L'HISTOIRE
« et puis si j'étais le bon dieu, je crois que je serais pas fier. je sais, on fait ce qu'on peut, mais il y a la manière. »

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Le couloir est long, gris, terne, interminable. L'enfer. La porte en béton armé te semble si lointaine, la lumière qui s’échappe de la petite lucarne si artificielle. La liberté. Ton cœur bat d’une force que tu ne saurais expliquer, il s’écrase contre tes côtes, si fort que tu as l’impression qu’il pourrait les briser, il t’arrache le peu de souffle que tu as tandis que tes pas te rapprochent peu à peu de ce que convoite toutes les âmes esseulées pourrissant ici. Tu n’oses regarder derrière toi. Tu aimerais, vraiment, seulement tu n’en as pas la force. Putain. Cette porte, tu l’as rêvée tellement de fois, tu l’as ardemment désirée chaque seconde depuis que tu es là, tu as prié tous les jours pour qu’on t’y amène au plus vite. Alors pourquoi, pourquoi maintenant, quand enfin tes suppliques sont exaucées, tu as envie de faire demi-tour? Tu te sens lâche. Tu aurais voulu tous les prendre avec toi, tes petits, tes protégés. Comment vont-ils faire, sans toi pour veiller sur eux? Le jeune Nico, est-ce qu’il va survivre sans ta présence? Maxandre sera-t-il assez fort pour reprendre le flambeau que tu lui as légué? Tu fermes les yeux. Sur ton visage se dépose un voile qui déforme tes traits en une expression douloureuse qui t'es peu habituelle. Et tes pas, ces idiots, continuent d’aller en avant.

Hermès observe sa carte d'identité avec un dégoût non dissimulé. Ses sourcils sont froncés par la colère, ses lèvres pincées par la rage, ses mâchoires serrées pour contenir une pulsion de violence qui menace de faire surface. Ses doigts tiennent fermement ce fichu bout de plastique qui lui assure une pseudo intégration dans cette société mal faite. Il la fait valser entre son index et son majeur, puis il l'essuie d'une dernière œillade mauvaise avant de brusquement la jeter à l'autre bout de la pièce comme si elle lui brûlait la peau. « J'veux changer de nom. J'veux prendre le tien. » Sa mère secoue frénétiquement la tête en guise de réponse, ses yeux rouges et boursouflés par les larmes. Elle n'ose défier les iris incandescentes de son fils. « Arrête de chialer maman s'il te plaît. » Elle a honte, sa mère, de se montrer dans cet état face à son propre enfant. Elle a honte, surtout, d'avoir tout déballé dans un moment de faiblesse. Tout. De lui avoir révélé que non, son père n'est pas mort mais bel et bien vivant, qu'il habite dans le seizième arrondissement de Paris et qu'il est déjà marié depuis longtemps, qu'il a déjà une fille et qu'il est pété aux as, mais aussi qu'il a accepté de reconnaître son fils seulement suite aux menaces de porte-plainte après s'être faite crachée dessus, insultée et frappée par sa cocue de femme un jour où elle voulait désespérément le revoir. Salope. « Tu réussiras mieux ta vie avec son nom plutôt qu'avec le mien. » Brutalement, le dos d'Hermès vient se rabattre contre le dossier de sa chaise, sa paume de main s'écrase sur sa cuisse et un sifflement excédé lui échappe. Elle se fout de sa gueule, putain. « M'prends pas pour un con. J'ai bien compris qu'à travers moi t'as l'impression d'avoir un peu de lui à tes côtés, et crois moi je le prends pas comme un compliment. » Là, sa pauvre mère fond sur place, ses sanglots redoublent de plus belle. Elle hoquette, sa gorge est obstruée par ce nœud de tristesse. Hermès détourne les yeux et regarde à travers la fenêtre. La pluie battante martèle les vitres et le silence qui s'installe entre les deux Féraudy devient encore plus pesant. Il se sent con, aussi! Comment a-t-il pu mener son train de vie sans se douter de rien, sans se poser de questions quant au silence de sa mère à propos de ce fameux Sylvestre Féraudy? Enfoiré. Ça le brise de voir sa mère ainsi. Ça le brise de ne pas l'entendre démentir. « Tu sais, c'est grâce à son argent que nous ne sommes pas tant dans la précarité. » Inconsciemment les poings du garçon se ferment, ses ongles pénètrent sa chair. Il faut qu'elle cesse. Qu'elle cesse d'espérer que son amant du passé puisse lui revenir un jour. Rageusement, Hermès plonge sa main dans sa poche, jette sur la table quelques pièces et quelques billets puis bondit sur ses pieds en repoussant sa chaise avec force. « Si c'est de la thune que tu veux, en v'là! Lui, il peut aller se torcher le cul avec ses billets, putain. » La porte d'entrée claque alors, sa petite sœur Asteria paraît. L'ainé fait vivement volte face et tombe nez à nez avec un regard affligé. Il déglutit. Elle hoche la tête, les yeux brillants. Honteux, il baisse les yeux et quitte tel une rafale de vent le foyer dont l'atmosphère pesante l'étouffe, au profit de sa banlieue chérie, son terrain de jeu, son royaume.

