qui ratatine littéralement ma voiture, l’airbag qui ne se déclenche pas. A ce flot incessant de souvenir, je du rabattre ma voiture sur le bas côté. Une fois garé, je descendis et fonçai sans attendre dans la forêt qui longeait la route, pour tenter de retrouver mon calme. Je n’avais pas tôt fait quelques pas parmi les arbres, que je du m’arrêter pour vomir tant la peur et la panique m’avait retourné l’estomac. Le corps totalement en sueur et tremblant de tous mes membres, je retournai ensuite auprès de mon véhicule, contre lequel je m'adossai et demeurai un long moment. En fermant les yeux, je luttais tant bien que mal contre la série de flash de l’accident, qui me revenaient inlassablement à l’esprit. Ma mémoire était pleinement revenue.
« Il est des choses que l'on ne peut maîtriser. »
Lily dans les bras, j’arrivais tranquillement à l’hôpital pour retrouver Julie et Lou-Ann. Notre seconde fille était née deux jours plus tôt et cette fois ci j’avais pu être là pour l’accouchement. Accouchement durant lequel j’avais pourtant du me tenir à l’écart de Julie qui, sous le coup de la douleur, avait tenté de frapper tout ce qui bougeait. A commencer par moi. Elle m’avait beaucoup insulté aussi, me hurlant que plus jamais je ne la toucherais. Quelque peu surpris par tant de rage de sa part, j’étais resté tranquillement dans mon coin de la pièce. Et le médecin avait préféré me donner Lou-Ann plutôt qu’à sa mère, une fois née. Julie n’avait même pas voulu la voir, prétendant être trop épuisée pour cela. La connaissant parfaitement, j’avais bien compris qu’à cet instant là elle regrettait plutôt d’avoir eut une seconde fille. Alors que c’était, encore une fois, elle-même qui avait mentionné l’éventualité d’avoir un second enfant. Pourtant, quelques heures plus tard, lorsque je pu aller la retrouver dans sa chambre avec Lou-Ann, elle avait semblée aller bien mieux. C'était donc sur cet agréable souvenir que j’emmenais notre fille ainée les retrouver toutes les deux. Et lorsque j’arrivais, hésitant tout de même à l’idée qu’elle soit à nouveau de mauvaise humeur, j’entrai lentement dans la chambre. Je la découvris, assise sur son lit, visage tourné vers la télévision et Lou-Ann dans les bras. J'en eus presque un soupir de soulagement en la voyant ainsi, soulagé de la voir nous regarder avec un air ravi. Je m'arrêtai devant son lit et me penchai pour déposer un bref baiser sur ses lèvres avant d’en déposer un sur le crâne brun de notre fille. Lou-Ann était aussi brune que Lily était blonde. En revanche, elle avait les mêmes yeux bleus. Les miens. Je posai doucement Lily sur le lit aux côtés de sa mère qui la prit dans ses bras et les regardais un long moment avant de sortir un appareil photo pour les prendre toutes les trois. Je laissai ensuite Julie me prendre avec les filles puis tous les quatre ensemble. Pour immortaliser les instants de bonheur … Car il fallait bien l’avouer, ces moments là étaient devenus une denrée rare dans nos vies.
*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*
« Hugo, j’en ai assez … » Allongé sur le dos à regarder le plafond éclairé sur une large bande, par les rayons de la lune, je tournai lentement la tête vers Julie pour apercevoir son profil, elle aussi face au plafond. « De quoi ? » « De tout … Je n’aime pas notre vie, je n’aime pas ce que je suis … Je ne voulais pas être mère à dix neuf ni me marier à vingt. » Tant de couteaux plantés en plein cœur ... Je déglutis avec peine, en détournant à nouveau le regard d’elle pour contempler à nouveau le plafond. « Je ne comprends pas Julie … Tu as pourtant tout ce dont tu as besoin … Des filles merveilleuses, un mari qui reste à tes côtés, un logement … Peut-être que tu devrais trouver un travail pour tenter de faire quelque chose de tes journées, plutôt que de rester seule avec les filles trop souvent ? » « Est-ce que toi aussi tu insinues que je suis trop irresponsable pour m’occuper de mes propres filles ? » Oui … « Bien sûr que non Ju … Mais sortir un peu … Voir du monde, tout ça … Ca ne pourrait que te faire du bien je pense… » « Je ne veux pas … » « Alors que veux-tu ? Dis moi et je ferais en sorte que tu l’aies Julie … » Finis-je par lâcher sur un ton qui trahissait sans mal, le désespoir dans lequel je me trouvais. « Rien … Je veux rien Hugo… » « Tu devrais peut-être voir un médecin Julie… » Finis-je par souffler doucement, en réalisant pour la première fois depuis le début de notre relation, que son état était bien plus grave que ce que j’aurais pu imaginer. Seul, je n’arriverais sans doute jamais à l’aider. « Je ne suis pas folle Hugo… » « Je ne l’ai jamais pensé … » Répondis-je doucement en me tournant vers elle. Avec lenteur, je posai une main sur son bras, qu’elle me retira bien vite pour se placer dos à moi comme trop souvent. « Laisse moi ! » Je réprimai un soupir pour ne pas lui montrer combien j'étais las. Puis je me replaçai face au plafond, attendant un long moment qu’elle se soit endormie pour me lever et quitter la chambre. Sachant que je serais bien incapable de trouver le sommeil, j’entrepris de créer une maquette pour l’un de nos projets à la boîte. Je savais que cette fois, la place de chef de pub était vraiment en jeux et je ferais tout pour l’avoir !
