Le 22 juin 2013, à Paris: Ses pas résonnaient dans la rue endormie. Il était plus de vingt-trois heures et Clara Lacroix, la grande Clara Lacroix, venait juste de quitter le travail et rentrait, assez rapidement, chez elle. Son mari avait tenté de la joindre à cinq reprises mais elle n'avait pas décroché, ne voulant pas se disputer une énième fois avec lui. Mauvaise idée, elle le savait. Cette journée avait été très pénible pour la jeune femme entre une petite chute des ventes, le manque de personnel, des tas de papiers à lire et à remplir, et ses problèmes de couple ... Clara leva les yeux au ciel, pensant à la soirée et à la nuit qu'elle allait passer. Elle se préparait mentalement à un nouveau conflit avec Grégory. Cela faisait plus de cinq ans qu'ils étaient mariés et en ce moment, leur couple battait sérieusement de l'aile. Il lui reprochait de ne jamais être présente, même les week-ends, de n'avoir plus aucune vie sexuelle ... Bref. C'était le bordel. Clara activa le pas et arriva devant son appartement. Robert, le portier, lui souhaita une bonne soirée en lui ouvrant la gigantesque porte en verre: « Merci, Robert. » avait-elle répondu, calmement et avec un sourire, comme d'habitude. Elle monta les marches de marbre, tremblante. Elle n'avait jamais autant appréhendé quelque chose de toute sa vie. Clara sonna et poussa la lourde porte en bois: « Je suis rentrée. ». Rien, pas de réponse. Elle aperçut Greg de dos, assis à table, appuyé sur les coudes. L'atmosphère était lourde, étrange et ne faisait qu'attiser la peur de Clara. Elle fit semblant de rien, retira ses talons hauts et alla embrasser son mari sur la joue. Aucune réaction. Elle jeta un coup d'oeil à la table. Un immense chandelier trônait au centre de la table, impeccablement dressée. Des plats garnis de mets somptueux étaient disposés un peu partout. Clara se força à sourire: « C'est magnifique, Greg ! Tu as dû mettre du temps à faire tout ça ! ». Elle pencha à nouveau pour l'embrasser mais ce dernier détourna la tête. Il ne lui laissa pas le temps de parler: « Quel jour sommes-nous, Clara ? ». Bouche bée, la jeune femme eut du mal à répondre: « Le ... le 22 juin. Le 22 juin pourquoi ? ». Gregory la dévisagea, essayant tant bien que mal à garder son calme: « C'est notre cinquième anniversaire de mariage .. C'est la cinquième fois que tu l'oublies. ». Clara se figea. C'est vrai: aujourd'hui, ils fêtaient leur cinquième anniversaire de mariage. Aujourd'hui, cela faisait la cinquième fois qu'elle l'oubliait à cause du fait qu'elle ne pensait qu'à son travail. Complètement abasourdie, elle tira, tremblante, la chaise devant elle, se servit un verre de vin et le but cul-sec. Elle s'en servit un deuxième et attendit. Greg la fixait, impassible. Il rompit le silence lourd, pesant qui s'était installé depuis plusieurs minutes: « Je pense qu'il faut qu'on arrête tout, Clara. » « Quoi ? ... ». Un simple murmure. Si elle essayait à nouveau de parler, elle fondrait en larmes. L'homme baissa le regard mais gardait cet air stoïque qui terrorisait sa femme. Clara le fixait, sans réellement comprendre. Enfin ... elle comprenait mais refusait pertinemment de l'admettre. Gregory soupira et la regarda droit dans les yeux, l'air désolé: « Ça ne marche plus, Clara. On ne se voit même plus. Tu passes la plupart de ton temps au travail ... C'était quand la dernière fois que nous avons mangé au restaurant ? La dernière fois qu'on a vraiment discuté ? La dernière fois qu'on a fait l'amour ? ... Tu m'as dit que tu changerais, mais ça fait trois ans que je l'attends ce changement. C'est fini maintenant. Je t'avais prévenue. Je suis désolé. Mais sache que je t'aimerai toujours. ». Et sans attendre la moindre réponse de Clara qui tentait de trouver une excuse, il se leva, alla dans la chambre, sortit avec une valise et se dirigea vers la porte. Clara se sentait impuissante. Son amour, l'homme avec qui elle s'était jurée de passer le reste de sa vie partait ... Et ça, à cause d'elle. Elle but son verre cul-sec, le posa et se leva brusquement: « Tu ne peux pas partir ! ». Greg se retourna: « Et pourquoi ? ». La réponse de Clara fut immédiate: « Parce qu'on s'aime. ». Elle avança vers lui et l'embrassa, tremblante. Une larme roula sur sa joue. Ce fut un baiser passionné, amoureux, plein d'espoir. Il la repoussa doucement: « C'est comme ça, Clara. ». Il ouvrit la porte, quitta l'appartement et lança un dernier regard à Clara avant de refermer doucement la porte. Figée, carrément impuissante, Clara fixait la poignée de la porte en espérant la voir s'abaisser avant de voir Greg rentrer et s'excuser. Mais rien. Le silence. Elle traversa la pièce en courant et sortit sur le balcon. Une voiture noire, celle de Grégory, sortit du garage et s'éloigna rapidement. C'était fini.