La poigne du garde sur ton bras est si ferme que des picotements font leur apparition sous ta peau, ton sang tente de se frayer un chemin dans tes veines compressées. Cette rigueur, cette main refermée sur toi comme un piège, elle te rappelle ton arrivée ici. Tu te souviens de chaque moment, de chaque seconde, de chaque détail de cet instant. Seulement là, c'est exactement la route inverse qu'ils te font emprunter. De la lumière vers les ténèbres quelques mois plus tôt, aujourd'hui tu traverses les ténèbres pour retrouver la lumière. C'est terriblement troublant. Terriblement traumatisant, aussi, parce que tu revis tes piètres débuts dans l'enceinte de ce bâtiment à l'aura noire et malveillante. Des flashs, des images, des sons, des odeurs, des larmes, des rires, aussi. Une bourrasque de réminiscences te fouette le visage. Tsss. Te remettre dans le droit chemin. Que des conneries. Tu ne l'as jamais vraiment quitté, le droit chemin. Tout ce que tu faisais, c'était pour elles, les deux femmes de ta vie, ta maman et ta petite sœur. Et pour ton meilleur ami, aussi, celui qui t'a trahi.

Les rues de Paris, celles aux hauts murs tagués et parsemées de grands ensembles, celles coupées par des terrains vagues un peu malfamés mais diablement (pour l'être, ils l'étaient) charmants, au fond. Le sombre Paris, celui divisé par différents groupes de petites frappes avides d'étendre leur territoire. Le Paris de seconde zone, où les trafics régissent d'une main de fer. C'est ça, le milieu où Hermès se plaît. Avec ses potes, ils assurent, mettent la terreur, n'hésitent pas à taper sur les concurrents. Parfois, ça tourne mal, mais malgré les hostilités, jamais les envois à l’hôpital ne connaissent des représailles de type visites de flics. Comme si une bulle entourait leur univers, à eux tous, à ces gamins perdus, et que rien, absolument rien de ce qui se passait en son sein n'en sortait. Les échos rebondissent sur eux, jamais sur les autres, ceux de l'extérieur, ceux qui ne les comprennent pas. Enfin.. C'est ce qu'il croyait, jusque là. Il y a toujours un hic quelque part. Systématiquement, quand on pense que plus rien ne peut nous atteindre, que nous sommes intouchables, eh bien c'est toujours là que tout casse. Qu'on se prend le pire revers du monde et qu'il fait l'effet d'un coup de fusil dans le cœur.

Un joint à moitié consumé dansant entre ses doigts, Hermès dodeline tranquillement de la tête sur les notes du morceau de Bob Marley qui engorgent l'air de sa chambre. Il plane. Il vole. Il oublie ses tourments le temps d'une euphorie. Soudain, on toque à sa porte. Une fois. Deux fois. Trois fois. Une voix d'homme parvient à ses oreilles, une voix d'homme qu'il ne connait pas. Les mots ne s'assemblent pas correctement dans son cerveau. Le "Monsieur Hermès Féraudy, ouvrez cette porte!" se transforme en un vague "Porte cette Hermès Monsieur Féraudy ouvrez!", ainsi, il ne réagit pas, et c'est avec surprise qu'il voit des hommes en uniformes bleus défoncer sa porte à l'aide de leur matraque que le jeune homme ne connait que trop bien. Hermès écarquille ses yeux rougis par la drogue, lâche son spliff qui s'écrase au sol. Un homme se détache du groupe, s'approche, l'attrape avec force et lui passe les menottes. « Vous êtes arrêté pour trafic de stupéfiants, attaques armées, violence et appartenance à un groupe criminel. » Bizarrement, ces mots là, ils entrent bien plus vite dans le crâne du garçon. Et y restent au passage, martèlent vilainement ses tempes. « Hein? C'est une blague? » Visiblement non. On le pousse avec vigueur et on l'escorte jusqu'à une camionnette de flics. Il croise sa mère tandis qu'il traverse la maison d'un pas rapide. Elle le regarde les larmes aux yeux, effarée, impuissante. « T'en fais pas, maman, c'est rien. » Asteria aussi, assiste à la scène, désolée, discrètement cachée derrière la porte de sa chambre. Hermès ne s'inquiète pas. Il ne se doute pas encore que cette arrestation, une parmi d'autres d'après lui, sera en réalité celle qui lui coûtera tout.