*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*
« Ju qu’est-ce que tu fais ? » « Ca ne se voit pas ? Je pars ! Tu entends ? Je pars ! J’en ai marre, je n’en peux plus de tout ça Hugo ! Je veux vivre enfin ma vie, je veux être libre, je veux pouvoir faire la fête jusqu’à pas d’heure, me bourrer la gueule, coucher avec qui je veux, quand je veux et où je veux. Bref, je veux la vie que m’as volé. » « Je ne t’ai rien volé du tout Julie au contraire c’est moi qui t’ai aidé, qui t’ai sorti d’une galère. » « Sorti d’une galère ? Tu parles ! On était censés pouvoir récupérer Olivia et regarde ! Tu as l’impression qu’on l’a aujourd’hui ? Non ! Et tu sais pourquoi ? Parce que tu n’as servi à rien ! Strictement à rien ! » Le souffle brutalement coupé, comme si je venais de me prendre un coup de poing en pleine poitrine, je la regardai en blêmissant. Quand je repris mes esprits, ce fut pour me placer entre elle et la porte, lorsqu’elle en prit résolument la direction. « Pousse toi ! » « Je ne te laisserai pas partir non. » « Je t’ai dis … De te pousser ! » « Et moi je te dis que je ne te laisserai pas partir. Julie … Pense à nos filles … Nos deux merveilles … Si tu partais tu les détruirais. » « Je ne sers à rien Hugo ! Je ne suis pas une bonne mère et tu n’as pas besoin de moi ! » « Si … Si j’ai besoin de toi Julie. S’il te plait reste … Fais-le pour les filles … »
« Parfois il faut savoir reconnaître qu'une personne ne peut pas être sauvée. »
« Papa ? Pourquoi est-ce que maman elle pleure tout le temps ? » La petite voix de Lou-Ann me fit redresser la tête et lui lancer un bref regard dans mon rétroviseur pour la voir qui me scrutait avec grand intérêt. Elle avait beau n’avoir que quatre petites années, elle savait parfaitement que quelque chose n’allait pas avec sa mère. Durant la grossesse de la dernière -que nous avions appelée Allie à ma demande, parce que c’était un prénom qui m'avait marqué durant mon coma- Julie avait, semble-t-il, reprit du poil de la bête. Nous avions pu faire une série assez impressionnante de photos de toute la petite famille. Tantôt à la maison, tantôt à l’hôpital après l’accouchement, tantôt dans un parc, au lac et bien d’autres endroits encore. Notre album photo familiale se remplissait de jour en jour, ce qui me semblait être un excellent signe puisque ça signifiait forcément que Julie allait de mieux en mieux et semblait reprendre goût à la vie. Elle avait même décidé de démarrer une formation d’ici à quelques mois, pour devenir secrétaire médicale. De mon côté, j’étais parvenu à décrocher la place de chef de la publicité. Grâce à mon salaire assez grandiose, je pouvais donc nous offrir la location d’une jolie petite maison avec quatre chambres, juste en banlieue parisienne. Autant dire que pour moi, tout allait bien. J’étais au paradis ! Sauf que voilà … Depuis deux petites semaines, il me semblait que tout allait de mal en pis. Du jour au lendemain, Julie avait cessé de nous rejoindre à table pour manger, se contentant de se lever la nuit lorsque nous dormions tous, pour grignoter si la faim se faisait trop forte. Elle refusait de voir ses filles et encore moins de leur parler. Elle ne quittait notre chambre qu’en journée lorsqu’elle était seule et j’avais donc du prendre la décision de laisser Allie chez ma mère pour qu’elle s’en occupe de jour -ma mère qui vivait à Paris depuis le gros passage à vide de Julie-. Je la posais donc chez elle tous les matins en allant déposer ses aînées à l’école. Et je la récupérais le soir. Et une fois de retour à la maison, je devais nourrir Allie, occuper Lou Ann et aider Lily à faire ses devoirs. Par la suite, je devais les faire manger, les faire se doucher, se changer, se laver les dents, les occuper un moment puis les coucher. Bref, je vivais à un rythme infernal. Le tout, en sachant que je surveillais Julie de près, par peur qu’elle ne fasse une grosse connerie puisque je ne l’avais jamais vu dépressive à ce point. Souvent, lorsque je me trouvais dans la pièce principale avec les filles, nous pouvions parfaitement entendre Julie pleurer dans la chambre. Raison pour laquelle je tentais au maximum de les éloigner de l’atmosphère pesante qui régnait dans le domicile familiale. Et de toute évidence, Lily n’était pas la seule à avoir du mal à supporter les crises de larmes de sa mère. Il semblerait que ce fut aussi le cas Lou-Ann, malgré son jeune âge. « C’est parce qu’elle nous aime pas ! » Je soupirai faiblement en sentant une boule me nouer la gorge à entendre une telle réponse de la part de Lily. Je leur lançai un nouveau bref regard via le rétroviseur. « Ce n’est pas ça ma Lily … C’est juste que maman est malade et a besoin de repos … » « Elle est pas malade elle est folle ! » « La folie est une maladie mon ange … Mais ta mère n’est pas folle. Elle ne se sent pas bien. C'est tout… Lou-Ann tu te souviens de la chanson que je t’ai apprise la dernière fois ? Tu veux qu’on la chante ? » « Oh oui ! Oh oui ! Commence papa ! Commence ! » Je souris en la voyant aussi enjouée, à taper ses petites cuisses de ses mains. Enfin, je tournai un bref regard vers Lily. « Attention Lily il faut que tu nous accompagnes ! Prêtes les filles ? Alouette, gentille alouette … Alouette … » Peu à peu, je cessais de chanter pour laisser mes filles aînées prendre la relève. Et je leur adressai un franc sourire en les écoutant chanter sans que je ne parle. Enfin, j'arrivai devant notre maison. J’engageai et garai la voiture dans l’allée, faisant ensuite descendre Lily puis Lou-Ann, avant de récupérer Allie que je gardais dans mes bras. Tant bien que mal, je pris leurs sacs avant de fermer la porte et prendre la direction de l’entrée. J'ouvris difficilement la porte et fis un pas à l’intérieur. Aussitôt, me figeai en découvrant un spectacle d’horreur. Le genre de chose que personne ne devrait jamais avoir à voir et encore moins des fillettes âgées de seulement sept ans, quatre ans et trois petits mois à peine. J’ignorais totalement où elle avait trouvé cette corde et comment elle s’y était prise pour l’enrouler autour de la poutre tout comme pour faire le nœud de façon solide. Tout ce que je su en la découvrant, ce fut que j’avais perdu la partie. Elle était parvenue à mettre fin à ses jours alors que depuis onze longues années, je me battais pour l’inciter à survivre ne serait-ce que pour nos filles. Et au bout du compte, il s’avérait que j’étais finalement un bien piètre époux. Je finis par retomber brutalement sur terre, en réalisant que mes filles voyaient cela. Et ne voulant pas qu’elles soient définitivement choquées par une telle vision, je me plaçai entre la scène macabre et elles pour leur cacher cette vu qui avait de quoi donner des cauchemars. « Lily file tout de suite dans ta chambre et emmène Lou-Ann. Tu te rappelles du numéro des urgences n’est-ce pas ? Alors fais le, donne leur l’adresse et … Dis leur ce que tu veux mais fais les venir. » Soufflai-je doucement en lui tendant mon téléphone portable et les regardant filer rapidement main dans la main avant de me hâter dans le salon pour mettre Allie dans son parc en sachant qu’elle était bien trop jeune pour comprendre quoi que ce soit de ce qu’il se passait. Je filai ensuite rapidement en direction de Julie. Sans attendre, je remis la chaise en place, enroulai mon bras autour de ses hanches pour la soulever et retirai la corde d'autour de son cou. Je l'étendis ensuite sur le sol. La marque profonde et violette autour de son cou, la froideur et la raideur de son corps … Aucun doute, il était bien trop tard. Elle était morte depuis de longues heures déjà. Sans doute dès l’instant où nous étions partis ce matin là. Toujours sous le choc et incapable de le croire, je la plaçai en position assise, sur le sol pour la prendre dans mes bras et la serrer avec force. Lentement, je posai mes lèvres sur ses cheveux en fermant les yeux du bout de mes doigts, avant la bercer tendrement. Enfin, je laissai les larmes couler sur mes joues, comme trop souvent lorsqu’elle parvenait à me blesser. Là c’était pire que tout … Elle me laissait seule avec nos filles. Elle nous abandonnait. Elle n’avait pas le droit et pourtant elle l’avait bel et bien fait …