Théodore est déjà là, menotté dans un bureau d'interrogatoire. Théodore, c'est le meilleur ami d'Hermès. Celui qu'il côtoie depuis tout petit. Celui avec qui il a absolument tout partagé. Inutile d'en faire des tonnes là dessus, comprenez juste que Théodore et Hermès c'était une évidence, deux garçons inséparables, à la vie à la mort, comme ils s'amusaient à se le répéter à chaque fois. Le regard des deux compères se croisent tandis qu'Hermès longe un couloir. Mais un détail titille le Féraudy, accapare désagréablement son attention. Une lueur qu'il n'a jusqu'ici jamais vue brille dans les iris de son ami. Ce regard, il est.. Étrange. Pourquoi? Étonnement, on l'amène dans la même salle que Théodore et on les laisse là tous les deux sous la seule surveillance d'un gardien de cellule. Un sourire illumine le visage d'Hermès, ce qui n'est pas le cas de l'autre garçon. « Mec qu'est-ce que tu fous là? » Les orbites de Théo ne se détachent pas du sol, ses poings serrés sur ses genoux tremblent, il avale sa salive bruyamment. Hermès fronce un sourcil, lui frappe légèrement l'épaule comme pour le réveiller. Mais Alexandre ne sourcille pas. Seule la phrase; « Je suis désolé, mec.. Je suis vraiment désolé.. » s'échappe d'entre ses lèvres. Hermès ne comprend pas. Un sentiment de mauvais augure commence à germer dans sa poitrine. Alors qu'il s'apprête à questionner son camarade, soucieux, un officier fait son entrée. « Théodore, c'est bien ce garçon? » L'intéressé lève enfin les yeux mais n'ose croiser ceux de son meilleur ami. Il a l'air détruit. Pourquoi? « Théodore c'est à vous que je parle. » Encore un lourd silence. Les rouages se mettent en place dans la tête d'Hermès. C'est impossible. Pourtant, Théodore finit par lâcher; « Oui, c'est lui, Hermès Féraudy.. » Les trémolos dans sa voix le trahissent. Le policier rattrape Hermès et l'invite brutalement à sortir au vu de la résistance qu'il lui oppose. Parce qu'Hermès vient de saisir la supercherie. Et cette découverte lui fait l'effet d'une bombe en pleine déflagration. « Théodore, tu m'as pas fait ça?! Oh, regarde-moi! Regarde-moi Théodore, et dis moi que c'est pas vrai? » Absence de réponse. Explosion. Déception. Son cœur se déchire, des plaies s'ouvrent sur sa peau diaphane, s'acidifient douloureusement. La trahison, la pire sensation du monde. Un flic vient à la rescousse du premier pour faire sortir le garçon sorti de ses gonds, de colère et de peine. « Tu m'as balancé, salope! Putain! T'es mort, Théodore! » Durant l'interrogatoire, il n'a même pas la force de se défendre. Ni celle de faire comme celui qu'il considérait comme son frère pour alléger sa peine, c'est à dire donner les noms de ses camarades. La sentence: un petit séjour dans un centre de détention pour mineurs.

Un virage à droite. Un virage à gauche. Tu passes dans l'aile Ouest du bâtiment, celui qui regorge de toutes ces petites catins qui se prennent pour des fortes têtes et qui t'ont pourri la vie les premières semaines, celles à qui tu as déclaré la guerre après ta rébellion aux côté de toute l'aile Est et Sud. Des gars te huent et crachent par terre pour signifier leur haine envers toi et envers la sortie que tu as finalement acquise malgré toutes leur tentative de se mettre en travers de ton chemin. Puis se font finalement réprimander par les matons et grognent, rugissent comme des animaux. Parce qu'à force du temps, c'est ce qu'ils sont devenus, des êtres soumis à leurs instincts primaires, qui ne se fient qu'à la survie et à la loi du plus fort. Le centre est censé redresser les gars comme toi, et si dans ton cas cela a plus ou moins porté ses fruits, pour d'autre, c'est totalement l'inverse. D'autres se sont enlisés dans les affres de leur passé et se sont laissés bouffer par la tristesse de leur existence, par leur solitude et leur sentiment de rejet.

« Hermès Féraudy, c'est ça? C'est toi l'petit nouveau? » Hermès regarde les deux grands gaillards avec intrigue. Il connait brièvement leurs noms; des anciens l'ont mis au courant et l'ont surtout mis en garde. "Les cherche pas"; "Laisse-les faire".. Ce genre de trucs. Bah, ça, Hermès il connait. Les grandes gueules qui n'ont pas de burnes mais qui se convainquent du contraire, il en a vu passer! Cela dit, il ne peut s'empêcher de se demander ce qu'ils lui veulent. « Ouais. » Les lascars se regardent et ricanent de façon méprisante. « Féraudy.. Scuseeee, le mec s'appelle Hermès Féraudy! T'es le p'tit Prince de France ou quoi? » Hermès a le malheur de leur tenir tête. Le soir même, il se fait tabasser. Le lendemain aussi, et le surlendemain encore, et ce schéma se répète pendant.. Pendant des jours qu'il ne compte plus. Larbin de ces messieurs qui au final sont bien plus que deux, chaque seconde devient un enfer. S'il s'estime heureux de n'être avec eux que la journée et de ne pas partager le même dortoir ou les mêmes douches qu'eux, ils n'hésitent pas à frauder la nuit pour aller le faire taire à leur façon. En cognant. En l'humiliant. Et pour la première fois de sa vie sans doute, Hermès a peur. Il était maître, il est devenu clebs. Les matons lui disent de parler en voyant ses paupières violettes au réveil, ses lèvres ensanglantées, ses arcades irritées et les marques de strangulations. Mais il n'ose dire les coupables. Il met ça sur le compte de ses valeurs passées mais intimement il sait très bien que c'est la vengeance qui le tétanise. Et c'est certainement ce manque de repères qui le torture, cette impression de faiblesse aussi qui referme sur lui un étau en fer. La confiance qu'il a en lui dégringole en moins de deux. Son aisance s'envole elle aussi. Il ne dort plus. Il ne mange plus. Il mime d'être un homme fort malgré tout, il fait semblant d'encaisser sans broncher et qu'au fond il est tellement brave que ça ne l'atteint pas. Mais tout est faux. Toute sa personne n'est plus qu'une façade en titane qui s'abîme de jour en jour, son enveloppe charnelle n'est plus qu'un support vide. Heureusement, il finit par se lier avec d'autres garçons qui l'ont approché en espérant recevoir des conseils, eux aussi des tyrannisés impressionnés par le pseudo sang-froid qu'il affiche. Un des gardiens se prend aussi d'affection pour lui et veille sur lui, rend ainsi sa détention plus "agréable". Et puis, le dessin, aussi, lui permet de tenir le coup dans cet univers qui l'écrase de toute sa perversion.

Une cellule, encore une. Une espèce de sas comme un bureau de poste où on te rend tes effets personnels. Les fringues que tu avais à ton arrivée, ce vieux sweater fripé et ton jean levi's préféré. Tes portes clés, tes bagues, tes bracelets, la petite chaine qu'Asteria t'avait donnée pour ton anniversaire. Ton couteau suisse, quelques pièces de monnaies, des gribouillis qui trainaient au fond de tes poches, ton portefeuille.. Tout est emballé dans un sachet en plastique. Personne ne sait qu'en réalité ton couteau suisse t'a déjà servi, et que c'est ton ami-gardien qui te l'a repris après un long sermon pour que tu ne refasses pas des tiennes. Alors quand il te tend le paquet avec cette œillade complice et à la fois pleine de réprimandes du genre; "je compte sur toi pour pas merder dans le futur", tu ne peux réprimer cette ébauche de sourire et cette larme qui te monte à l’œil. Tu lui revaudras ça. En réalité, tu lui dois tout. C'est sans doute grâce à lui et à tes quelques camarades que tu n'as pas cédé à la bête qui sommeille en toi. Enfin pas totalement.