« Il est toujours trop tard pour revenir en arrière. »
Cinq heures trente. L’heure de me lever. Début de journée pour moi. Arrêter le réveil, gémir d’envie de replonger dans les méandres du sommeil, se lever, faire correctement le lit, ouvrir la fenêtre puis les stores. Récupérer par la suite des vêtements propres et filer dans ma propre salle de bains pour prendre une longue douche chaude. A six heures, quitter la salle de bains parfaitement vêtu et près. Se rendre dans la cuisine pour prendre un vrai petit déjeuner complet, toujours dans l’éventualité où je n’aurais pas le temps de déjeuner à midi. A six heures trente, ranger mon petit déjeuner pour préparer celui des filles, faire chauffer les chocolat chaud et les poser sur la table avec les tartines, les yaourts et les jus de fruits. Allumer la télévision de la cuisine sur les chaines pour enfants et filer les réveiller à six heures quarante cinq. Laisser Lily et Lou-Ann descendre seules et filer à leur suite avec Allie. Une fois là, les laisser prendre leur petit déjeuner le temps de me rendre dans leurs chambres, pour aérer les pièces et faire leurs lits rapidement. Parfois, ranger un peu puis les rejoindre à six heures dix pour laisser Lily et Lou-Ann aller se préparer toute seule pendant que moi-même j’aidais Allie à s’habiller et se laver les dents. Une fois cela fait, brosser les cheveux d’Allie puis ceux de Lou-Ann avant de les faire se chausser. Et enfin, quitter la maison à sept heures vingt. Déposer en premier lieu Lou-Ann à l’école maternelle qui ouvrait à sept heures quarante puis Lily à l’école primaire pour sept heures cinquante. Et enfin, déposer Allie chez ma mère avant de filer direction le boulot pour arriver à huit heures. S’ensuivait une longue et difficile journée de travail qui, lorsque je n’avais pas de nounou pour me sauver la mise, se terminait officiellement à dix sept heures. De là, reprenait mon marathon sur le retour cette fois. Récupérer les filles, leur faire faire leurs devoir ou leur trouver une occupation quelle qu’elle soit du moment que je pouvais moi-même terminer tranquillement mon boulot de mon côté. Les faire manger à dix neuf heures. Leur faire prendre leur douche à vingt heures en commençant par Allie pour terminer par Lily et faire de même pour les coucher. Faire se coucher Allie en lui racontant une histoire à vingt heures trente puis faire de même avec Lou-Ann après avoir simplement embrassé Lily qui se couchait d’elle-même et à peine après un faible ‘bonne nuit’ lâché du bout des lèvres. Une fois les filles au lit, c'était l'heure de mon propre dîner, toujours plongé dans mes dossiers. Avant de ranger la cuisine et filer au lit, rarement avant minuit. Bref … Ma vie était très carrée, très droite et n’admettait aucun changement, aucun contre temps, rien du tout. Ma vie ne me laissais pas le temps de m’appitoyer sur mon sort et ça m’allait bien. A la mort de mon épouse, j’avais pris mes clics et mes clacs et pris la direction du centre ville parisien, pour trouver un grand appartement. Ma mère s'était également rapprochée, dans l'espoir d'alléger ma masse effroyable de travail. J'avais changé d'entreprise, mais avais conservé un poste de chef de publicité. J’avais même réussi à décrocher un poste d’intervenant régulier pour l’université. J'avais largement de quoi mettre du beurre dans mes épinards, avec ces deux emplois. Malgré tout, j'avais l’impression que rien n’avais changé pour moi. Du moins pas grand-chose. Je regrettais la mort de Julie mais très certainement pas pour les mêmes raisons qu’un autre veuf aurait pu regretter la mort de son épouse. Je me sentais coupable de sa mort puisqu’en tant que