C'en était trop. Trop de mecs de l'aile Sud et Est prenaient par celles du Nord et de l'Ouest. Thibault s'était suicidé la semaine passée, et là, au lever du jour, il avait découvert son petit Nico complètement défiguré. Tous assis sur leur lit, personne ne dit un mot. L'atmosphère est lourde, électrique, suinte la peur. Tout le monde attend de voir revenir le petit de l'infirmerie. Hermès reste les yeux clos, la respiration courte, son sang bouillant dans ses veines. « Ça peut plus durer comme ça les gars. » Tous les regards convergent vers lui, apeurés et incrédules. Comment peut-il vouloir lutter contre ces brutes? L'absence de réaction secoue Hermès. Comme un déclic. Dans un grognement, il lâche un raisonnant "putain" et descend de sa literie armé de son couteau suisse. Seuls deux ou trois gars finissent par le suivre, ils traversent les couloirs en direction du camp ennemi. Une véritable guerre dans le dos de la hiérarchie. C'est exactement ce qui est en train de se passer. A l'entrée du côté Nord, Terry est là, glousse avec ses potes, le désigne du menton avec dédain. Il est habitué à ce qu'Hermès se laisse intimider. Seulement là, son rictus s'efface alors qu'il perçoit la lueur qui brille dans les iris incandescentes du petit Féraudy. « Qu'est-ce que tu veux, tapette? Tu veux encore qu'on te mette ton compte? » Hermès l'assassine du regard. Son poing est refermé sur son couteau, prêt à dégainer la lame au moindre écart. « Répète un peu? » En guise de réponse, il reçoit un coup de poing. Et alors que sa tête fait presque un trois cent quatre-vingt degrés, il voit derrière lui toute une armée de gars. Ses gars. Malgré la douleur lancinante du choc qu'il a reçu, il rit. Et comme si tout le monde avait compris, tous les malheureux garçons se lancent dans la mêlée. L'alarme se déclenche au passage. Hermès devient complètement dingue. Il est aveuglé par la haine. Venger Thibault, Nico, tous les autres. Littéralement, il démonte son adversaire sans se soucier de ce qui l'entoure. « ..Hermès.. Stop.. Stop.. » Cette petite voix éteinte, autrefois si orgueilleuse, il ne l'entend même pas. Dans un ultime râle, il plante son couteau suisse dans la cuisse de Terry qui hurle, son visage tuméfié méconnaissable. « Moi c'est Lazar. Lazar t'entends?! Hermès, c'est terminé sale ordure! » Enfin, les matons semblent arriver par millier. Hermès s'évanouit alors que son ami gardien l'arrache de sa victime. Lorsqu'il se réveille, il est à l'infirmerie, son "sauveur" assit à son chevet comme un père auprès de son fils malade. « T'es vraiment trop con. » Hermès bat des cils. Dans les vapes. Il ne se rappelle plus bien des événements qui ont précédés son arrivée à l'infirmerie. « Dans la confusion, ils savent pas qui a blessé Terry à ce point. T'as de la chance. J'ai retrouvé ton arme et j'l'ai mise là où ils la trouveront pas pendant l'inspection. » Le jeune homme déglutit avant de le remercier en silence. « Ta sortie est dans un mois. Tâche de plus faire le con d'ici là. » Le timbre est ferme, sans appel, suppliant, aussi. Et c'est qu'Hermès, désormais appelé Lazar dans tout le centre, fera. Il deviendra le patron de ses alliés. Le père de ces derniers. Il contiendra sa rage même si les autres feront tout pour le faire craquer quitte à s'en prendre à ses protégés. Il comptera les jours. Les minutes. Les secondes. Il pleurera des litres de larmes. Jusqu'à ce que la lumière soit et qu'on lui dise; « Hermès Féraudy, c'est le grand jour, veuillez me suivre. »

Rhabillé, ton sac sur le dos, on t'amène jusqu'à l'énorme porte de sortie. Tu ne rêves pas. Tu vas t'échapper pour de vrai. Tu entends l'énorme loquet de la porte grincer, puis tu chancèles jusqu'à ce que tu atteignes l'air libre. Quelque chose explose dans ta poitrine. Un festival d'émotions. Tes mirettes émerveillées par ce que tu n'as pas vu depuis des lustres. On te fait monter dans une camionnette avec d'autres prisonniers libérés en direction de la gare où tu prendras le train pour regagner Paris. Paperasse réglée, le moteur gronde, la voiture se met en marche. Et tandis que tu t'éloignes des enfers, un nœud de vipères au creux de ton abdomen, tu observes ces longs grillages surplombés de barbelés pour la dernière fois.

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HORS JEU ▹ GROUPE : molière. ▹ AVATAR : yuri pleskun. ▹ SCENARIO ou PERSONNAGE INVENTE : inventé. ▹ PSEUDO/PRENOM : j. ▹ ÂGE : dix sept. ▹ OU AVEZ VOUS CONNU LE FORUM? : bazzart = la vie. ▹ PRESENCE : 3/7 en moyenne.