son mari, j’étais censé être capable de l’épauler et de la sortir de sa dépression. Ce dont je m’étais avéré tout bonnement incapable. Je m’en sentais d’autant plus coupable, que mes filles n’auraient ainsi jamais la chance d’avoir une mère. Je savais parfaitement que je risquais d’avoir bien du mal à les élever comme il se devrait. Mais plus encore à l’adolescence, avec toutes les conversations qu’une mère se devait d’avoir avec sa fille du point de vu des règles, des grossesses, des mst, des relations sexuelles bref … Tout ce qu’un père n’était pas censé raconter à sa fille mais plutôt à son fils, pour une majeur partie des sujets du moins. Connaissant Lily et voyant son comportement depuis la mort de sa mère trois ans plus tôt, je ne doutais pas qu’elle m’enverrait vite aller me faire voir ailleurs, plutôt que de l’ennuyer. J’avais eus beau vouloir parler de sa mère avec elle pour tenter de la faire sortir du silence derrière lequel elle se murait depuis sa mort, rien n’y avait fait. A chaque fois, c’était soit elle trouvait le moyen de quitter la pièce en affirmant avoir quelque chose à faire, soit elle faisait mine de ne pas m’entendre, en détournant totalement le regard de moi. Bref, j’avais la sensation de la perdre de jour en jour et ça me faisais un mal de chien. L’accident de voiture à côté de ce que je ressentais à voir ma fille dans un tel état de détresse, ce n'était vraiment pas grand chose. J’aurais préféré recommencer encore et encore ce putain d’accident, si ça avait pu éviter que ma fille ne vive ce qu’elle vivait là. Je savais ce que c’était que de perdre un parent à cet âge là. Donc, je savais ce qu’elle traversait et je n’avais pas envie qu’elle devienne comme moi j’avais été pendant bien trop longtemps. A savoir, renfermé sur moi-même, trop introverti, solitaire et timide. Je ne tenais pas à ce qu’elle devienne de la sorte et encore moins si c’était pour avoir un destin comme le mien. Epouser quelqu’un bien trop jeune et pour une raison qui était autre que la raison de l’amour. Certes je ne regrettais pas mes filles … Mais mon mariage avait été une belle erreur. Et j'en payais le prix, chaque jour un peu plus.
Dernière édition par T. Hugo Amiel le Dim 24 Fév - 17:24, édité 7 fois
« ADMINISTRATRICE »
Danaé-Lynn J. Hadley
▹ A PARIS DEPUIS : 10/02/2013 ▹ BAGUETTES ACHETEES : 1293 ▹ PSEUDO : yuliana ▹ CREDITS : moi-même
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 22:36
MA LOLO D'AMOUR !!! MA PETITE PERVERSE ADOREE !! MON CANARI DES ILES
BIENVENUE SUR LE FORUM & contente de te retrouver ici
ps : JARED QUOI
Ronnie P. des Pugets
les meurtrières.
les dieux nous envient parce que nous sommes mortels, parce que chacun de nos instants peut être le dernier, et que tout est beaucoup plus beau car nous sommes condamnés. tu ne seras jamais plus ravissante qu'à cet instant. plus jamais nous ne seront seuls ici tous les deux.
▹ A PARIS DEPUIS : 20/02/2013 ▹ BAGUETTES ACHETEES : 811 ▹ PSEUDO : northern lights. (manon) ▹ CREDITS : lollipops.
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Mer 20 Fév - 22:56
Jared c'est mon dieu personnel. Garde-moi un lien bien au chaud tiens. BIENVENUE.
Invité
Invité
Sujet: Re: Personne n'a dit que la vie était facile. Ils ont juste promis qu'elle en valait la peine. || Thibault Hugo Amiel Jeu 21 Fév - 5:24
Alban on fera genre alors ...
Harlem : haaaaan vraiment ? Alors ouais, je t'aime déjà toi ! *_* sans aucun souci pour le lien
MINAAAAAAAA DE MON COEUUUUUR j'aime trop ton accueil merci ma perverse adorée
Ronnie P. des Pugets
les meurtrières.
les dieux nous envient parce que nous sommes mortels, parce que chacun de nos instants peut être le dernier, et que tout est beaucoup plus beau car nous sommes condamnés. tu ne seras jamais plus ravissante qu'à cet instant. plus jamais nous ne seront seuls ici tous les deux.
▹ A PARIS DEPUIS : 20/02/2013 ▹ BAGUETTES ACHETEES : 811 ▹ PSEUDO : northern lights. (manon) ▹ CREDITS : lollipops.